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Le formaldéhyde est un polluant fréquent de l’air intérieur, notamment utilisé pour conserver mobilier et vêtements lors de longs transports maritimes depuis leur lieu de fabrication. Ce composé, très nocif pour la santé, est difficile à filtrer efficacement avec les systèmes classiques. Des matériaux innovants, dotés de pores à l’échelle moléculaire, apparaissent désormais comme des éponges capables de capturer ce polluant avec une grande efficacité.
Un enjeu majeur pour la santé publique
La qualité de l’air intérieur, souvent invisible, est pourtant essentielle pour la santé. Le formaldéhyde, un composé organique volatil, est présent dans de nombreux objets du quotidien : peintures, meubles, colles ou produits ménagers. Même en très faibles concentrations — quelques dizaines de parties par milliard — ses effets sur la santé sont préoccupants, notamment en raison des risques accrus de cancers et d’irritations des voies respiratoires.
Pourtant, les solutions actuelles pour limiter son impact restent limitées. Les filtres à charbon actif traditionnels perdent rapidement en efficacité, particulièrement lorsque la température et l’humidité changent, et peuvent à terme devenir eux-mêmes une source de formaldéhyde. Les filtres à base de zéolithes, bien que prometteurs, sont sensibles à l’humidité et nécessitent une régénération énergivore. Quant à la minéralisation du formaldéhyde à température ambiante, elle exige des catalyseurs coûteux à base de métaux nobles.
Réduire ce polluant à la source serait idéal, mais il est profondément intégré dans la majorité des matériaux de construction, mobiliers et textiles, car il sert de conservateur pour éviter les moisissures lors du transport par bateau. En attendant une évolution du modèle économique, la recherche de nouvelles solutions de purification de l’air intérieur est indispensable.
Des matériaux poreux à l’échelle moléculaire : les MOF
Pour améliorer la capture du formaldéhyde, les chercheurs se sont orientés vers des matériaux appelés MOF (_Metal-Organic Frameworks_). Ces structures cristallines poreuses, découvertes il y a plus de vingt-cinq ans, peuvent être assemblées de façon modulable grâce à des briques inorganiques (métaux) et organiques (ligands). Cette architecture permet de créer un réseau de pores nanométriques, capables de retenir efficacement divers polluants, bien plus que les filtres classiques.
Une famille spécifique de MOF a été développée avec des groupements chimiques pyrazoles insérés dans les pores, renforçant la liaison avec les molécules de formaldéhyde. Ce matériau agit alors comme une véritable éponge moléculaire, capturant sélectivement les traces infimes de formaldéhyde, même en présence d’humidité, typique des environnements domestiques.
Ce MOF présente une capacité d’adsorption d’environ 20 % en masse, soit deux à trois fois supérieure aux filtres commerciaux, tout en conservant son efficacité avec des variations de température et d’humidité. Sa synthèse est réalisée dans l’eau à température et pression ambiantes, facilitant une production à grande échelle. Les premiers essais démontrent la fabrication aisée de dizaines de kilogrammes, avec un potentiel industriel atteignant 1 à 100 tonnes.
Une solution durable et régénérable
Un défi majeur des filtres actuels est la saturation rapide des pores, nécessitant leur remplacement fréquent et leur incinération. En revanche, le MOF innovant peut être régénéré simplement en le plongeant dans de l’eau à température ambiante pendant quelques heures, éliminant le formaldéhyde piégé sans pollution supplémentaire.
De plus, ce matériau ne libère pas de formaldéhyde en dessous de 75 °C, contrairement à d’autres filtres qui peuvent provoquer des rejets polluants à des températures plus basses, générant un pic de pollution. Cette caractéristique est particulièrement utile dans des contextes où la température varie fortement, comme dans une voiture exposée au soleil.
Enfin, ce MOF est très sélectif : sa capacité à capturer le formaldéhyde n’est que peu affectée par la présence d’autres polluants domestiques, assurant une purification ciblée et efficace.
Perspectives et applications futures
Des tests sont actuellement menés avec des industriels et experts de la qualité de l’air afin d’intégrer ces MOF dans des dispositifs de purification d’air, actifs ou passifs. La production à grande échelle permettra aussi une réduction significative des coûts de fabrication.
À plus long terme, combiner la capture du formaldéhyde avec un procédé de régénération catalytique pourrait prolonger la durée d’utilisation de ces matériaux. Par ailleurs, d’autres applications potentielles sont envisagées, notamment la capture d’acides pour la protection d’œuvres d’art ou la détection de composés organiques volatils.