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À une époque où la crise du logement est reconnue comme un défi durable et doit être une préoccupation partagée, un aspect reste insuffisamment exploré. Dans les grandes villes françaises, l’accès au logement devient de plus en plus difficile, avec une demande en constante augmentation et une détérioration du mal-logement. Dans les petites et moyennes villes, où l’attractivité est recherchée, le manque de logements à louer freine l’arrivée de nouveaux habitants et incite les jeunes à partir.
Un paradoxe alarmant
En tant qu’élus locaux, nous sommes interpellés quotidiennement par des personnes et des familles confrontées à des logements trop petits, insalubres ou inabordables. Nous recevons également des demandes de ceux qui vivent chez des parents ou amis, ainsi que de familles sans toit. Nos concitoyens, témoins de l’état de logements ou d’immeubles inoccupés qui se dégradent depuis de nombreuses années, s’interrogent sur notre inaction.
Nous devons faire face à ce paradoxe : malgré cette crise, 3,1 millions de logements sont vacants en France, dont 1,1 million depuis au moins deux ans. Les raisons sont multiples : successions bloquées, travaux nécessaires trop lourds, attente d’un « bon coup » immobilier, ignorance des coûts de l’inaction prolongée. Tous les territoires sont concernés, qu’il s’agisse de secteurs ruraux, de zones touristiques ou de métropoles denses. Ces logements inoccupés représentent un gaspillage de ressources précieuses et un enjeu crucial pour l’avenir de nos territoires.
Favoriser la mixité sociale et lutter contre l’étalement urbain
La lutte contre la vacance des logements est essentielle pour créer des villes durables, résilientes et accessibles à tous. Chaque logement vacant réhabilité, chaque friche reconvertie et chaque bâtiment désaffecté réutilisé représentent des réponses directes à la crise du logement, en cohérence avec l’objectif de « Zéro artificialisation nette ». Nous avons la responsabilité de transformer cette crise en opportunité pour repenser nos territoires, redynamiser nos centres-villes, favoriser la mixité sociale et lutter contre l’étalement urbain qui grignote nos terres agricoles et naturelles.
Nous, élus locaux, devons agir de manière proactive, mais nous ne pouvons pas le faire seuls. Nous appelons à une mobilisation nationale, associant l’État, les partenaires institutionnels, publics et privés, ainsi que tous les acteurs de la filière – investisseurs, financeurs, professionnels de l’immobilier et du bâtiment.
Les enjeux économiques de l’inaction
L’équilibre économique des opérations dans l’ancien est souvent complexe, rendant la construction de nouveaux logements moins risquée et moins coûteuse que la rénovation. Toutefois, il ne faut pas sous-estimer les coûts de l’inaction. Le coût collectif englobe les dépenses engagées par une collectivité pour sécuriser un bâtiment vacant, voire l’acquérir et le rénover. Le coût individuel, quant à lui, augmente chaque année avec la dégradation du bâti, entraînant une baisse de la valeur des biens et une augmentation des coûts de rénovation.
Depuis 2022, nous, élus locaux de 21 collectivités de métropole et d’outre-mer, représentant 16 % de la population, avons choisi de nous unir au sein de l’association Agir contre le logement vacant, afin que les moyens et le soutien national soient à la hauteur des enjeux.
Renforcer les leviers de lutte contre la vacance
Le plan national de lutte contre les logements vacants, lancé en 2020, a permis de dynamiser la situation. Cependant, les moyens actuels ne suffisent pas à répondre aux réalités opérationnelles. Nous appelons donc l’État à stabiliser et renforcer les leviers suivants :
- Identification plus fiable des logements vacants (Lovac) ;
- Mise à disposition gratuite et pérenne de l’outil numérique Zéro logement vacant pour les collectivités locales ;
- Augmentation des moyens en ingénierie pour accompagner, contraindre ou remplacer les propriétaires ;
- Soutien national aux initiatives des collectivités ;
- Fiscalité au service de la rénovation et de la lutte contre le logement vacant, y compris un nouvel outil d’investissement locatif abordable dans l’ancien ;
- Évolution des procédures pour améliorer l’efficacité des actions locales ;
- Aides proportionnelles aux propriétaires bailleurs en fonction de leurs engagements sociaux ;
- Soutien aux opérations innovantes portées par des partenaires privés à impact social.
Nous invitons toutes les collectivités engagées contre le logement vacant à nous rejoindre. Ensemble, État, collectivités et partenaires, nous pourrons progresser dans la lutte contre le logement vacant, le transformant en un levier pour nos politiques locales de l’habitat et un atout pour l’attractivité et la résilience de nos territoires.