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Expérience révolutionnaire : Voler de l’énergie à un trou noir en labo

by Sara
Expérience révolutionnaire : Voler de l’énergie à un trou noir en labo
France, États-Unis

Pendant des décennies, l’idée de voler de l’énergie à un trou noir en rotation relevait de la pure théorie. Aujourd’hui, une équipe de chercheurs a réussi à reproduire ce phénomène en laboratoire, dans une version analogique. Cette avancée spectaculaire confirme une prédiction vieille de plus de cinquante ans et ouvre des perspectives prometteuses en physique fondamentale, astrophysique et ingénierie.

Extraire de l’énergie d’un monstre cosmique ?

Tout commence en 1969 avec Roger Penrose, futur lauréat du prix Nobel, qui propose un mécanisme théorique nommé « processus de Penrose ». Selon ce concept, un objet placé dans l’ergosphère — la région située juste à l’extérieur de l’horizon d’un trou noir en rotation — pourrait être divisé en deux parties : l’une tomberait dans le trou noir avec une énergie négative, tandis que l’autre ressortirait avec plus d’énergie qu’au départ. Le trou noir perdrait ainsi une infime partie de sa masse-énergie, comme si on lui dérobait un fragment de sa rotation.

Cette idée, fascinante, suggérait la possibilité d’exploiter ces monstres cosmiques comme sources d’énergie, même si cela restait pour l’heure un rêve lointain.

Zel’dovich et l’ombre d’un trou noir sur Terre

Quelques années plus tard, le physicien Yakov Zel’dovich propose une version plus accessible du phénomène. Il explique que lorsqu’une onde — sonore ou électromagnétique — dotée d’un moment angulaire rencontre un objet tournant rapidement, elle peut ressortir amplifiée, ayant capté une part de la rotation. Ce phénomène, appelé superradiance, pourrait être observé en laboratoire sans recourir à un véritable trou noir.

Jusqu’à récemment, cette théorie restait confinée aux travaux théoriques, car trop difficile à tester expérimentalement. Mais cela vient de changer.

L’expérience qui change la donne

Des physiciens ont réussi à reproduire ce phénomène dans un laboratoire, utilisant un cylindre d’aluminium mis en rotation mécanique. Sur ce cylindre, ils ont dirigé des ondes électromagnétiques torsadées, c’est-à-dire des ondes qui transportent un moment angulaire, à la manière d’un tire-bouchon lumineux.

Deux conditions essentielles ont été soigneusement ajustées :

  • Une vitesse de rotation suffisamment rapide pour que la fréquence des ondes, vue depuis le cylindre, devienne négative, ce qui correspond à un décalage Doppler rotationnel.
  • Un résonateur fixé au cylindre, capable de piéger et d’amplifier les ondes si elles gagnent en énergie.

Le résultat est clair : dans certaines conditions, les ondes sortent plus énergétiques qu’à leur entrée, ayant ainsi volé une part de la rotation du cylindre. C’est la première démonstration expérimentale de l’effet Zel’dovich avec des ondes électromagnétiques.

Une bombe à trou noir, version de table

Encouragée par ce succès, l’équipe a expérimenté un analogue de la « bombe à trou noir », un concept imaginé dans les années 1970 par William Press et Saul Teukolsky. Ici, l’onde amplifiée est renvoyée plusieurs fois vers l’objet en rotation pour être amplifiée à nouveau, créant une instabilité exponentielle et un déchaînement d’ondes issues du bruit ambiant.

Bien sûr, ce dispositif ne génère pas de trous noirs, mais il illustre de manière spectaculaire comment un système en rotation peut perdre de l’énergie pour renforcer une onde à chaque passage.

Illustration d'un trou noir
Illustration d’un (vrai) trou noir © buradaki/istock

Une démonstration, et des promesses

Cette expérience est majeure pour plusieurs raisons. Elle confirme expérimentalement une prédiction vieille d’un demi-siècle et montre qu’il est possible d’étudier en laboratoire des phénomènes analogues à ceux des trous noirs. Ce coup de projecteur sur la superradiance pourrait révéler un rôle plus important qu’imaginé dans l’univers réel.

Si l’effet Zel’dovich agit dans l’espace, il pourrait amplifier certaines ondes — gravitationnelles ou électromagnétiques — près des trous noirs. Cela modifierait notre compréhension des dynamiques énergétiques de ces objets extrêmes et offrirait aux astrophysiciens de nouvelles méthodes d’observation indirecte.

Des applications (très) terrestres

Au-delà des implications cosmiques, ce phénomène ouvre la voie à des applications concrètes :

  • Génération ultra-efficace d’ondes électromagnétiques ou acoustiques,
  • Systèmes de récupération d’énergie mécanique,
  • Radars et communications ultra-sensibles capables de détecter des signaux très faibles grâce à l’amplification liée à la rotation.

L’idée de « recycler » une énergie autrement perdue dans une rotation pourrait ainsi avoir un impact industriel, bien que ces applications soient encore spéculatives.

Une porte entrouverte vers une physique plus profonde

Pour la suite, les chercheurs souhaitent affiner leurs modèles afin de mieux simuler ces effets dans un contexte cosmique. Ils envisagent également d’explorer de nouvelles configurations expérimentales, avec différents matériaux, formes ou régimes d’ondes. L’objectif est de comprendre en détail ce transfert d’énergie pour, éventuellement, en tirer parti pleinement.

L’effet Zel’dovich n’est plus une simple curiosité théorique : c’est désormais un phénomène réel, mesurable et potentiellement exploitable qui ouvre la voie à des découvertes inédites en physique.

source:https://www.science-et-vie.com/ciel-et-espace/ils-ont-vole-de-lenergie-a-un-trou-noir-en-labo-voici-pourquoi-cette-experience-est-revolutionnaire-198170.html

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