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La brutale évasion du détenu en mai 2024, qui avait coûté la vie à deux agents pénitentiaires, avait suscité effroi et colère. Mohamed Amra a été interpellé ce samedi en Roumanie.
L’évasion
C’est une évasion digne d’un film hollywoodien d’une violence extraordinaire mais malheureusement, et contrairement à la fiction, les balles tirées furent bien réelles. Le 14 mai 2024, un commando lourdement armé intercepte un camion pénitentiaire transportant le détenu Mohamed Amra au péage d’Incarville (Eure). Cette opération sanglante va grièvement blesser trois surveillants et coûter la vie à deux autres agents pénitentiaires. La police française se lance alors dans une cavale qui va durer près de 10 mois jusqu’à son arrestation.
Le 14 mai 2024, sur l’autoroute A13, il est 11 heures du matin. Un convoi pénitentiaire, composé d’un fourgon et d’une voiture suiveuse, transfère un détenu, Mohamed Amra, depuis le tribunal de Rouen jusqu’à la prison d’Évreux.
Le détenu, âgé de 30 ans, a été condamné plusieurs fois à des peines de prison pour des faits en lien avec le narcotrafic, mais aussi pour vols, recels ou encore délits routiers. Tout devrait bien se passer… Mais à mi-parcours, à hauteur du péage d’Incarville, un événement sans précédent va se produire. Une attaque violente qui va choquer la France entière.
Alors qu’il franchit la barrière du péage, le fourgon est percuté de face par une Peugeot 5008 noire qui stationnait sur un parking. Cette voiture avait forcé la barrière du péage dix minutes plus tôt. Au même moment, une autre BMW noire bloque la voiture suiveuse par l’arrière. Le convoi est pris au piège.
Les membres du commando, vêtus de noir, cagoulés et armés de kalachnikov, donnent l’assaut. Ils abattent l’un des agents pénitentiaires, Fabrice Moello, qui se trouve côté passager du fourgon, sans aucune sommation. Arnaud Garcia et son collègue Nicolas, pris en étau entre le fourgon et la BMW, essuient aussi le feu de deux, voire trois autres assaillants. L’un d’eux touche mortellement Arnaud Garcia à la tête. Nicolas, le chauffeur, est gravement atteint à l’épaule droite mais parvient à se coucher sous le volant.
Dans la foulée, le commando réussit à ouvrir la porte latérale du fourgon et à extraire Mohamed Amra. Trois minutes seulement après le premier « contact », les assaillants s’échappent avec le détenu à bord de la BMW noire et d’une troisième voiture, une Audi Q5 blanche. Ils abandonnent la Peugeot 5008 après y avoir mis le feu.
Surnommé « La Mouche », Mohamed Amra devient l’homme le plus recherché de France, l’ennemi public numéro 1. Tout porte à croire qu’il serait à la tête d’un vaste et dangereux réseau criminel, ce qui expliquerait une telle organisation.
La chasse à l’homme
Dès le lendemain, le 15 mai, le ministre de l’Intérieur assure que des moyens « considérables » sont mobilisés pour retrouver les auteurs de l’attaque. Gérald Darmanin dénonce une « barbarie ». « On met des moyens considérables, nous avançons beaucoup », précise-t-il, évoquant des moyens « sans précédent » déployés.
« Plus de 450 policiers et gendarmes » sont mobilisés « rien que pour le département de l’Eure » dans les recherches. Il y a « énormément de traces judiciaires qui vont nous permettre de faire ce travail d’identification », martèle-t-il.
Dans la foulée, Interpol émet une notice rouge pour retrouver Mohamed Amra. L’organisation internationale de coopération policière lance un avis de recherche international pour localiser le fugitif.
Une semaine plus tard, les autorités assurent que les recherches avancent. « Les enquêteurs ont des pistes sérieuses » pour retrouver Mohamed Amra et ses complices, affirme la procureure de Paris, Laure Beccuau. Les auteurs des faits restent cependant introuvables pendant des mois.
La polémique
Rapidement, l’enquête révèle des failles dans le système judiciaire et pénitentiaire qui ont conduit, au moins en partie, à cette catastrophe. Ainsi, le convoi pénitentiaire, conduit uniquement de surveillants de prison, n’était pas accompagné d’une voiture de police, car Mohamed Amra n’était pas considéré comme un « détenu particulièrement signalé ». Cependant, sa dangerosité a été largement sous-évaluée.
Des écoutes téléphoniques en prison, dévoilées par la presse, révélaient un profil très inquiétant. Ces éléments auraient-ils permis de mieux assurer sa surveillance ? La question devient politique, et le garde des Sceaux diligente une enquête administrative sur ce point après une interpellation au parlement.
Un mois après l’évasion meurtrière de Mohamed Amra, le 13 juin, le gouvernement annonce accélérer sa réponse. « Nous allons signer un protocole qui renforce la sécurité des agents pénitentiaires », promet le garde des Sceaux.
Disparition pendant des mois
Mohamed Amra demeure introuvable à l’automne, au nez et à la barbe de l’ensemble des forces de l’ordre. Des recherches intensives se concentrent dans ses anciens quartiers, notamment à Rouen et Évreux. Toutefois, la surveillance accrue dans ces zones rend cette hypothèse de plus en plus improbable.
Est-il à l’étranger ? Mohamed Amra entretenait des contacts en Colombie, notamment dans des réseaux liés au trafic de drogue. Cette piste suggère qu’il pourrait avoir quitté le territoire français. La complexité de ces circuits internationaux rend sa localisation particulièrement difficile. En l’absence de preuves directes, l’enquête reste ouverte à toutes les hypothèses.
Le 22 février 2025, après une cavale de plusieurs mois, le commanditaire de l’attaque meurtrière est enfin sous les barreaux. Un début de justice pour les proches des victimes, qui continuent de vivre avec les séquelles laissées par cet épisode tragique.