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Notre sélection de romans vous emmène en Polynésie, dans la tête d’un patron de la tech, dans le Marseille de la French Connection ou encore le Pérou des Sandinistes. Cette année, des livres vous offrent une évasion littéraire pour passer l’été en toute tranquillité. Bonne lecture !
1/ « Un jeu sans fin », par Richard Powers
C’est un magnifique roman écologique que propose, comme à son habitude, le grand écrivain américain Richard Powers. Après la découverte de la forêt avec L’Arbre monde (Cherche midi, 2018), Un jeu sans fin nous plonge dans les fonds sous-marins. Et pour nous y emmener, l’auteur utilise plusieurs fils narratifs, dont un qui nous immerge dans les pensées intimes d’un milliardaire de la tech.
Trois intrigues principales structurent le livre. D’un côté, l’auteur dépeint le projet de capital-risqueurs libertariens qui veulent créer une ville flottante autour de l’île de Makatea en Polynésie française afin d’échapper aux tentatives de régulation des États. L’atoll a été dévasté par des décennies d’exploitation des mines de phosphate et ses 82 habitants hésitent à accepter la proposition des Américains. Car malgré ses promesses de développement économique, elle fait naître la crainte d’une nouvelle colonisation et met en danger la vie des créatures sous-marines.
D’un autre côté, l’auteur remonte jusque dans les années 1980 pour nous raconter une magnifique histoire d’amitié entre Rafi Young, un garçon noir surdoué, issu d’un quartier défavorisé de South Side à Chicago, et Todd Keane, un riche adolescent des quartiers huppés du nord de la ville. Tous deux sont maltraités par leurs pères et partagent une passion pour les échecs et le jeu de go.
Grâce à un autre personnage, Evelyne Beaulieu, une océanographe canadienne qui réussit à s’imposer dans le milieu très masculin de la plongée sous-marine, on découvre également la coopération incroyable entre les crevettes et les poissons-globes et des exemples de l’extraordinaire intelligence des raies mantas. Quel est le lien entre le projet de ville flottante, l’amitié de Todd et Rafi et les explorations sous-marines d’Evelyne ?
Les trois fils vont se rejoindre dans un dénouement aussi virtuose que surprenant. Grâce à une architecture narrative époustouflante, Richard Powers nous décrit ainsi, page après page, la capacité de l’être humain à créer et à détruire.
Richard Powers, Actes Sud, 2025, 416 p., 23,80 euros.
2/ « Les loups de Tanger », par Jacques de Saint-Victor
Spécialiste de l’histoire des mafias, le politiste et juriste Jacques de Saint-Victor tâte de temps à autre du récit de fiction. Il faut dire que le sujet s’y prête ! Ce roman revient plutôt aux débuts de la French Connection, réseau mondial de trafic de drogue ayant Marseille pour cœur. Bien que ce soit une fiction, les personnages et leurs réseaux sont réels.
Il faut donc retourner au début des années 1950 à Tanger, port franc, lieu d’un banditisme cosmopolite et de nombreux trafics pour comprendre comment s’est bâtie la French Connection. On remonte le fil à partir de l’attaque d’un bateau de contrebande de cigarettes pour arriver jusqu’à la constitution d’un réseau international de trafic d’héroïne à destination des États-Unis.
On passe par Naples et le boss des boss de Cosa Nostra Lucky Luciano, des chimistes corses et tout un monde interlope dans lequel naviguent des bandits, des politiques, des services secrets, etc. Le livre met un peu de temps à nouer les liens avec les épisodes sur la French Connection, mais l’enquête du journaliste, secondé par un jeune universitaire curieux, nous accroche jusqu’à la fin.
Jacques de Saint-Victor, Calmann Lévy, 2025, 454 p., 21,90 euros.
3/ « Henua », par Marin Ledun
Le polar est un excellent outil pour découvrir une société. Marin Ledun, écrivain ayant travaillé comme sociologue, nous emmène aujourd’hui en Polynésie. Dans les premières pages, le corps d’une femme est découvert dans une zone boisée des terres rouges des Îles Marquises. Tepano Morel, un « demi » né en France d’une mère polynésienne, fait le voyage sur le lieu du crime pour mener l’enquête.
Il découvre que la victime, Paitoka O’Connor, était aimée de tous sur l’île, mais aussi une femme libre, sans attaches. Rapidement, les fils du suspense se multiplient. Qu’est-ce qui a poussé la mère de Tepano à quitter l’île ? Que cache sa coéquipière, qui est la dernière à avoir vu la victime ?
L’enquête familiale de Tepano permet de remonter jusqu’à l’été 1966, à l’époque où des essais nucléaires étaient effectués par le Commissariat à l’énergie atomique. On explore également la faune et la flore d’aujourd’hui, se demandant si le combat de Paitoka pour les protéger a pu lui être fatal.
Marin Ledun, Série noire, Gallimard, 2025, 418 p., 19 euros.
4/ « Olinda », par Jean-Michel Rodrigo
Dès le début d’Olinda, on est à l’entrée d’une discothèque de Lima où se côtoient les enfants de ministres, les apprentis caïds du trafic de cocaïne, et les touristes. Dans ce Pérou des années 1980, le danger est omniprésent, mais Olinda, l’héroïne de ce roman d’aventures, semble indifférente et ne cesse de le défier.
A travers le portrait d’Olinda, Jean-Michel Rodrigo nous raconte les dérives de la révolution sandiniste, les meurtres politiques des maoïstes du Sentier lumineux et la situation économique d’un pays inégalitaire. Sa passion avec Simon, un Français travaillant pour l’ambassade, s’accompagne de questionnements sur son identité et son avenir.
Jean-Michel Rodrigo, Pont9, 2025, 324 p., 21,90 euros.
5/ « Là où je me terre », par Caroline Dawson
Du Chili du général Pinochet, Caroline Dawson se souvient d’avoir joué ou bien d’avoir connu les disparitions et les détentions. Lorsqu’elle émigre au Canada avec sa famille, c’est un bouleversement pour elle. A Toronto, ils sont accueillis par un douanier sceptique et doivent faire face à une politique d’immigration restrictive.
Le récit de Caroline est à la fois celui d’un déclassement et d’une ascension sociale. Malgré les moqueries des autres enfants, elle progresse en français et se bat pour s’intégrer tout en évoquant les sacrifices de sa famille.
Caroline Dawson, Éditions de l’Olivier, 2025, 224 p., 21 euros.
6/ « Dé-rangée. L’exil au bord des lèvres », par Mina Kavani
Mina Kavani, actrice iranienne, partage dans Dé-rangée son expérience de l’exil. Elle évoque les difficultés rencontrées lorsqu’elle a dû porter le voile à l’école, ainsi que son choix de quitter sa terre natale pour la liberté d’actrice.
Ce récit poignant nous plonge dans ses souvenirs, la recherche de ses racines et de sa famille, dans un style d’une grande fluidité.
Mina Kavani, Éditions du Faubourg, 110 p., 15 euros.
7/ « Au ras du sol. Journal d’un écrivain en temps de guerre », par Dror Mishani
Dror Mishani, auteur de nombreux polars, a décidé de tenir un journal intime pendant six mois pour décrire son quotidien en temps de guerre. Ses récits quotidiens révèlent les tensions de la société israélienne face à des événements tragiques.
A travers ses réflexions, il partage son ressenti et les inquiétudes qui l’entourent, tout en se remémorant des moments clés de l’histoire récente.
Dror Mishani, Gallimard, 2025, 164 p., 20,20 euros.