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Près d’Arromanches, en Normandie, le château de Magny-en-Bessin, joyau du XVIIIe siècle, se dégrade rapidement sous le regard impuissant de sa propriétaire, qui refuse catégoriquement toute intervention de restauration. Malgré des aides financières conséquentes promises par la Fondation du patrimoine et les collectivités, le monument historique semble condamné à une lente agonie.
Un patrimoine en déclin face au refus de la propriétaire
Le château de Magny-en-Bessin a récemment perdu une de ses cheminées Ouest, écroulée entre fin 2024 et début 2025, accentuant le délabrement visible de la demeure. « Les planchers se sont effondrés en cinq endroits et l’escalier d’époque Louis XV s’est également écroulé en janvier 2020 », déplore Hervé Baptiste, président de l’association de sauvegarde du château.
Retraité de la fonction d’architecte en chef des monuments historiques, il observe avec consternation la dégradation du château, qui a pourtant été sélectionné à deux reprises par le loto du patrimoine. Mais la propriétaire, âgée de 80 ans, s’oppose farouchement à toute restauration. « Elle a coupé tout contact, refuse les travaux, est injoignable et ignore son courrier », témoigne Hervé Baptiste.
Une histoire marquée par l’inaction
En 1989, deux Néerlandais acquièrent ce château construit en 1718 par le second marquis de Magny. Le site, alors en reconversion depuis cinquante ans en usine de teillage de lin, a vu ses nouveaux propriétaires vivre dans une aile du château dans des conditions très modestes, sans eau ni électricité pendant plusieurs années. « Ils n’ont rien fait pour restaurer le château, rien n’a évolué et on trouve encore les ateliers de l’ancienne usine », explique le maire André Blet.
Un incendie survenu en 2016 a dévasté une partie du monument, qui n’est pas classé mais inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques. Deux ans plus tard, la Fondation du patrimoine attribue une subvention de 24 000 euros, suivie d’un soutien de l’État et du Département à hauteur de 60 000 euros. L’association de sauvegarde tente alors de réaliser des travaux provisoires, tels qu’un toit temporaire au-dessus de l’escalier, mais ceux-ci restent limités.
Des projets d’animation et des subventions promises
En 2019, le château est ouvert au public lors des Journées du patrimoine, une occasion rare qui attire de nombreux visiteurs. « La propriétaire avait même offert du cidre et il était question d’organiser des fêtes de voisinage et une chasse aux œufs », raconte le maire André Blet. Puis, en 2021, la situation semble s’éclaircir avec une nouvelle récompense du loto du patrimoine.
Les promesses de subventions atteignent un total de 750 000 euros avec les collectivités locales, afin d’assurer la mise hors d’eau et hors d’air du château, première étape indispensable pour garantir sa survie. Cependant, ces fonds ne sont pas débloqués car aucun travail n’est entrepris par la propriétaire qui, progressivement, se renferme davantage.
« Lors des Journées du patrimoine 2022, elle a envoyé de nombreuses lettres pour refuser les travaux, sans vraiment justifier son choix, si ce n’est son souhait de transformer le château en œuvre d’art », confie le président de l’association. Le maire analyse : « Elle craint de perdre le contrôle alors que l’association, forte de 250 membres, est profondément attachée à ce patrimoine. »
Un avenir incertain pour le château de Magny-en-Bessin
Malgré plusieurs propositions d’achat, notamment de la part de familles d’anciens propriétaires souhaitant restaurer le château, la propriétaire actuelle n’a donné aucune suite. « Dans dix à quinze ans, ce sera un tas de pierres », prévient André Blet. L’absence de classement officiel du château empêche toute obligation de travaux, tout comme un arrêté de péril puisque la bâtisse ne présente pas de danger immédiat pour le public.
Situé à proximité du bourg de Magny-en-Bessin, l’édifice témoigne aujourd’hui d’une majesté en ruine, tandis que sa propriétaire demeure difficilement joignable, aperçue parfois à vélo dans le village sans accepter d’échanger. Le maire espère au moins pouvoir accéder au parc pour réparer un pont public longeant la propriété, mais le futur du vieux château reste plus que jamais incertain.