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Droit de grève un consensus difficile sur une loi polémique au Maroc

by Chia
Droit de grève un consensus difficile sur une loi polémique au Maroc

Droit de grève : un consensus difficile sur une loi polémique au Maroc

Dans un recoin d’un café de la ville d’Ouzzane, près d’Agadir, Mohamed Loushahi, enseignant au secondaire, réfléchit au projet de loi organique sur le droit de grève actuellement débattu au sein de la première chambre du Parlement. Ce débat suscite des inquiétudes quant à la possibilité d’un contournement d’un droit pour lequel des générations de syndicalistes et de politiques se sont battues au Maroc.

Inquiétudes croissantes des enseignants

Loushahi exprime ses craintes face à cette loi, émergeant dans un contexte d’une vague de grèves sectorielles qui ont gravement affecté le fonctionnement normal de divers services publics tels que l’éducation et la santé. Il souligne que le débat sur cette loi souffre d’un manque d’inclusion, ne représentant pas une large frange des travailleurs en raison de la faiblesse des institutions syndicales.

Il s’inquiète notamment d’un potentielles entraves au droit de grève, craignant que cela ne soit limité aux causes que le gouvernement considère comme valables, sans tenir compte des perspectives des travailleurs. Loushahi redoute également que l’usage de la grève soit utilisé comme une arme pour sanctionner les employés dans leur avancement professionnel.

S’ajoutent à cela des préoccupations concernant l’inclusion de « sanctions privatives de liberté » et des restrictions sur la liberté syndicale, des sujets qui suscitent un vif débat entre le gouvernement et les syndicats.

![Mohamed Loushahi, enseignant au secondaire au Maroc](https://aljazeera.net/wp-content/uploads/2024/07/What.48-1722329060.jpeg?w=770&resize=770%2C513)

Appels à révision des lois répressives

De son côté, Abdelilah Dahman, secrétaire général adjoint de l’Union nationale du travail au Maroc, met en avant la nécessité de revoir plusieurs dispositions législatives qui entravent clairement l’exercice du droit de grève et de la liberté syndicale. Il appelle à l’instauration de mesures d’accompagnement pour améliorer les relations professionnelles et désamorcer les tensions sociales.

Dahman insiste sur l’importance de ramener la proposition de loi sur le droit de grève à la table des discussions sociales multidisciplinaires, soulignant que les questions sociétales ne devraient pas être traitées de manière unidimensionnelle. Il prône un consensus national garantissant une véritable pratique syndicale, tout en réaffirmant que le droit de grève est un outil crucial pour défendre les droits de la classe ouvrière face à des employeurs qui bafouent ces libertés.

![Abdelilah Dahman, secrétaire général adjoint de l’Union nationale du travail](https://aljazeera.net/wp-content/uploads/2024/08/%D8%BA%D9%85%D9%8A%D9%85%D8%B7-4-1723462182.jpeg?w=770&resize=770%2C513)

Restrictions toujours en discussion

Abdallah Ghamimt, secrétaire national de l’Université nationale des enseignants – orientation démocratique, note que le projet de loi 15-97, que le gouvernement souhaite mettre en œuvre pour réguler le droit de grève, propose plusieurs volets restrictifs. Il déclare que le projet limite la grève aux revendications sociales et économiques, interdisant explicitement « les grèves politiques contre les politiques publiques du gouvernement ».

Ghamimt exprime le refus de son syndicat face à ces propositions, considérant ces mesures comme des reculs inacceptables au regard du droit constitutionnel à la grève, une question que le gouvernement avait promis de réexaminer.

![Abdallah Ghamimt, secrétaire national de l’Université nationale des enseignants](https://aljazeera.net/wp-content/uploads/2024/07/Wha0.47-1722329048.jpeg?w=770&resize=770%2C513)

Les enjeux gouvernementaux

Face aux inquiétudes partagées par une grande partie des employés du secteur public et privé ainsi que leurs syndicats, le gouvernement, par l’intermédiaire de Younes Skouri, ministre de l’Intégration économique et de l’Emploi, insiste sur l’importance de faire adopter cette loi organique, qui consiste à préciser les conditions d’application du droit de grève reconnu dans le premier constitution de 1962 et réaffirmé dans toutes les constitutions ultérieures, notamment celle de 2011.

Skouri affirme que le gouvernement a pris des engagements pour réaliser des consultations avec les partenaires sociaux sur ce projet de loi. Ces consultations, qui ont duré plus de 20 mois, ont inclus près de 50 rencontres, visant à rassembler les points de vue des différents acteurs.

![Younes Skouri, ministre de l’Intégration économique et de l’Emploi](https://aljazeera.net/wp-content/uploads/2024/07/Wha0.47-1722329048.jpeg?w=770&resize=770%2C513)

Un équilibre à trouver

En réponse aux craintes des travailleurs quant à cette loi, Skouri mentionne que le gouvernement adopte une méthode collaborative, cherchant à établir des dispositions équilibrées qui garantissent l’exercice du droit de grève sans restriction. Il insiste sur le fait que le gouvernement ne tolérera aucune atteinte à ce droit et qu’il saura préserver le cadre juridique des droits cités dans la constitution et les lois organiques concernées.

Le ministre conclut que la loi à venir vise à répondre à une attente de 60 ans tout en respectant les engagements du gouvernement envers les droits fondamentaux des travailleurs.

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