Home Actualité80 ans après la Mésaventure de Tiaroye : La Sénégal réclame la vérité

80 ans après la Mésaventure de Tiaroye : La Sénégal réclame la vérité

by Sara
Sénégal, France

80 ans après la Mésaventure de Tiaroye : Le Sénégal réclame la vérité

Le journal New York Times a rapporté que le massacre de soldats ouest-africains par les forces coloniales françaises à la fin de la Seconde Guerre mondiale au Sénégal reste entouré de secret, mais le nouveau gouvernement sénégalais pousse désormais la France à faire la lumière sur cette tragédie.

Le New York Times, dans un article écrit par Éléan Peltier et Saïko Gaye, explique que le Sénégal a pris l’initiative de demander à la France des éclaircissements à l’approche du 80ème anniversaire du massacre de Tiaroye, l’une des périodes les plus sombres de son histoire coloniale en Afrique. Le Sénégal veut faire en sorte que cela ne soit pas oublié, marquant ainsi un tournant dans ses relations avec l’ancienne puissance coloniale.

Une demande de reconnaissance et de justice

Le président français Emmanuel Macron a récemment qualifié ces événements de « massacre » dans un message à son homologue sénégalais Passy Diumaï Faye, devenant ainsi le premier président français à utiliser ce terme. Cependant, le président sénégalais a déclaré que « ce n’est pas suffisant. Nous ne savons toujours pas combien de personnes ont été tuées, pourquoi et comment, et où elles ont été enterrées ».

Le célèbre historien sénégalais Mamadou Diouf, qui a été nommé par le gouvernement pour diriger une commission de recherche sur le massacre, a souligné que Tiaroye pourrait devenir un symbole d’une conscience africaine commune parmi les pays ayant perdu des citoyens dans cette tragédie. Ce revirement de la position sénégalaise est un « signe de séparation et une affirmation forte de la souveraineté ».

Les événements tragiques du 1er décembre 1944

Le matin du 1er décembre 1944, les troupes françaises rassemblent des centaines de soldats ouest-africains basés temporairement à Tiaroye, près de Dakar. Ces hommes, venus de 12 colonies africaines, attendaient une compensation financière pour des années de service, mais l’argent ne venait pas.

Avec l’escalade des tensions, les officiers français ont promis de « rétablir l’ordre », apportant mitrailleuses, deux bataillons, des chars et d’autres véhicules militaires pour montrer leur supériorité. Selon un rapport militaire, les soldats français ont tiré plus de 500 balles en 15 secondes, résultant en une première estimation officielle de 35 morts.

Cependant, des historiens estiment que le nombre réel de victimes pourrait être proche de 400, soulignant que les soldats ouest-africains n’étaient pas armés et que les incohérences dans les rapports militaires suggèrent une intention de dissimulation de la part de la France.

Garder la mémoire vivante

Malgré le silence sur les événements de 1944, Tiaroye a profondément marqué la conscience collective sénégalaise à travers des pièces de théâtre, des poèmes, des chansons et le film « Kan de Tiaroye », sorti en 1988. Le gouvernement sénégalais actuel fait de cette mémoire une question politique, célébrant le 80ème anniversaire du massacre avec la rénovation d’un cimetière militaire à Tiaroye.

Ce cimetière contient 35 tombes, correspondant au nombre officiel de victimes, mais de nombreux Sénégalais doutent de leur authenticité. Biram Senghor, dont le père a été tué là-bas en 1944, a déclaré : « Ces tombes ne sont qu’une blague », et a exprimé son désespoir quant à la possibilité de retrouver les restes de son père.

Le président Faye, dans une récente interview, a affirmé que seule la vérité permettrait au Sénégal et à la France d’avancer vers un partenariat « sans les vestiges douloureux » de leur passé, tout en appelant au départ des troupes françaises encore présentes au Sénégal.

You may also like

Leave a Comment