Table of Contents
À St-Moritz (Suisse), face au changement climatique, la station de ski installe des thermosiphons pour préserver le pergélisol et stabiliser le terrain autour de la station d’arrivée du téléphérique du Piz Nair.
Piz Nair : pergélisol et thermosiphons pour stabiliser la station
La fonte du pergélisol — le sol gelé en profondeur — menace la stabilité du terrain sous la station d’arrivée du téléphérique du Piz Nair. La semaine passée, le thermomètre affichait encore 13 °C à 3 000 mètres, une situation catastrophique pour le pergélisol, qui risque de fondre et de rendre ainsi le terrain instable. Face à ce constat lié au changement climatique, les remontées mécaniques de St-Moritz ont opté pour l’installation de thermosiphons.
Des forages ont été réalisés dans la roche, sous le bâtiment, presque à l’horizontale, afin de maintenir le pergélisol. « Quand je vois comment cela fonctionne, je ne me fais pas de souci pour cette station pour les prochaines décennies », indique Thomas Brunner, directeur technique du téléphérique.
Fonctionnement, usages historiques et coût du dispositif
Les thermosiphons opèrent comme une sorte de congélateur géant. Il s’agit de tuyaux hermétiques remplis de dioxyde de carbone comprimé. En hiver, lorsque l’air est plus froid que le sol, le CO2 liquide s’évapore, monte, se refroidit en surface, puis redescend sous forme liquide : ce cycle transfère en continu de la chaleur vers l’atmosphère et permet de refroidir le sol et de maintenir le pergélisol gelé.
Ce principe est employé depuis des décennies dans des régions où le pergélisol est critique pour les infrastructures, notamment au Canada, en Alaska et en Sibérie. Un exemple d’application industrielle cité est le pipeline Trans-Alaska, qui repose sur du sol gelé. L’un des atouts majeurs de ce système est qu’il ne nécessite aucune consommation d’énergie externe pour fonctionner.
Au Piz Nair, le projet a mobilisé un investissement d’environ 1 692 000 € (équivalent de 1,8 million de francs suisses). Les thermosiphons installés sont conçus pour fonctionner pendant les trente prochaines années. Le succès éventuel de cette opération suscite un vif intérêt parmi les remontées mécaniques à travers les Alpes.
Motivations et position des responsables locaux
Les acteurs locaux présentent l’installation comme une intervention ciblée pour « aider un peu la nature » et ralentir la perte de pergélisol sur un site stratégique. Lukas Arenson, ingénieur en géotechnique et pergélisol pour BGC Engineering, détaille ainsi le principe et l’objectif :
« Ce que nous faisons actuellement avec ce système, c’est aider un peu la nature: nous retirons davantage de chaleur du sol. Il est donc plus froid qu’il ne le serait naturellement, ce qui permet au pergélisol de survivre à l’été », précise Lukas Arenson, ingénieur en géotechnique et pergélisol pour BGC Engineering.
Pour Thomas Brunner, la solution technique était préférée aux alternatives les plus radicales. Il insiste sur l’enjeu pratique et économique :
« L’alternative aurait été de se résoudre à abandonner la montagne. Ce n’est absolument pas une option pour nous: que ce soit en tant que destination touristique ou parce que les coûts de démontage seraient bien supérieurs à ces thermosiphons », martèle Thomas Brunner.
Intérêt alpin et perspectives opérationnelles pour la station
Le recours aux thermosiphons à St-Moritz illustre une adaptation technique locale face aux effets du changement climatique sur les stations de haute altitude en Suisse et dans les Alpes. Les remontées mécaniques considèrent désormais ce type d’installation comme une option viable pour préserver des infrastructures sensibles au dégel du pergélisol.
Sur le plan opérationnel, les forages presque horizontaux sous le bâtiment et le choix d’un fluide naturel (CO2) rendent l’intervention compatible avec les contraintes géotechniques du site et l’objectif de durabilité sans apport énergétique continu. Le projet est décrit comme susceptible d’assurer la stabilité du site pour les prochaines décennies, selon les responsables techniques.
Sujet TV : Julien Guillaume et SRF. Adaptation web : lia