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Tensions dans le Golfe de sonké : enjeux sécuritaires et géopolitiques

by Sara
Tensions dans le Golfe de sonké : enjeux sécuritaires et géopolitiques
Cameroun, Nigeria

Un point sensible du Corne de l’Afrique : le port d’Assab au cœur des rivalités régionales

Dans l’une des zones les plus sensibles du Corne de l’Afrique, où les intérêts géopolitiques s’entremêlent, le port d’Assab en Érythrée émerge comme un nouveau théâtre d’un conflit régional potentiellement explosif.

Situé dans la ville d’Assab sur la côte de la mer Rouge, ce port a longtemps servi l’Éthiopie pour ses exportations et importations. Toutefois, Addis-Abeba en a perdu le contrôle après l’indépendance complète d’Asmara en 1993.

Entre l’ambition éthiopienne d’obtenir un accès souverain à la mer et la méfiance érythréenne face aux intentions cachées de son voisin, les tensions refont surface. Cette fois, elles ne se traduisent pas par des affrontements armés, mais par des mouvements stratégiques, des revendications souveraines et des enjeux portuaires.

Alors qu’Addis-Abeba intensifie son discours sur son « droit naturel » d’accès à la mer, cherchant à transformer ce besoin géographique en principe stratégique permanent, Asmara perçoit ces démarches comme une menace directe à sa souveraineté et une possible violation de l’équilibre établi par l’accord de paix de 2018.

Ce tournant majeur dans la politique éthiopienne, en particulier concernant la nécessité d’avoir des débouchés maritimes, ouvre la voie à une nouvelle vague de polarisation régionale, renforcée par la compétition internationale en mer Rouge et le changement des rapports de force dans la Corne de l’Afrique.

Ce contexte soulève la question cruciale : le port d’Assab pourrait-il passer d’une occasion d’intégration régionale à l’étincelle d’une confrontation prochaine ?

Accusations et guerre des mots

Depuis l’indépendance de l’Érythrée en 1993, l’Éthiopie, l’un des pays les plus peuplés d’Afrique sans accès maritime, multiplie les efforts pour s’assurer une position stratégique sur la mer Rouge.

Face à la montée des tensions liées à la souveraineté maritime, le parti du Mouvement national amhara, partie prenante au gouvernement éthiopien, a inscrit la négociation d’un accès à la mer parmi les priorités nationales.

Dans un communiqué de son comité exécutif, le parti a affirmé que le processus d’indépendance de l’Érythrée en 1993 manquait d’une réelle participation populaire.

Il a également accusé l’Érythrée de s’allier avec des forces cherchant à déstabiliser la sécurité régionale, qualifiant le pays d’« agent » des ennemis historiques de l’Éthiopie.

De son côté, l’Érythrée considère ces déclarations politiques comme la promotion d’une agenda expansionniste, toujours sous-tendue par des menaces militaires.

Le ministre érythréen de l’Information, Yemane Gebremeskel, a dénoncé sur la plateforme X (ex-Twitter) le communiqué du parti amhara comme une distorsion historique et juridique visant à justifier la convoitise de territoires souverains voisins.

Les inquiétudes érythréennes

Lorsque le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a déclaré devant le parlement que « l’accès à un port maritime n’est pas un luxe, mais une nécessité vitale », le débat politique à Asmara s’est intensifié.

Des allusions officielles et populaires évoquent une possible « revendication historique » sur le port d’Assab.

Asmara regarde avec suspicion les récentes initiatives éthiopiennes, qu’elle interprète comme une tentative de restaurer son influence historique sur l’Érythrée sous couvert d’intérêts économiques.

Les inquiétudes érythréennes grandissent également face aux indices laissant penser que l’Éthiopie pourrait être instrumentalisée par des acteurs régionaux ou internationaux pour étendre leur influence en mer Rouge.

Ce contexte pousse Asmara à adopter des positions plus fermes, refusant tout débat public sur l’avenir de ses ports, selon des observateurs locaux.

Le débat sur la propriété du port

De nombreux responsables politiques éthiopiens considèrent la ville d’Assab comme un territoire éthiopien. Ils dénoncent une obstruction de la part de l’Érythrée quant à un accord secret empêchant l’Éthiopie d’obtenir un accès maritime suite au référendum d’indépendance de 1993.

Selon l’ambassadeur éthiopien retraité Tarona Zena, plusieurs options diplomatiques et militaires restent ouvertes concernant le port d’Assab.

Dans un entretien avec Al Jazeera, Tarona a déclaré : « Bien que l’Éthiopie conserve, d’un point de vue historique et légal, le droit d’accès au port d’Assab sur la mer Rouge, la réalité politique après l’indépendance de l’Érythrée en 1993 a mis ce droit en suspens. »

Malgré le fait que le gouvernement éthiopien n’ait pas exploité ce privilège de manière stratégique, les pressions économiques et géopolitiques actuelles rouvrent le dossier de l’accès maritime.

Tarona ajoute : « L’Éthiopie est contrainte d’examiner toutes les alternatives disponibles pour récupérer un accès maritime vital via Assab. »

Le politologue Shifa Omar Al-Afri estime que l’exploitation du port d’Assab au service des intérêts régionaux pourrait être bénéfique, à condition que cela se fasse dans le respect total de la souveraineté érythréenne, sans pressions ni menaces.

Perspectives d’avenir et défis régionaux

Adam Haj Moussa, secrétaire général du Front national pour le changement, principal parti d’opposition en Érythrée, affirme que « la volonté et les intérêts du peuple érythréen ne s’opposent pas aux besoins des Éthiopiens, compte tenu de la proximité et de l’interdépendance. »

Il souligne que les relations entre les deux peuples devraient être complémentaires, fondées sur le dialogue diplomatique, la coopération et la signature d’accords bilatéraux libres et volontaires.

Moussa estime que les deux parties pourraient organiser leurs intérêts communs avec l’appui d’un tiers capable et expérimenté pour développer des projets bilatéraux. En l’absence de volonté érythréenne, parvenir à un dialogue diplomatique et une coopération reste très difficile, voire impossible.

L’impasse autour du port d’Assab constitue un test majeur pour la capacité des pays du Corne de l’Afrique à éviter les conflits traditionnels et à bâtir des partenariats basés sur le respect mutuel.

Entre les aspirations légitimes de l’Éthiopie et les préoccupations compréhensibles de l’Érythrée, les observateurs conviennent que le dialogue sincère et l’intégration économique demeurent les meilleures options.

Cependant, dans un climat de méfiance et d’intensification des discours nationalistes, le risque d’une nouvelle confrontation reste bien réel.

Carte de la région et position géographique d’Assab

Carte de l'Érythrée et du port d'Assab

source:https://www.aljazeera.net/news/2025/5/14/%d8%b7%d9%85%d9%88%d8%ad%d8%a7%d8%aa-%d8%a5%d8%ab%d9%8a%d9%88%d8%a8%d9%8a%d8%a9-%d9%88%d9%87%d9%88%d8%a7%d8%ac%d8%b3-%d8%a5%d8%b1%d9%8a%d8%aa%d8%b1%d9%8a%d8%a9-%d9%87%d9%84

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