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Élections au Cameroun : l’opposition cible les électeurs anglophones

by Sara
Cameroun

À l’approche de l’élection présidentielle camerounaise du 12 octobre 2025, la course aux voix dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest s’intensifie. Ces deux régions, qui réunissent environ un million d’électeurs inscrits — soit plus de 10 % de l’électorat national —, constituent un enjeu majeur pour les principaux candidats de l’opposition. Issa Tchiroma Bakary et Bello Bouba Maïgari cherchent à convaincre ces électeurs tandis que Joshua Osih tente de préserver sa base locale.

Contexte et stratégies des opposants

Après l’échec de négociations entre certains ténors de l’opposition, l’attention s’est portée sur la formation d’alliances de dernière minute. Les deux anciens ministres, Tchiroma et Maïgari, veulent apparaître comme des candidats d’unité capables de rivaliser avec le président sortant Paul Biya.

Les enjeux sont clairs :

  • convertir le vote anglophone en faveur d’un candidat unitaire ;
  • assurer une participation suffisante dans des zones marquées par la violence et les appels au boycottage ;
  • bénéficier des soutiens d’acteurs politiques et civils influents.

Maïgari : le candidat de l’unité

Bello Bouba Maïgari, ancien Premier ministre et président de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès, semble tenir une longueur d’avance dans la course aux soutiens. Le 28 septembre, il a obtenu l’appui de l’avocat éminent Akere Muna, après avoir déjà remporté le soutien du militant civil Sita Caxton Atiki.

Ces ralliements renforcent l’image d’un candidat capable de rassembler différentes forces de l’opposition, mais ils suscitent aussi des critiques. Certains estiment que l’arrivée tardive de personnalités comme Muna fragilise la position des candidats anglophones et traduit une logique d’opportunisme.

Les débats autour de ces soutiens mettent en lumière un dilemme central : l’efficacité d’une coalition élargie face à la nécessité de préserver une représentation authentiquement anglophone.

Akere Muna et Sita Caxton Atiki : faiseurs de décision ?

Le rôle d’Akere Muna et de Sita Caxton Atiki dans la campagne de Maïgari suscite des analyses divergentes. Pour certains observateurs, Muna peut dépasser les clivages partisans, notamment en zones urbaines où la méfiance envers les partis traditionnels est forte.

Cependant, son ralliement tardif a provoqué des sentiments de trahison chez certains militants, d’autant qu’on évoque des offres politiques derrière ces alliances — un poste de Premier ministre pour Muna selon certaines sources, tandis que le camp de Tchiroma aurait proposé des fonctions ministérielles.

Parmi les critiques, on souligne aussi la popularité limitée de Muna dans certains milieux, malgré sa stature internationale et son discours réformiste.

La bataille locale : Joshua Osih et l’électorat anglophone

La concurrence est vive dans les régions anglophones. Joshua Osih, candidat pour la Front Social-Démocrate, vise à conserver sa base locale. En 2018, il avait obtenu 12,7 % des voix dans le Sud-Ouest et 10,4 % dans le Nord-Ouest, des scores qu’il espère consolider cette année.

Les divers calculs d’alliances rendent incertaine la capacité d’un seul candidat de fédérer l’ensemble des voix anglophones, surtout dans un contexte marqué par l’instabilité et les faibles taux de participation attendus.

Tchiroma : promesses de dialogue et geste envers les séparatistes

Issa Tchiroma Bakary ne se contente pas d’une campagne classique. À Bamenda, capitale du Nord-Ouest, un accord préliminaire conclu le 27 septembre entre son « Union du changement » et certains leaders séparatistes prévoit la suspension des « villes fantômes » du 11 au 13 octobre. L’objectif affiché est de permettre aux anglophones de voter.

Tchiroma s’est engagé à la libération de détenus liés à la crise anglophone et à l’ouverture de négociations directes avec des chefs séparatistes. Il a multiplié les déplacements, notamment à Buéa et Limbe les 4 et 5 octobre, pour réaffirmer son engagement en faveur de la paix.

Lors de meetings, il a évoqué ses échanges avec des figures comme Chris Anu (basé aux États-Unis) et le frère d’un dirigeant connu sous le nom de « maréchal de terrain ». Il a aussi présenté des excuses publiques pour certaines décisions prises lorsqu’il était ministre, reconnaissant avoir sous-estimé les problèmes des anglophones.

Scénarios et perspectives

Plusieurs facteurs détermineront l’issue dans les régions anglophones :

  • la capacité des candidats à transformer des soutiens ponctuels en appuis électoraux durables ;
  • l’impact des accords locaux sur la participation dans des zones marquées par la violence ;
  • la mobilité des électeurs urbains et leur réaction aux discours de rassemblement.

Alors que le scrutin approche, la bataille pour le vote anglophone reste imprévisible. Les alliances se nouent et se dénouent, et chaque geste politique peut peser lourd sur le résultat final.

Électeurs camerounais font la queue à Douala pour récupérer leur carte électorale, 8 octobre 2025.

Électeurs camerounais faisant la queue dans un bureau d’ELECAM à Douala le 8 octobre 2025 pour récupérer leur carte électorale en vue du scrutin du 12 octobre 2025.

Supporters de Paul Biya lors du lancement de sa campagne, Maroua, 7 octobre 2025.

Partisans du président Paul Biya brandissant des pancartes lors du lancement de sa campagne à Maroua, le 7 octobre 2025.

Rassemblement d'Issa Tchiroma Bakary à Yaoundé, 3 octobre 2025.

Supporters d’Issa Tchiroma Bakary lors d’un meeting à Yaoundé, 3 octobre 2025.

Carte du Cameroun.

Carte du Cameroun montrant les régions concernées par la crise anglophone.

source:https://www.aljazeera.net/politics/2025/10/9/%d9%85%d8%b1%d8%b4%d8%ad%d9%88-%d8%a7%d9%84%d9%85%d8%b9%d8%a7%d8%b1%d8%b6%d8%a9-%d9%81%d9%8a-%d8%a7%d9%84%d9%83%d8%a7%d9%85%d9%8a%d8%b1%d9%88%d9%86-%d9%8a%d8%b3%d8%b9%d9%88%d9%86

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