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Alors que Taiwan est à la pointe de la production de semi-conducteurs, l’île fait face à des enjeux climatiques croissants. L’industrie des semi-conducteurs représente un quart de son produit intérieur brut (PIB), mais constitue également une source majeure d’émissions de carbone.
Un contraste frappant
Hsinchu, une petite ville près de Taipei, est souvent désignée comme la Silicon Valley du monde. À proximité des paisibles rizières, d’énormes bâtiments abritent des usines qui produisent les puces électroniques essentielles à nos smartphones, ordinateurs et systèmes d’intelligence artificielle (IA).
Cependant, cette coexistence entre la nature paisible et la fabrication de haute technologie est de plus en plus mise à l’épreuve sur l’île. Taiwan Semiconductor Manufacturing Company Limited (TSMC) est le principal fabricant de puces, détenant 64 % du marché mondial des semi-conducteurs au troisième trimestre 2024.
Des défis de durabilité
Malgré son succès dans l’industrie des semi-conducteurs, Taiwan doit faire face à des défis en matière de durabilité. La fabrication de puces consomme d’énormes quantités d’eau et d’énergie, générant des émissions chimiques significatives. TSMC, à lui seul, consomme environ 8 % de l’électricité de l’île.
Selon Chia-Wei Chao, directeur de recherche au Taiwan Climate Action Network, « l’industrie électronique est le plus grand émetteur de Taiwan, après l’industrie pétrochimique ». Ce conflit entre l’industrie et l’agriculture s’est intensifié, notamment lorsque le gouvernement taïwanais a interrompu l’irrigation des fermes pendant une sécheresse en 2021 pour fournir de l’eau aux usines.
L’essor de l’IA et la pression énergétique
Alors que l’utilisation de l’eau par les usines de puces a attiré l’attention internationale, les Taïwanais s’inquiètent désormais de la consommation énergétique de l’industrie. L’essor de l’IA a entraîné une demande accrue pour les puces, mettant la pression sur les usines.
Lena Chang, militante de Greenpeace, souligne que « le marché de l’IA devient plus fou que jamais », entraînant des préoccupations concernant les émissions et des pénuries d’énergie potentielles. « L’objectif principal est désormais de développer l’IA, pas de se soucier de la durabilité énergétique », ajoute-t-elle.
Une transition énergétique lente
Le marché énergétique taïwanais est en pleine transition, le pays abandonnant ses réacteurs nucléaires, tandis que le développement des énergies renouvelables, comme le solaire et l’éolien, reste lent. Plus de 80 % de l’approvisionnement énergétique provient encore de combustibles fossiles.
Le gouvernement taïwanais a fixé un objectif de 20 % d’énergies renouvelables d’ici 2025, un objectif jugé difficile à atteindre. Les projets d’éolien offshore, par exemple, ont été revus à la baisse, les attentes de production étant réduites.
Vers une agriculture durable
Chia-Wei Chao mène des projets pilotes permettant aux agriculteurs d’installer des panneaux solaires sur leurs terres, cherchant à rétablir la confiance entre les agriculteurs et l’industrie. « Nous ne devrions pas forcer les agriculteurs à vendre leurs terres », plaide-t-il.
Malgré ces efforts, le marché énergétique de Taiwan reste fortement dépendant des combustibles fossiles, tandis que la consommation d’énergie de l’industrie des semi-conducteurs continue d’augmenter rapidement.
Les défis globaux des semi-conducteurs
Les problèmes de Taiwan ne sont pas uniques. La pandémie de COVID-19 a souligné la nécessité pour les gouvernements, tels que ceux des États-Unis et de l’Union européenne, de renforcer leur production locale de semi-conducteurs. Cependant, ces pays font face à des enjeux similaires en matière d’approvisionnement en eau et d’impact environnemental.
Des études montrent qu’une augmentation de la production en Europe pourrait multiplier par huit les émissions associées à la fabrication de semi-conducteurs, contredisant d’autres politiques environnementales.
Les émissions de gaz dans l’industrie
Outre la consommation d’eau et d’énergie, la fabrication de semi-conducteurs produit également des gaz à effet de serre. Emily Gallagher, directrice du programme Sustainable Semiconductor Technologies and Systems en Belgique, souligne que les émissions de type « scope 1 », qui proviennent directement du processus de fabrication, sont préoccupantes.
Avec l’augmentation des efforts de décarbonisation, l’importance de ces émissions est appelée à croître. Alors que Taiwan continue d’être au centre de l’hypothèse mondiale de l’IA, la capacité du marché énergétique local à soutenir cette demande reste incertaine.