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Le Parlement suisse a adopté mercredi un projet de loi instaurant un contrôle des investissements étrangers, contrôle, Suisse, UBS, sécurité nationale visant les prises de participation dans des entreprises helvétiques actives dans des secteurs jugés sensibles ; le Conseil des États a retenu une option médiane pour le périmètre d’application.
Portée du contrôle: secteurs visés et seuils retenus
Le texte décidé par le Conseil des États limite l’obligation de contrôle principalement aux prises de participation par des investisseurs étrangers d’État ou contrôlés par un État, dans des activités jugées critiques pour la sécurité. Le régime s’appliquerait aux entreprises des secteurs de l’électricité, de l’eau, du gaz, du matériel de guerre et des «sicherheitsrelevante» services informatiques.
La version du Conseil des États retient des seuils quantitatifs : la règle concerne les cessions d’entreprises qui emploient au moins 50 personnes à plein temps dans le monde ou réalisent un chiffre d’affaires annuel d’au moins 10 millions de francs suisses (environ 9 500 000 €). Un amendement de la commission économique visant des seuils beaucoup plus élevés a été rejeté.
Différences entre Conseil national et Conseil des États autour des investissements étrangers, contrôle, Suisse, UBS, sécurité nationale
Le Conseil national avait adopté l’an dernier une version plus large : toute prise de contrôle par des investisseurs étrangers dans des secteurs définis et au‑dessus de certains seuils aurait été soumise au contrôle, indépendamment du statut public ou privé de l’investisseur. Selon l’estimation fédérale citée pendant les débats, cette version aurait multiplié par dix le nombre de cas contrôlés, portant le volume à environ 30–40 dossiers par an contre quelques cas aujourd’hui.
Le Conseil des États a voté, par 34 voix contre 9, pour une réduction significative rapprochant le texte de la proposition du gouvernement : la compétence de contrôle sera en priorité limitée aux investisseurs étatiques ou contrôlés par un État. Lors de la votation finale, le projet est passé au Conseil des États par 27 voix contre 11, avec 3 abstentions. Le dossier retourne maintenant au Conseil national pour harmonisation des différences, principalement sur le périmètre.
Arguments des partisans et des opposants
À l’origine de la démarche parlementaire se trouvait une motion de 2018 déposée par le sénateur valaisan du Centre Beat Rieder, qui a présenté le sujet sous l’expression «wirschaftliche Landesverteidigung». Le raisonnement des partisans est le suivant : des investisseurs proches d’États — notamment la crainte vis‑à‑vis d’investisseurs étatiques venus de Chine ou d’autres régimes autoritaires — pourraient acquérir des entreprises innovantes pour des motifs stratégiques d’État, extraire des savoir‑faire techniques puis délocaliser la valeur ajoutée, affaiblissant ainsi la base industrielle et la compétence technologique suisse.
Les opposants à la limitation au seul critère «étatique» estiment que la frontière entre investisseurs publics et privés est souvent floue, en particulier dans des pays autoritaires — et ils ont souligné que ce phénomène peut aussi concerner des investisseurs originaires des États-Unis. Les partisans, y compris le conseiller fédéral Guy Parmelin, ont répondu que la définition couvre non seulement les investisseurs officiellement publics mais aussi ceux «direkt oder indirekt staatlich kontrolliert». De plus, le projet donne au gouvernement la faculté d’étendre temporairement le champ d’application en cas de menace contre l’ordre public.
Activités additionnelles demandées par le Conseil national et critères de surveillance
Le Conseil national souhaite, en sus, inclure une liste d’activités supplémentaires soumises au contrôle dès un chiffre d’affaires annuel de 100 millions de francs (environ 95 000 000 €) : hôpitaux régionaux centraux, entreprises pharmaceutiques, nœuds de transport, grands centres de distribution alimentaire, réseaux de télécommunications, infrastructures financières importantes et banques d’importance systémique. La commission économique du Conseil des États avait proposé de supprimer cette extension, mais cette proposition a été rejetée au Conseil des États (17 voix pour la suppression, 27 contre).
Aux fins de qualification d’un «entreprise suisse», la présidence de la commission économique, tenue par le sénateur aarguais de droite Thierry Burkart, indique que la domiciliation de la direction et le contrôle effectif serviront de critères. Ainsi, des groupes cotés dispersés comme la UBS sont considérés comme suisses si leur siège effectif est en Suisse ; l’entrée d’un actionnaire chinois ne déclencherait pas nécessairement un contrôle tant que la direction et le centre de décision restent en Suisse, alors qu’une acquisition de la UBS par un établissement étranger changerait la donne.
Organisation des contrôles et critères de dangerosité
Les contrôles seront confiés au Secrétariat d’État à l’économie (Seco). Le projet de loi stipule que le Seco doit empêcher les acquisitions qui menacent l’ordre public ou la sécurité en Suisse. Le Conseil fédéral définit comme dangereuse une situation où «ein Unternehmen ausfällt, das für die Volkswirtschaft unabdingbare Leistungen erbringt, ein bedeutender Lieferant der Armee ist oder inländischen Behörden zentrale Informatikdienstleistungen liefert».
Le projet énumère aussi des indices de suspicion : si l’investisseur ou son État d’origine s’est déjà distingué négativement, par exemple par des activités d’espionnage en lien avec la cible suisse, cela pourra renforcer le doute. Dans la pratique, pour certains parlementaires et experts, l’origine de l’investisseur (notamment de pays autoritaires) constituera souvent un élément déterminant pour soupçonner une proximité avec l’État et des motifs stratégiques.
Prochaines étapes parlementaires
Après l’adoption par le Conseil des États, le texte retourne au Conseil national pour une procédure de conciliation destinée à régler les écarts, principalement sur l’étendue des secteurs et des seuils. Tant que le Parlement n’aura pas harmonisé ses positions, la loi ne pourra pas être promulguée et mise en œuvre par le Seco.