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Contexte des tensions entre l’Iran, les États-Unis et Israël
Depuis le 12 avril, l’Iran est engagé dans des négociations avec les États-Unis, mais la perspective d’un accord reste incertaine. L’administration Trump maintient des exigences élevées, notamment la démantèlement complet du programme nucléaire iranien, qu’il soit civil ou militaire, ainsi que la réduction des capacités balistiques. Ces demandes sont perçues par Téhéran comme incompatibles avec ses impératifs de sécurité.
Face à cette impasse, l’Iran accélère le développement de ses capacités militaires, anticipant un éventuel échec des pourparlers. La menace d’une action militaire américaine directe contre ses installations nucléaires plane, exacerbée par un climat de tensions multiples dans la région.
Accusations et menaces réciproques
Avant le début des négociations, Donald Trump avait accusé l’Iran de fournir des armes aux Houthis, avertissant d’« conséquences graves ». Cette déclaration précédait le tir d’un missile yéménite sur l’aéroport Ben Gourion à Tel Aviv, un événement susceptible d’intensifier les tensions.
Par ailleurs, une diffusion sur Fox Business a révélé une mise en garde américaine adressée au guide suprême iranien Ali Khamenei : un ultimatum de deux mois pour parvenir à un accord sur le nucléaire, sous peine d’une attaque contre les sites nucléaires et militaires iraniens.
Renforcement militaire et manœuvres iraniennes
Récemment, l’armée iranienne et les Gardiens de la Révolution ont multiplié les exercices militaires, incluant des tests d’armes offensives et défensives. Parmi ceux-ci :
- La manœuvre « Eghtedar » simulant la défense des installations nucléaires de Fordo et Arak.
- Des exercices surprises autour du site nucléaire de Natanz dans la province d’Ispahan.
- La manœuvre maritime « Cinturón de Seguridad Marítima 2025 » en collaboration avec la Russie et la Chine dans l’océan Indien.
Ces opérations visent à améliorer les capacités, notamment en matière de défense aérienne et de flotte de chasseurs.
Les Gardiens de la Révolution ont également dévoilé trois bases militaires souterraines principales, équipées de dizaines de missiles balistiques, certains montés sur des plateformes mobiles pour un déploiement rapide.
La puissance balistique iranienne
L’Iran possède un arsenal balistique considérable, incluant des missiles à courte, moyenne et longue portée. Ce stock diversifié est l’un des plus importants et sophistiqués de la région. Il comprend également le système de défense antiaérienne russe S-300 et la version locale améliorée du système « Bavar-373 ».
Cependant, malgré cette puissance balistique, l’aviation iranienne reste le maillon faible de ses forces armées, notamment en raison des restrictions internationales qui freinent la modernisation de ses équipements depuis les années 1980.
Historique et déclin de l’aviation iranienne
La force aérienne iranienne s’est constituée en trois phases majeures :
- Les débuts dans les années 1920 : Sous le règne du Shah Reza Pahlavi, l’Iran a acquis ses premiers chasseurs, initialement refusés par les États-Unis, puis fournis par des pays européens comme l’Allemagne, la Russie et la France.
- Après la Seconde Guerre mondiale : Réouverture des écoles de pilotage et acquisition d’avions américains, avec un fort soutien des États-Unis pour construire une force militaire stratégique.
- Après la révolution islamique de 1979 : Héritage des forces aériennes précédentes, mais avec des relations tendues avec l’Occident, empêchant la maintenance et la modernisation des équipements. De nombreux officiers ont été exclus, provoquant un affaiblissement structurel.
Défis actuels et capacités de la force aérienne
Selon Douglas Barrie, expert en stratégie militaire, la force aérienne iranienne a connu son apogée avant la guerre Iran-Irak, mais elle peine aujourd’hui à remplir ses missions en raison de l’obsolescence de ses appareils et des difficultés d’entretien liées aux sanctions internationales.
L’International Institute for Strategic Studies souligne que la majorité des avions iraniens datent des années 1960-1970, avec des modèles américains et russes anciens. Malgré cela, l’Iran a réussi à maintenir une force opérationnelle, ce qui constitue un exploit compte tenu des restrictions.
La flotte se compose de 15 escadrons, comprenant :
- Des Sukhoi Su-24
- Un escadron mixte de F-4 Phantom et F-5
- Deux escadrons de MiG-29 russes
- Deux escadrons de F-14 Tomcat américains
- La version chinoise du MiG-21, le F-7M Gard
Le MiG-29 est le plus récent, mais reste dépassé par rapport aux versions les plus récentes. Le Su-24, principal avion d’attaque au sol, date des années 1960. Le stock d’armes air-air est également ancien, notamment les missiles AIM-54 Phoenix achetés il y a environ 40 ans, dont beaucoup ont dépassé leur durée de vie.
Stratégie de défense et doctrine militaire
En raison de ces limites, l’Iran a adopté une doctrine basée sur la « dissuasion avancée », visant à étendre son influence hors de ses frontières via des alliés et des groupes supplétifs. Cette stratégie a été fragilisée récemment par les revers du Hezbollah, la chute du régime syrien et la pression sur ses alliés en Irak et au Yémen.
La force aérienne iranienne est principalement dédiée à la défense, avec un rôle offensif limité contre des cibles terrestres ou maritimes, tout en assurant le transport aérien tactique. Toutefois, les développements régionaux imposent une modernisation urgente.
Options et modernisation en cours
Face à l’escalade des tensions avec Israël et ses alliés occidentaux, l’Iran se tourne vers Moscou et Pékin pour renouveler sa flotte aérienne. Selon des sources iraniennes, un contrat a été signé en novembre 2023 avec la Russie pour l’achat d’hélicoptères d’attaque Mil Mi-28 et de chasseurs Sukhoi Su-35 de cinquième génération.
En septembre 2023, l’Iran a reçu des Yak-130 russes, des avions d’attaque légère et de formation avancée, équipés de systèmes électroniques modernes et capables d’emporter diverses armes, notamment des missiles air-air R-73. Ces appareils ont été déployés lors des manœuvres « Zolfaghar » début 2025.
Les livraisons de Su-35 sont retardées par le conflit en Ukraine. Leur intégration nécessitera temps et ressources pour la formation et l’adaptation aux systèmes iraniens.
Une fois opérationnels, les Su-35 pourraient constituer une menace sérieuse pour des avions furtifs comme le F-35, notamment s’ils sont armés de missiles air-air à longue portée R-77-1.
Perspectives et choix stratégiques
Certains experts estiment que l’Iran priorisera le remplacement des plateformes vieillissantes F-14 et F-4, tandis que les MiG-29 et Su-24 pourraient être modernisés pour prolonger leur durée de vie et améliorer leurs performances.
Les F-14 pourraient rester un atout défensif majeur s’ils opèrent en synergie avec les radars terrestres et les systèmes de défense antiaérienne.
Outre la Russie, la Chine pourrait fournir des avions multirôles comme le J-10 ou le JF-17 Thunder, ce dernier offrant un bon compromis entre coût et capacités. Acquérir des avions de deux fournisseurs renforcerait la résilience iranienne face à d’éventuelles ruptures d’approvisionnement.
Solutions alternatives et développement local
La modernisation complète de la force aérienne iranienne reste un défi à court terme. Le pays mise aussi sur le développement de technologies militaires locales, notamment dans le domaine des drones.
L’Iran dispose déjà de plusieurs types de drones, dont les Ababil 4 et 5, capables de missions de reconnaissance, de patrouille et de combat, ainsi que de drones kamikazes comme l’Arash.
En février 2025, l’Iran a mis en service son premier porte-drone local, le « Shaheed Bahman Bagheri », capable de déployer et récupérer plusieurs drones, renforçant ainsi les capacités de surveillance et d’attaque maritime.
Cette innovation place l’Iran en deuxième position au Moyen-Orient, après la Turquie, à développer un porte-avions de drones.
Défis et enjeux futurs
Les récents événements ont imposé à l’Iran des défis plus importants que prévu. Historiquement, Téhéran a compensé la faiblesse de son aviation par le soutien de ses alliés sur les lignes de front. Cependant, cette stratégie pourrait ne pas suffire face à un conflit direct sur son territoire.
Le pays s’efforce donc de rattraper son retard en matière aérienne pour être prêt à toute éventualité, dans un climat de tensions croissantes avec les États-Unis, Israël et leurs alliés.