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Harvard : rapport sur l’antisémitisme et l’islamophobie sur le campus
Des étudiants et membres du personnel de l’université Harvard ont été confrontés à des manifestations d’antisémitisme et d’islamophobie dans un climat profondément polarisé sur le campus de l’une des universités les plus prestigieuses des États-Unis, selon deux rapports distincts.
La publication de ces rapports mardi fait suite à la création, l’année dernière, de groupes de travail dédiés à la lutte contre les sentiments anti-juifs et anti-musulmans, dans un contexte de protestations sur le campus liées à la guerre d’Israël à Gaza.
Contexte et tensions sur le campus
Ces révélations interviennent alors que Harvard est engagée dans un conflit juridique avec le président américain Donald Trump, qui a gelé plus de 2 milliards de dollars de financement à l’université. Cette décision, selon Trump, répondrait à une recrudescence de l’antisémitisme sur le campus.
Dans un communiqué présentant les résultats, le président d’Harvard, Alan Garber, a indiqué que des membres des communautés juive, israélienne et sioniste rapportaient cacher “des signes évidents de leur identité pour éviter des confrontations”. De leur côté, les membres des communautés musulmane, arabe et palestinienne décrivent un sentiment d’être “jugés, mal représentés et réduits au silence”.
Il a ajouté : “Il est particulièrement inquiétant de constater que certains étudiants préfèrent se traiter avec mépris plutôt qu’avec empathie, se montrant prompts à critiquer et ostraciser, notamment grâce à l’anonymat et la distance que permettent les réseaux sociaux.”
“Certains étudiants ont été marginalisés par leurs pairs en raison de leur identité ou de leurs convictions, ce qui affaiblit notre sentiment commun d’appartenance à la communauté.”
Rapport sur l’antisémitisme et le biais anti-israélien
Le groupe de travail chargé de combattre l’antisémitisme et les préjugés anti-israéliens a indiqué dans son rapport que ces biais étaient “alimentés, pratiqués et tolérés” à Harvard et plus largement dans le milieu universitaire.
- 26 % des étudiants juifs ont déclaré se sentir en danger physiquement.
- 39 % ont affirmé ne pas se sentir chez eux à l’université.
- Près de 60 % ont subi “discrimination, stéréotypes ou préjugés négatifs” en raison de leurs opinions.
- Seulement 25 % pensent ne pas encourir de sanction académique ou professionnelle en exprimant leurs vues.
Le rapport cite également un étudiant arabe israélien anonyme, qui témoigne que les Israéliens “s’habituent à la discrimination sociale” dès leur premier jour sur le campus.
“Les gens refusent de vous parler, sans même faire semblant d’être aimables. Certains feignent la politesse avant de couper la conversation lorsqu’ils apprennent que je suis Israélien, puis ne me parlent plus,” rapporte l’étudiant.
Rapport sur l’islamophobie et le biais anti-arabe et anti-palestinien
Le groupe de travail dédié à la lutte contre les préjugés anti-musulmans, anti-arabes et anti-palestiniens a décrit un climat similaire d’hostilité sur le campus.
Il évoque un “sentiment profond de peur” parmi les étudiants et une atmosphère d’“incertitude, d’abandon, de menace et d’isolement”.
- Des étudiantes musulmanes portant le hijab et des étudiants pro-palestiniens arborant le keffieh témoignent de harcèlement verbal, d’être traités de “terroristes” voire d’être crachés dessus.
- Le doxxing, c’est-à-dire la divulgation en ligne d’informations personnelles, est particulièrement mis en lumière comme une menace pour la sécurité physique, le bien-être mental et les perspectives de carrière.
- Près de la moitié des étudiants et personnels musulmans interrogés se sentent physiquement en danger sur le campus.
- 92 % pensent qu’ils risquent des sanctions professionnelles ou académiques en exprimant leurs opinions politiques.
Un étudiant musulman anonyme confie : “Nous vivons dans une peur constante. Des camions circulent depuis des mois sur le campus avec les visages d’étudiants musulmans affichés. Des camarades ont perdu leur emploi simplement parce qu’ils dirigeaient des organisations musulmanes. Si des camions ou des avions avec des slogans antisémites circulaient, je suis convaincu que Harvard aurait réagi plus fermement.”
Recommandations et engagements de l’université
Les deux groupes de travail ont formulé plusieurs recommandations pour lutter contre les préjugés sur le campus :
- Élargir l’accès à des services juridiques spécialisés dans la lutte contre le doxxing.
- Prioriser l’admission d’étudiants favorables à une libre enquête et au débat ouvert.
Alan Garber a affirmé que l’université redoublerait ses efforts pour faire de Harvard un lieu où “les idées sont accueillies, examinées et débattues dans un esprit de recherche de la vérité” et où “le respect mutuel est la norme”.
“Lorsque les tensions sont fortes, il est essentiel de relever le défi de voir les autres tels qu’ils sont réellement : des individus uniques aux croyances et identités complexes. Il faut laisser de côté nos préjugés et se rencontrer avec bienveillance et attention,” a-t-il conclu.