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Libye : Quel avenir pour la réconciliation politique et sociale ?
La notion de « réconciliation nationale » est entrée dans le débat sur la crise libyenne depuis 14 ans, et elle a été largement discutée entre partenaires et adversaires. Il existe même deux projets contradictoires de réconciliation nationale en Libye: le premier lancé par le Conseil présidentiel en 2021 et le second approuvé par le Parlement libyen en janvier dernier.
Dans le contexte des tensions politiques entre les rivaux, l’Union africaine a finalement réussi à faire des avancées dans le dossier de la réconciliation nationale en Libye, en signant un pacte de réconciliation à Addis-Abeba, impliquant certaines parties libyennes. Toutefois, cette démarche a été critiquée pour son manque d’inclusion.
Les critiques du pacte de réconciliation
Le pacte a été signé sans la participation des principales parties prenantes de la crise. Cela soulève plusieurs questions: qui a signé ce pacte et pourquoi a-t-il suscité des critiques ? Sur quelles bases repose-t-il ? Et enfin, quelle est la priorité : la réconciliation politique ou sociale ?
Pour mieux comprendre l’absence des parties actives lors de la signature, Al Jazeera a interrogé plusieurs figures libyennes influentes.
Pourquoi certaines parties sont-elles absentes ?
Selon le membre du Parlement, Jibril Awida, l’absence de certaines parties actives au forum de réconciliation est due à leur perception que la question ne relève plus d’une véritable réconciliation, mais simplement d’un redéploiement du pouvoir. Le politologue Kamel Marach partage cet avis, en affirmant que la réconciliation devrait être une démarche sociale et juridique, loin de la politisation et du partage des pouvoirs.
Moussa Ibrahim, représentant de Saïf al-Islam Kadhafi, souligne que le pacte est le fruit d’efforts de plusieurs années, impliquant diverses parties libyennes, même celles qui ne l’ont pas signé.
Les opinions divergentes sur le pacte
Sad Ben Charada, membre du Conseil d’État, décrit le pacte de réconciliation nationale comme un simple arrangement pour le partage du pouvoir, arguant que les principales parties en Libye sont en lutte pour l’argent et le pouvoir, plutôt que pour la réconciliation. Le député du Conseil présidentiel, Moussa Koni, a exprimé sa déception face à l’absence des dirigeants politiques lors de la signature du pacte à Addis-Abeba, ce qui a, selon lui, compromis l’initiative.
Cependant, Moussa Ibrahim a affirmé qu’un « dialogue constructif » avec les représentants du Conseil présidentiel a finalement conduit à leur adhésion au pacte.
Les priorités de la réconciliation : politique ou sociale ?
Kamel Marach soutient que la réconciliation doit émaner de la société elle-même, sans considérations politiques. Il avertit que l’inclusion des acteurs politiques dans ce processus pourrait engendrer davantage de divisions. Jibril Awida insiste sur la nécessité d’arrêter les interventions extérieures qui compliquent encore plus les divisions politiques avant de parler de réconciliation nationale.
Ben Charada, quant à lui, estime que le discours sur la réconciliation doit être accompagné de mesures concrètes qui garantissent des concessions de toutes les parties pour le bien du pays, et non de simples accords formels.
Réconciliation en Libye : un enjeu complexe
Le représentant des tribus de Tarhouna, Abdel Salam Al-Zaydi, a déclaré que la réconciliation nécessite de privilégier l’intérêt national sur les intérêts personnels, en rejetant la division. En revanche, Abdullah Abdul Rahman Madriqi, membre de la Commission de réconciliation nationale représentant les Toubous et les Zouaïa, a exprimé des doutes quant à la possibilité d’atteindre un consensus réel, soulignant la nécessité d’établir des bases solides pour la réconciliation.
Il est essentiel de déterminer les acteurs influents et de mettre fin à l’anarchie sécuritaire en expulsant les mercenaires et les forces étrangères, tout en recherchant une vision commune des puissances internationales et régionales concernant la crise en Libye.
La nature du conflit en Libye
Selon Marach, le conflit en Libye n’est ni idéologique ni régional, mais plutôt une lutte pour le pouvoir et l’argent. Jibril Awida rejette l’idée de rivalité entre les Libyens, affirmant que le différend est limité aux élites politiques qui se disputent les postes. Il insiste sur le fait que la solution réside dans les élections, et non dans des accords de réconciliation formels conçus pour obtenir des gains politiques.
Enfin, Farakach conclut que le conflit n’est pas fondamentalement idéologique ou social, mais plutôt une lutte pour l’influence sur les institutions vitales du pays.
Les priorités du courant Kadhafi en matière de réconciliation nationale
Moussa Ibrahim insiste sur le fait que la vision du groupe de réconciliation de Saïf al-Islam Kadhafi est « globale et non fragmentée », ancrée dans une pensée qui prône l’unité et la stabilité de la Libye dans le cadre d’un système démocratique complet. Les principales demandes incluent la libération des prisonniers politiques et le retour des déplacés et réfugiés.