Actuellement, la zone euro fait face à deux questions cruciales. La première concerne la manière d’accompagner le programme de réformes que les Européens ont adopté. Les rapports d’Enrico Letta sur le marché intérieur et de Mario Draghi sur la compétitivité fournissent à l’Union européenne une feuille de route ambitieuse, visant à transformer le projet d’intégration économique en un véritable levier de modernisation et de redressement. Toutefois, l’expérience démontre que le succès d’un tel programme est fortement lié à l’environnement macroéconomique dans lequel il est mis en œuvre.
Réponses aux défis américains
La deuxième question porte sur la manière dont la zone euro va répondre aux politiques de Donald Trump. Celui-ci, qui prendra ses fonctions à la Maison Blanche dans moins d’un mois, a clairement exprimé son intention de s’attaquer aux excédents extérieurs des partenaires commerciaux des États-Unis. Depuis quinze ans, la zone euro a accumulé des excédents de balance des paiements. En 2024, elle devrait enregistrer un solde courant nettement supérieur à 3 % du produit intérieur brut, avec un actif extérieur net dépassant 1 000 milliards d’euros. Trump, qui a une vision mercantiliste de l’économie, pourrait faire pression pour que l’Allemagne, en particulier, réduise son excédent.
Réallouer l’épargne
Ces deux questions sont étroitement liées. Au cours des quinze dernières années, la zone euro a agi comme si elle pouvait compter sur ses partenaires commerciaux pour stimuler sa croissance, tout en exportant massivement son épargne vers le reste du monde, notamment vers les États-Unis. En agissant ainsi, elle s’est comportée comme une petite économie ouverte, ce qui n’est pas le cas. Il est important de noter que tous les pays de la zone euro ne se situent pas dans la même situation : par exemple, la France présente depuis longtemps un déficit de son compte extérieur, devenant ainsi une importatrice nette d’épargne. En revanche, des pays comme l’Allemagne, les Pays-Bas, les pays scandinaves, et même l’Espagne affichent des surplus extérieurs significatifs, qu’ils investissent sur le marché financier américain.