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À la veille de l’élection présidentielle du 25 octobre, la flambée des prix du cacao met en lumière la fragilité du modèle économique de la Côte d’Ivoire. Ce secteur, qui emploie environ 6 millions de petits producteurs et représente près de 40 % des exportations et 14 % du produit intérieur brut, reste à la fois pilier économique et enjeu politique majeur.
La hausse prix cacao Côte d’Ivoire pèse désormais sur les revenus, la compétitivité régionale et la stabilité sociale, alors que des concurrents adoptent des modèles de marché plus libéralisés.
Pourquoi les prix du cacao ont-ils flambé ?
Au cours des deux dernières décennies, la Côte d’Ivoire et le Ghana ont connu une abondance de production qui maintenait les cours entre 1 000 et 3 500 dollars la tonne.
Depuis 2023, plusieurs facteurs ont inversé la tendance et provoqué un resserrement de l’offre :
- chocs climatiques répétés impactant les récoltes ;
- maladies des cacaoyers, notamment le virus du « swollen shoot » ;
- vieillissement des cultivateurs et des vergers entraînant une chute de la productivité.
Conséquence : un déficit d’offre qui a fait monter les cours à des niveaux inédits, jusqu’à 12 000 dollars la tonne en 2024, avec une moyenne de 8 900 dollars entre janvier et juillet 2025 — soit près de trois fois la moyenne des vingt années précédentes.
Que prévoir pour la prochaine campagne agricole ?
Les projections tablent sur une production 2025/2026 d’environ 1,8 million de tonnes, un niveau qui garantirait encore la première place mondiale à la Côte d’Ivoire devant le Ghana.
Sur le plan domestique, le prix bord champ (prix à la ferme) a atteint l’an dernier 2 200 francs CFA le kilo (environ 3,91 dollars).
Les autorités envisagent une hausse à 2 800 francs CFA cette saison, poussée par la hausse des cours mondiaux et les pressions politiques liées à l’élection présidentielle.
La coordination avec le Ghana — qui a fixé un prix bord champ à 2 500 francs — est également un facteur : un écart trop important inciterait au détournement et à la contrebande des fèves à travers la frontière.
Pourquoi le modèle ivoirien subit-il des tensions ?
Le système de commercialisation, orchestré par le Conseil du Café et du Cacao, repose sur des ventes à terme garantissant un prix plancher aux producteurs. Ce mécanisme a protégé les cultivateurs durant les périodes de bas prix.
Mais aujourd’hui, face à des marchés plus libéralisés (Libéria, Cameroun) où le prix bord champ dépasse parfois 3 000 à 5 000 francs CFA le kilo, ce modèle montre ses limites.
La différence de prix alimente la contrebande, érode les recettes d’exportation et alimente le mécontentement des petits producteurs.
Comme l’ont indiqué des responsables : « Le Conseil ne peut tout simplement pas suivre le marché car il gère une récolte massive qui atteint deux millions de tonnes. »
Quelles réformes sont envisagées ?
Face à cette conjoncture, le Conseil a déjà opéré quelques ajustements :
- réduction de la période de vente à terme d’un an à six mois ;
- amélioration des outils de prévision des récoltes.
Des experts estiment que les années de prix élevés (trois à cinq ans) doivent servir à transformer le modèle agricole :
- diversifier les sources de revenus des exploitations ;
- faire évoluer les producteurs vers des « entrepreneurs agricoles » plutôt que des monocultures dépendantes du cacao ;
- accroître les investissements en formation et infrastructures.
La place de la Côte d’Ivoire sur le marché mondial est-elle menacée ?
Selon les observateurs, la production ivoirienne stagne et pourrait chuter à environ un million de tonnes d’ici une décennie si rien n’est fait pour enrayer la baisse de la productivité.
En parallèle, l’Équateur, troisième producteur mondial, progresse rapidement et pourrait dépasser le million de tonnes d’ici 2035 grâce à un modèle de production plus intensif.
Pour préserver sa position, la Côte d’Ivoire doit intensifier ses efforts dans la recherche et développement, la lutte contre les maladies, l’amélioration des rendements et la conformité aux exigences de traçabilité européennes.