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En France, une nouvelle avancée majeure dans le traitement du cancer se profile grâce à la thérapie par CAR-T cells, une immunothérapie révolutionnaire qui offre des résultats impressionnants face aux cancers du sang. Ce traitement innovant suscite un espoir sans précédent, notamment pour les patients en situation critique ou en échec de traitements classiques.
Le Dr Olivier Hequet supervise l’administration du traitement par CAR-T cells sur un patient venu de Chambéry (Savoie). © Ma Santé
Un témoignage prometteur : guérison d’un jeune patient atteint d’un lymphome avancé
Simon, un Ardéchois de 23 ans diagnostiqué en mai 2024 avec un lymphome de stade 4 et en échec de chimiothérapie, a bénéficié de la thérapie CAR-T cells en janvier dernier à l’hôpital Lyon Sud. « Un mois après, un premier scanner a montré que la tumeur avait totalement disparu », raconte-t-il. « C’était presque miraculeux, j’avais du mal à le croire ! Un nouveau scanner début avril a confirmé l’absence totale de tumeur. Aujourd’hui, je suis en rémission complète, même si le suivi continue, c’est un énorme soulagement. »
La thérapie CAR-T cells : une solution pour les cas les plus graves
Depuis 2017, environ 5 000 patients de tous âges en France ont bénéficié de ce traitement novateur, principalement destiné aux cancers hématologiques. Selon le registre national DESCAR-T, au 20 janvier 2025, les cas traités se répartissent comme suit :
- 3 691 patients atteints de lymphomes
- 885 patients atteints de myélomes
- 347 patients atteints de leucémies aiguës
Le Dr Pierre Sesques, hématologue à l’hôpital Lyon Sud, explique : « En moyenne, 30 % des patients atteints de lymphomes ne répondent pas à la chimiothérapie et rechutent. Grâce à la thérapie CAR-T cells, en deuxième ligne, le taux de réussite a doublé, passant de 40 à 83 % ! » À l’origine réservé aux patients en échec thérapeutique, ce traitement s’étend désormais à un nombre croissant de patients, grâce à l’expertise grandissante des équipes médicales françaises.
Les Hospices Civils de Lyon, pionniers de la thérapie cellulaire
Les Hospices Civils de Lyon (HCL) ont été parmi les premiers en France à expérimenter la thérapie CAR-T dès 2017. Aujourd’hui, l’hôpital Lyon Sud s’impose comme un centre européen majeur dans ce domaine, aux côtés du CHU de Paris. Sur les 40 centres agréés en France, l’établissement lyonnais demeure l’un des plus avancés, accueillant des patients venus de nombreux hôpitaux périphériques.
Le Pr Hervé Ghesquières, chef du service d’hématologie clinique, souligne : « En 2018, nous étions l’un des rares à proposer ce traitement. Nous pensions que l’ouverture d’autres centres réduirait notre activité, mais c’est le contraire qui s’est produit. »
« Il nous a fallu quatre ans pour atteindre 200 patients adultes traités. Depuis, 300 autres ont été inclus ces trois dernières années. Aujourd’hui, nous traitons près de 100 patients chaque année. L’élargissement des indications et la reconnaissance de notre expertise expliquent cette croissance. »
La maîtrise technique est aujourd’hui solide, avec un parcours patient optimisé, des aménagements spécifiques pour la conservation des cellules CAR-T et une réduction du délai de traitement.
Gestion améliorée des effets secondaires
Les équipes médicales ont perfectionné la prise en charge des effets secondaires liés à cette thérapie. Neuf patients sur dix présentent des poussées de fièvre dues au syndrome de relargage cytokinique (CRS), une réaction inflammatoire provoquée par l’interaction entre les CAR-T cells et la tumeur. Toutefois, le nombre de cas graves à risque de décès a nettement diminué.
Les troubles neurologiques, observés chez 40 à 50 % des patients, disparaissent généralement sans séquelles majeures. Le Dr Sesques explique : « Le bénéfice du traitement compense largement ces risques. Bien que nous cherchions à minimiser ces effets, ils restent réversibles. Une consultation longue et approfondie permet d’informer parfaitement les patients. »
Une révolution encore en développement dans la lutte contre le cancer
Les succès obtenus avec les CAR-T cells dans les cancers hématologiques ouvrent la voie à des essais dans d’autres pathologies, dont certains cancers solides (sein, prostate) et des maladies auto-immunes comme la sclérose en plaques ou encore des troubles neurologiques.
Le Dr Pierre Sesques précise : « Nous avons débuté par l’hématologie, secteur où cette thérapie est la plus efficace, mais le champ d’application est immense. Des essais très prometteurs sont en cours. »
Le Pr Emmanuel Bachy, directeur de la recherche CAR-T aux HCL, ajoute : « À moyen terme, nous envisageons des traitements plus précoces, sans attendre plusieurs lignes de soin, avec des CAR-T cells encore plus performantes. Nous espérons aussi raccourcir les processus thérapeutiques tout en limitant les effets indésirables. »
Quant à remplacer la chimiothérapie, le Dr Sesques estime que cela pourrait être possible : « Actuellement, les protocoles concernent les cas les plus graves, mais nous progressons vers des traitements en deuxième, puis en première ligne. Les résultats sont encourageants, notamment chez les enfants atteints de leucémies. »
Le Pr Bachy conclut : « Nous ne faisons que commencer la révolution des CAR-T cells ! »
Comprendre la thérapie CAR-T cells
- Principe : Cette immunothérapie génétique modifie les lymphocytes T du patient afin de les transformer en super-lymphocytes capables de reconnaître et d’éliminer plus efficacement les cellules cancéreuses.
- Processus : Les lymphocytes sont prélevés par leucaphérèse, envoyés en laboratoire (notamment aux Pays-Bas ou aux États-Unis) pour être modifiés, puis réinjectés au patient trois à quatre semaines plus tard.
- Innovation récente : Les équipes des Hospices Civils de Lyon testent également les Allo-CAR-T cells, des lymphocytes T provenant non plus du patient, mais de donneurs sains.