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Lobby pro-Israël : tensions avant la visite d’Erdogan à la Maison-Blanche

by Sara
Turquie, États-Unis, Israël, Palestine

À Washington, des lobbies favorables à Israël ont lancé, avant la visite du président turc à la Maison-Blanche, une campagne agressive visant la Turquie et son chef d’État. Ils cherchent à mettre en avant des éléments du dossier turc susceptibles d’inquiéter l’administration américaine et le Congrès à l’approche de la rencontre entre Recep Tayyip Erdogan et Donald Trump.

Les principaux points d’attaque

Ces groupes, représentés par des think tanks proches du courant conservateur israélien, ont répété trois lignes de critique à l’encontre d’Ankara et de son président :

  • La poursuite d’une coopération militaire, alors que la Turquie souhaite moderniser sa force aérienne.
  • Un rôle régional perçu comme un frein aux intérêts américains dans plusieurs conflits du Moyen-Orient.
  • Les relations particulières d’Ankara avec la Russie, qui alimentent des doutes sur la fiabilité de la Turquie au sein de l’OTAN.

Ankara présentée comme « déstabilisatrice »

Lors de la session, certains analystes ont décrit la Turquie d’Erdogan comme une puissance déstabilisatrice. Ils soulignent ce qu’ils considèrent comme une proximité avec le mouvement Hamas, un flirt avec Moscou et des politiques jugées agressives envers les alliés traditionnels des États-Unis.

Selon Sinan Sidi, directeur du programme Turquie à la Foundation for Defense of Democracies, « sous le règne d’Erdogan, Ankara est une force déstabilisatrice, confortable avec le Hamas, courtise Moscou et adopte des politiques hostiles aux véritables alliés américains ». Il affirme qu’à la Maison-Blanche, face à la liste de demandes d’Erdogan, la seule réponse appropriée devrait être un refus clair.

Le contexte de la rencontre et le dossier de Gaza

La visite s’inscrit après un sommet rassemblant Erdogan, Trump et des dirigeants arabes et musulmans, organisé en marge de la 80e session de l’Assemblée générale des Nations unies à New York. Erdogan a qualifié ces discussions de « fructueuses ».

Toutefois, la Turquie a adopté une position résolument pro-palestinienne, parfois en contradiction ouverte avec la politique américaine. À l’Assemblée générale, Erdogan a vivement critiqué l’offensive israélienne sur Gaza en montrant des images évocatrices et en lançant un appel moral aux dirigeants mondiaux : « Écoutez vos consciences. Y a‑t‑il une logique raisonnable qui justifie cette barbarie en 2025 ? »

Il a également évoqué une attaque israélienne visant le Qatar, la présentant comme la preuve d’un leadership israélien « hors de contrôle » et estimant que « tous les pays de la région sont exposés aux menaces inconsidérées d’Israël ». Ces prises de position renforcent les critiques des cercles pro-israéliens à Washington.

La question des F-35 et du S-400

La décision de la Turquie, en 2019, d’acheter le système de défense antiaérien russe S-400 a conduit les États-Unis à exclure Ankara du programme de fabrication des avions de combat F-35 et à lui interdire l’achat de ces appareils.

Malgré cela, Erdogan a exprimé son souhait de rouvrir les discussions pour acquérir des F-35, et Donald Trump s’est dit publiquement optimiste. Mais de nombreux membres des deux partis au Congrès restent opposés à une réintégration turque au programme, invoquant des préoccupations de sécurité nationale.

Le professeur Howard Eissenstat, spécialiste des questions turques à l’université Saint Lawrence, estime que l’achat de F-35 est une priorité pour le gouvernement turc et pense que Trump pourrait être favorable à une vente. Il note toutefois des obstacles juridiques et logistiques qui pourraient compliquer toute transaction.

Hossam Abd al‑Karim, expert en affaires turques à Washington, souligne que la Turquie a joué intelligemment en évoquant l’achat d’avions européens (comme le Typhoon) comme alternative, afin de négocier depuis une position de force.

En parallèle, Sinan Sidi appelle au refus de la demande turque, rappelant que la loi américaine et le passé récent (l’achat des S-400) constituent des freins sérieux à toute livraison de F-35 à Ankara.

Erdogan a sarcastiquement déclaré, en réponse aux propos de l’opposition turque : « Si nous faisons affaire avec l’Amérique, ce sera avec Trump, pas avec son fils. »

F-35 envisagés par la Turquie

Les F-35 restent donc au cœur d’un dilemme entre considérations stratégiques turques et réticences politiques américaines.

Un rôle stratégique mais ambigu

Face aux tensions régionales — Syrie, Gaza, Iran — Erdogan cherchera à ménager la relation avec Washington tout en défendant les intérêts turcs. Les observateurs estiment qu’il essaiera d’éviter un débat trop approfondi sur Gaza, sachant que la marge de manœuvre pour infléchir la position américaine est limitée.

Par ailleurs, Ankara entend se présenter comme un médiateur potentiel entre le Hamas et Israël, et comme un acteur clé pour superviser tout accord de paix éventuel.

Sur la Syrie, Howard Eissenstat prévoit que la Turquie formulera des demandes « tridimensionnelles » :

  • Maintenir les mécanismes d’évitement d’affrontements entre la Turquie et Israël.
  • Continuer à soutenir le gouvernement qu’Ankara estime comme la meilleure chance de stabilisation.
  • Obtenir un retrait du soutien américain aux Unités de protection du peuple (YPG) dans le nord de la Syrie.

Eissenstat estime qu’Erdogan obtiendra probablement des réactions positives sur certains points syriens, même s’il n’obtiendra pas tout ce qu’il souhaite.

Enfin, la relation Turquie‑OTAN complexifie le tableau : bien que la Turquie entretienne des liens étroits avec la Russie, Washington et Trump reconnaissent le rôle stratégique et la puissance militaire d’Ankara au sein de l’alliance.

Trump voit la Turquie comme un acteur pouvant soulager une partie de la charge militaire américaine en Europe, et comme un partenaire utile dans des dossiers comme l’Ukraine.

source:https://www.aljazeera.net/politics/2025/9/25/%d8%ad%d9%85%d9%84%d8%a9-%d8%aa%d8%ad%d8%b1%d9%8a%d8%b6-%d8%aa%d8%b3%d8%a8%d9%82-%d8%b2%d9%8a%d8%a7%d8%b1%d8%a9-%d8%a3%d8%b1%d8%af%d9%88%d8%ba%d8%a7%d9%86-%d9%84%d9%84%d8%a8%d9%8a%d8%aa

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