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Sushila Karki, née le 7 juin 1952, est une figure majeure du paysage judiciaire et politique népalais. Ancienne présidente de la Cour suprême, elle a prêté serment le 12 septembre 2025 comme cheffe du gouvernement intérimaire chargé de conduire une transition de six mois et d’organiser des élections, après la démission du Premier ministre précédente dans un contexte de vastes manifestations populaires. Réputée pour sa fermeté contre la corruption et les dépassements de pouvoir, elle incarne une voix indépendante au sein des institutions du pays.
Naissance et jeunesse
Sushila Karki est née à Shankarpur, dans la région de Biratnagar au sud-est du Népal. Elle est l’aînée de sept enfants et a grandi dans une famille proche du Nepali Congress, parti en première ligne du combat pour la démocratie au pays. Son enfance s’est déroulée à proximité de la frontière indienne : sa maison se trouvait à environ 25 miles de la frontière, et elle fréquentait régulièrement le marché frontalier.
Formation et parcours académique
Karki a obtenu une licence en droit en 1972 puis a poursuivi des études supérieures en sciences politiques à l’Université Hindoue de Banaras, en Inde, achevées en 1975. Elle a ensuite décroché un diplôme en droit à l’Université de Tribhuvan en 1978, consolidant une formation mêlant droit et science politique. Ces acquis l’ont conduite à exercer comme avocate, enseignante et, plus tard, à embrasser une carrière judiciaire.
Débuts professionnels et engagement politique
Après un passage dans une institution de distribution alimentaire, Sushila Karki a obtenu en janvier 1979 sa licence pour exercer la profession d’avocate devant la Cour suprême. Elle a travaillé au tribunal d’appel de Biratnagar et a présidé l’ordre des avocats local. Entre 1985 et 1989, elle a enseigné au Mahendra Multiple Campus, rattaché à l’université Tribhuvan, à Dharan.
Très impliquée, elle a participé activement au mouvement populaire de 1990 contre le système des Panchayat, un régime monarchique autoritaire en place depuis 1960. Lors de ces manifestations pro-démocratie, elle a été brièvement arrêtée, ce qui a renforcé son profil public.
Parcours judiciaire et réputation
En 2009, Karki a été nommée juge ad hoc à la Cour suprême, la seule femme parmi huit juges provisoires pour un mandat de deux ans. Un an plus tard, elle est devenue juge à part entière à la Cour suprême du Népal. Son action s’est distinguée par une lutte ferme contre la corruption, notamment lorsqu’elle a condamné le ministre Jay Prakash Gupta dans une affaire de corruption très médiatisée.
En 2016, elle est devenue la première femme à présider la Cour suprême du Népal. Sa présidence a été marquée par des décisions strictes contre les abus de pouvoir et la corruption, qui lui ont valu à la fois de larges soutiens et des critiques de certains milieux politiques.
Crise politique et tentative de destitution en 2017
En avril 2017, le gouvernement a présenté une motion en vue de la destitution de Sushila Karki, l’accusant de partialité et d’ingérence dans l’action gouvernementale. Elle a alors été suspendue, provoquant une vive réaction de l’opinion publique en faveur de l’indépendance du pouvoir judiciaire. La pression populaire et l’intervention de la Cour suprême ont finalement conduit le Parlement à retirer la motion quelques semaines plus tard.
Sushila Karki est restée en fonction jusqu’au 6 juin 2017, date à laquelle son mandat a pris fin conformément aux procédures en vigueur.
Première ministre intérimaire
Le 12 septembre 2025, Sushila Karki a prêté serment comme cheffe d’un gouvernement intérimaire devant le président Ram Chandra Poudel. Sa mission : diriger une transition de six mois et organiser des élections après la démission du Premier ministre KP Sharma Oli, contraint de céder face à l’ampleur des manifestations.
Les troubles qui ont précédé sa nomination ont commencé le 8 septembre 2025, lorsque la répression policière d’un mouvement de jeunes surnommé « génération Z » a dégénéré. Les manifestants protestaient contre la censure des réseaux sociaux et la corruption des élites, entraînant des affrontements sanglants, des dizaines de morts et des centaines de blessés.
Parmi les événements marquants :
- Début des manifestations : 8 septembre 2025.
- Repli et incendie du Parlement, saccages d’édifices publics et domiciles de responsables.
- Intervention de l’armée et rétablissement d’un couvre-feu à Katmandou le 10 septembre.
- Au moins 19 morts et des centaines de blessés selon les bilans initiaux.
Sushila Karki hérite d’un mandat délicat : restaurer l’ordre, garantir la tenue d’élections libres et apaiser les tensions entre la rue et les institutions.
Réputation, défis et enjeux
Connue pour son intransigeance face à la corruption et les excès du pouvoir, Sushila Karki jouit d’un capital de crédibilité auprès d’une partie de la population. Cependant, son passage en politique active soulève des interrogations sur sa capacité à rassembler des forces politiques divisées et à gérer une transition apaisée.
Les principaux défis qui l’attendent sont clairs : organiser des élections crédibles, apaiser les tensions sociales et politiques, et réformer les institutions pour prévenir de nouvelles dérives. Sa réussite dépendra largement de sa capacité à concilier fermeté judiciaire et habileté politique.