La note de crédit de la France pourrait passer en catégorie inférieure, selon Fitch et les autres agences, une hypothèse qui plane sur la marche des finances publiques et les marchés à l’approche des revues annuelles. Fitch et plusieurs observateurs estiment que les perspectives pourraient évoluer si le gouvernement ne présente pas un plan crédible d’assainissement budgétaire. D’autres économistes rappellent que 17 pays européens présentent des ratios de finances publiques meilleurs que ceux de la France, qui affiche 5,8 % du PIB de déficit public et 113 % de dette en 2024. L’Insee a, par ailleurs, signalé que la croissance pourrait dépasser les prévisions du gouvernement sortant, compliquant encore les calculs budgétaires et les réponses politiques.
Note de crédit française en jeu: Fitch et S&P et échéances fin novembre
Fitch a ouvert la revue et, dans le cadre des évaluations, certaines publications évoquent une perspective négative sur la France, ce qui pourrait conduire à une dégradation vers la catégorie A et accroître la prime de risque pour les investisseurs. S&P Global doit se prononcer lors de sa propre revue le 28 novembre et les analystes estiment que le mouvement pourrait être déclenché par cette échéance, en fonction des évolutions politiques et budgétaires.
Sur le plan budgétaire, des évaluations indiquent que la France ne parviendrait pas à ramener son déficit sous 5 % du PIB l’année prochaine, contre les 4,6 % escomptés par François Bayrou.
Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management, une dégradation serait « logique ». D’abord parce que la situation politique n’aide pas à mettre en œuvre « un plan crédible d’assainissement budgétaire », comme Fitch l’exigeait en mars. Mais aussi pour effacer « une incohérence »: 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu’ils ont – à très peu d’exceptions près – des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8 % du PIB de déficit public et 113 % du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.
L’Insee a aussi indiqué que la croissance pourrait dépasser les prévisions gouvernementales, atteignant 0,8 % cette année selon les dernières données, malgré le contexte de manque de confiance.
Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l’institut Rexecode, observe que Fitch « donne rarement le coup d’envoi » des dégradations, mais il estime qu’il est « très probable » que S&P Global abaisse la note lors de sa revue fin novembre. Selon ses calculs, la France ne sera pas en mesure de ramener le déficit public en dessous de 5 % l’année prochaine, contre les 4,6 % envisagés par Bayrou. Les économistes ajoutent que la dégradation ne troublerait pas les marchés, « qui l’ont déjà intégrée », selon Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.
Quant à la configuration macroéconomique, même si la dégradation venait à se produire, la dette française resterait de « très bonne qualité » en substance, souligne Hadrien Camatte, économiste en chef chez Natixis, en évoquant la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui demeure saine.
Impact sur les marchés et les prochaines échéances
La dynamique des marchés montre que l’impact d’une dégradation éventuelle est déjà partiellement intégré par les investisseurs, qui surveillent plus que jamais les évolutions du coût de la dette et les décisions des agences. La dette française est déjà négociée à un coût plus élevé que celle de l’Allemagne et a même dépassé temporairement la dette italienne, illustrant un coût d’emprunt élevé et une « notation implicite » qui peut diverger de la note affichée.
Les économistes mettent en garde contre un maintien de taux d’intérêt élevés, capables d’absorber une part importante des dépenses publiques et de limiter l’espace disponible pour financer d’autres postes budgétaires, ce qui rend les prochaines années cruciales pour la politique budgétaire française.
Morlet-Lavidalie avertit que des coûts d’emprunt persistants « porteraient un étranglement progressif » et qu’il faut rester vigilant sur les marges budgétaires et les révisions de croissance.
En somme, les économistes précisent que, même en cas de dégradation, l’impact sur les marchés est susceptible d’être contenu à court terme, tant que les autorités démontrent une trajectoire budgétaire crédible et une croissance pérenne pour réduire le déficit.