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Syrie : Une langue codée pour échapper aux mouchards d’Assad

by Sara
Syrie

Syrie : Une langue codée pour échapper aux mouchards d’Assad

« Les murs ont des oreilles », une expression partagée par les Syriens pour avertir leurs compatriotes que les agents des renseignements syriens surveillent les cafés, les taxis, et même les salons de vie. L’angoisse d’être écouté s’est ancrée dans chaque aspect de la vie quotidienne.

Une réalité omniprésente

La méfiance règne, et il est impossible de savoir si une personne, qu’il s’agisse d’un concierge, d’un collègue, d’un vendeur ou même d’un membre de la famille, est un informateur. Le système de sécurité a infiltré tous les recoins de la société syrienne, créant un climat de peur qui perdure depuis près de 50 ans sous le régime de Hafez al-Assad et de son fils Bachar al-Assad.

Des codes pour communiquer

Face à cette oppression, les Syriens ont développé une langue codée pour s’exprimer librement, réservée uniquement à leurs proches. Dans un rapport du Washington Post, les journalistes Ruby Melin et Mohamed Chamaa illustrent ce phénomène à travers des témoignages de Syriens.

Des expressions évocatrices

« Si quelqu’un est soupçonné d’être un informateur, on dit qu’il a une « belle écriture » », révèle Maysoun, 49 ans, qui a requis l’anonymat. Ce langage codé était nécessaire pour éviter d’attirer l’attention des autorités.

Aliyah Malik, une écrivaine syrienne, souligne que les Syriens ne pouvaient jamais savoir qui les écoutait, ce qui les contraignait à utiliser des termes cryptés.

Une économie sous contrôle

Le rapport cite également le témoignage de Thabet Biro, un informaticien de 60 ans, qui explique que mentionner des devises étrangères était risqué, car le régime cherchait à contrôler la valeur de la livre syrienne. Par conséquent, des mots comme « dollar » étaient remplacés par « le vert ».

Biro, qui vit maintenant à Dubaï, se souvient que même ces termes étaient rapidement compris par les autorités, poussant les Syriens à utiliser des alternatives comme « persil » ou « menthe » pour désigner la couleur verte.

Des métaphores inquiétantes

Les craintes d’arrestation étaient omniprésentes. Les Syriens se référaient à la prison comme à « la maison de la tante », une façon détournée d’aborder un sujet délicat. Selon le réseau syrien des droits de l’homme, plus de 110 000 personnes ont subi des disparitions forcées depuis 2011.

Abdel-Warith al-Laham, 45 ans, raconte son arrestation en janvier 2012 lors d’une manifestation. Après avoir été torturé, il se dit surpris par la résilience du corps humain. Malgré sa libération, il ressent un profond malaise à l’idée des personnes qu’il a laissées derrière lui.

Un langage de menace

La langue codée n’était pas seulement utilisée par les civils. Le régime d’Assad avait son propre « vocabulaire diabolique ». Les services de renseignement utilisaient des invitations à « prendre une tasse de thé » pour convoquer des personnes à des interrogatoires. Selon al-Laham, une invitation à « un café » suggérait des conséquences plus graves.

Un futur incertain

Alors que la Syrie entre dans une nouvelle ère avec l’espoir d’une liberté d’expression retrouvée, le poids des décennies de peur demeure. De nombreux Syriens aspirent à rentrer chez eux, mais les traumatismes laissés par le régime d’Assad sont profondément ancrés dans leur mémoire.

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