Home Actualité Kawasaki : Résistance à l’IVIG chez les enfants en Chine

Kawasaki : Résistance à l’IVIG chez les enfants en Chine

by Sara
Kawasaki : Résistance à l'IVIG chez les enfants en Chine

La maladie de Kawasaki (MK) est une vascularite aiguë auto-limitée à médiation immunitaire, touchant principalement les enfants de moins de 5 ans, et affectant les artères de moyen calibre, en particulier les artères coronaires. Les anomalies coronariennes représentent des complications redoutées pouvant entraîner des problèmes cardiovasculaires sévères voire le décès. Même si la pathogenèse exacte de la MK reste inconnue, un traitement standardisé permet de modifier favorablement son évolution naturelle. Selon les recommandations de l’American Heart Association (AHA), le traitement de référence en phase aiguë associe des immunoglobulines intraveineuses (IVIG) à l’aspirine, ce qui améliore les symptômes, réduit l’inflammation et limite les lésions coronariennes. Toutefois, environ 10 à 20 % des patients présentent une résistance à l’IVIG, nécessitant des thérapies complémentaires qui augmentent le risque de transmission de maladies sanguines, alourdissent le coût du traitement, et accroissent le risque de complications coronariennes.

Résistance à l’IVIG et stratégies thérapeutiques

La résistance à l’IVIG est suspectée lorsque la fièvre persiste plus de 36 à 48 heures après l’administration ou réapparaît dans les deux semaines suivantes. Plusieurs études ont démontré que des stratégies d’intensification thérapeutique, telles que l’ajout de corticostéroïdes ou d’infliximab en première ligne, permettent de réduire la durée de la fièvre et la nécessité de traitements supplémentaires chez les patients à haut risque. Bien que le Japon ait développé plusieurs scores prédictifs de résistance à l’IVIG, leur applicabilité dans d’autres pays est limitée. Ces intensifications thérapeutiques sont toutefois associées à une augmentation des effets secondaires et des coûts. Par ailleurs, une inflammation systémique prolongée, traduite par une fièvre persistante, est liée à la gravité de la maladie et à la dysfonction endothéliale. L’administration d’IVIG, en interrompant cette cascade inflammatoire, peut améliorer la réponse thérapeutique, alors que tout retard dans le traitement risque de réduire son efficacité anti-inflammatoire. Dans ce contexte, il est essentiel d’explorer comment maximiser les bénéfices sans recourir systématiquement à l’intensification thérapeutique.

Objectifs de l’étude

Cette étude multicentrique vise à identifier les facteurs de risque indépendants de résistance à l’IVIG, à analyser la réponse au traitement selon différents moments d’administration et à déterminer si le choix du moment d’administration de l’IVIG influence cette résistance.

Méthodes

Design et participants

Il s’agit d’une étude rétrospective de cohorte menée dans six hôpitaux du sud-ouest de la Chine, incluant des patients hospitalisés pour MK entre 2015 et 2019. Les critères d’inclusion étaient : traitement par IVIG, âge inférieur à 18 ans, et diagnostic confirmé de MK selon les recommandations de l’AHA. Le diagnostic de MK classique requiert au moins quatre des signes cliniques principaux (changements muqueux, conjonctivite, éruption polymorphe, atteinte des extrémités, adénopathie). En cas de forme incomplète, le diagnostic reposait également sur des examens biologiques et échographiques spécifiques. Les patients avec des données cliniques incomplètes ou présentant d’autres maladies cardiovasculaires ont été exclus. Cette étude a été approuvée par le comité d’éthique des hôpitaux participants, avec consentement éclairé des tuteurs légaux.

Collecte des données

Les données démographiques et cliniques ont été recueillies via les dossiers médicaux électroniques : âge, sexe, moment d’administration de l’IVIG et résistance au traitement. Les variables biologiques prétraitement analysées comprenaient le nombre de globules blancs (WBC), plaquettes (PLT), hémoglobine (HB), rapport neutrophiles/lymphocytes (NLR), vitesse de sédimentation (VS), protéine C-réactive (CRP), albumine (ALB), alanine aminotransférase (ALT), aspartate aminotransférase (AST) et taux de sodium (Na). Le jour de début de la fièvre était défini comme le jour de référence.

Analyse statistique

Les variables catégorielles ont été comparées par test du Chi2, les variables continues par test t de Student ou test U de Mann-Whitney selon la distribution. Un modèle de régression logistique multiple a été utilisé pour identifier les facteurs indépendants de résistance à l’IVIG lorsque le temps d’administration était traité en variable continue. Le test de tendance Chi2 a été appliqué lorsque le temps d’administration était catégorisé. Le seuil de signification était fixé à p<0,05.

Résultats

Caractéristiques des patients

Au total, 6264 patients atteints de MK ont été inclus. La population comptait 3897 garçons, avec un âge moyen de 2,54 ans (écart-type 2,01). Parmi eux, 325 patients ont présenté une résistance à l’IVIG, soit un taux de 5,19 %.

Facteurs indépendants associés à la résistance à l’IVIG

Une analyse univariée a révélé des différences significatives entre les groupes répondeurs et résistants concernant le temps d’administration de l’IVIG, WBC, PLT, HB, NLR, CRP, ALB, ALT, AST et Na (p<0,05). En analyse multivariée, six facteurs indépendants ont été identifiés : temps d’administration de l’IVIG (odds ratio [OR] 0,894, IC 95 % 0,834–0,959), WBC (OR 1,025, IC 95 % 1,006–1,045), PLT (OR 0,998, IC 95 % 0,997–0,999), HB (OR 0,975, IC 95 % 0,966–0,984), ALT (OR 1,001, IC 95 % 1,001–1,002) et Na (OR 0,895, IC 95 % 0,865–0,926), tous significativement corrélés à la résistance à l’IVIG après ajustement.

Tableau comparant variables cliniques entre groupes répondeurs et résistants à IVIG
Tableau 1 : Comparaison des variables cliniques entre groupes de réponse et résistance à l’IVIG
Analyse de régression logistique multiple pour prédiction de résistance IVIG
Tableau 2 : Analyse de régression logistique multiple pour prédire la résistance à l’IVIG

Impact du moment d’administration de l’IVIG sur la résistance

La distribution du moment d’administration était la suivante : 9 patients le 2e jour, 84 le 3e jour, 312 le 4e jour, 1432 le 5e jour, 1619 le 6e jour, 1061 le 7e jour, 653 le 8e jour, 359 le 9e jour, 263 le 10e jour et 472 après le 10e jour.

Le taux de résistance à l’IVIG était de 44,4 % au 2e jour de fièvre initiale, avec le taux le plus bas à 2,5 % aux 7e et 8e jours. Avant le 7e jour, plus le traitement était précoce, plus la résistance était élevée. Après le 8e jour, la résistance augmentait significativement avec le retard du traitement.

Association entre le temps de traitement IVIG et résistance
Tableau 3 : Association entre le moment du traitement et la résistance à l’IVIG
Dynamique temporelle de résistance et réponse à IVIG
Figure 1 : Dynamique temporelle de la résistance et réponse à l’IVIG

Discussion

La maladie de Kawasaki demeure une cause majeure de maladies cardiaques acquises chez l’enfant, avec un impact important sur les artères coronaires. Le traitement standard repose sur l’IVIG et l’aspirine, mais la résistance à l’IVIG concerne jusqu’à 20 % des cas, nécessitant des traitements additionnels. Cette étude régionale chinoise a permis d’identifier six facteurs indépendants associés à cette résistance, en particulier la variable temps d’administration de l’IVIG, qui constitue un facteur modifiable influençant directement les résultats.

Contrairement aux paramètres biologiques (WBC, PLT, HB, ALT, Na) qui reflètent la sévérité de la maladie et ne sont pas modifiables, le moment d’administration de l’IVIG peut être ajusté par la pratique clinique. L’analyse montre que l’administration trop précoce (avant le 5e jour) ou trop tardive (après le 8e jour) s’accompagne d’une augmentation de la résistance, formant une courbe en entonnoir.

Pour la première fois, cette étude suggère l’existence d’une fenêtre thérapeutique optimale autour des 7e et 8e jours de fièvre initiale pour minimiser la résistance. Cette observation s’appuie sur une large cohorte, offrant une robustesse face à la variabilité des plus petites séries antérieures. Elle pourrait être liée à la dynamique inflammatoire de la MK, dont le pic se situe autour du 10e jour, période pendant laquelle l’IVIG agit de façon dose-dépendante pour inhiber l’inflammation.

Il est néanmoins essentiel de souligner que ces résultats sont uniquement observationnels et ne doivent pas être interprétés comme une incitation à retarder le traitement, qui reste primordial pour prévenir les complications cardiovasculaires selon les lignes directrices en vigueur.

Cette étude présente certaines limites, notamment son caractère rétrospectif et le biais de sélection, ainsi que la concentration géographique sur le sud-ouest de la Chine, ce qui nécessite des validations complémentaires sur d’autres populations et à plus grande échelle.

source:https://www.dovepress.com/ivig-resistance-in-kawasaki-disease-clinical-and-laboratory-risk-facto-peer-reviewed-fulltext-article-JIR

You may also like

Leave a Comment

Droits d’auteur © 2024 – onemedia.fr – Tous droits réservés