Home ActualitéLes maisons France Services en danger : une survie incertaine à Marseille

Les maisons France Services en danger : une survie incertaine à Marseille

by Lea
France

À Marseille, douze France Services, portées par des associations, servent d’entrée pour douze services publics différents. Elles ont été créées comme une bouée de sauvetage face à la fermeture des guichets d’accueil et à la dématérialisation des démarches. Aujourd’hui, elles redoutent pour leur survie l’érosion du financement et l’incertitude entourant les contrats aidés, en particulier ceux de la Métropole Aix-Marseille.

Menaces de fermetures et demandes de financement

Dans un communiqué publié ce vendredi, les six associations porteuses des douze France Services à Marseille, réunies dans le collectif Parads, tirent la sonnette d’alarme face à une incertitude majeure et à une forte contrainte budgétaire. Elles réclament un plan de financement pour assurer leur pérennité en 2026, puis un cadre financier pluriannuel à partir de 2027. Et elles avertissent que, si la situation se prolonge, l’accès aux droits de milliers d’habitants marseillais serait menacé.

Le 20 novembre dernier, elles avaient adressé un courrier commun aux services de l’État et aux collectivités du territoire, à la suite d’une réunion en préfecture, s’interrogeant sur l’opportunité de continuer à porter ce dispositif qui met en péril l’équilibre financier de leurs associations. Ce ton reflète l’inquiétude d’organisations qui habituées à éviter les conflits.

Reda Debache, délégué territorial à l’animation de Léo-Lagrange, rappelle que « le désengagement de certaines collectivités met à mal de nombreuses structures, et le renouvellement des contrats aidés vient ajouter à leurs difficultés ». Elsa Truze, coordinatrice du collectif, ajoute que « ce qui semble être annoncé, c’est que la politique de la ville n’a pas à financer ces structures d’accès aux droits ».

Sans perspective de nouveaux financements, le forfait de base de 50 000 € par structure labellisée demeure insuffisant. Pour la fédération Léo-Lagrange, qui gère deux France Services au Canet et au Panier, la fin des dotations métropolitaines les priverait d’un tiers de leurs fonds. « La seule solution pour l’instant, c’est une fermeture. Le budget prévisionnel de 2026 est en déficit, nous ne pouvons pas le boucler », affirme Reda Debache.

Ronan Paturaux, délégué général de l’Ifac en Méditerranée, rappelle que « la question de notre existence se pose ». Si l’association qui porte les France Services de la Soude et de la vallée de l’Huveaune a accepté de couvrir leurs déficits, il ajoute que « on ne pourra pas compenser des pertes systémiques ». Il poursuit: « Je suis en colère. Nous accompagnons un public très paupérisé, et aujourd’hui nous n’avons pas de réponse à leur donner. Je ne comprends pas le silence des pouvoirs publics. »

Un repositionnement de la Métropole

Face à l’accroissement de la précarité, les tensions se renforcent et les témoignages évoquent une hausse de l’agressivité et une détresse psychique marquée.

La Métropole affirme n’avoir pas réduit ses financements dédiés à la Politique de la Ville et précise que ses moyens sont désormais orientés sur ses compétences obligatoires. Elle présente ce repositionnement comme une clarification et assure soutenir massivement les France Services, une position qu’elle affirme tenir depuis trois ans.

Le Département indique qu’il maintiendra ses dotations en 2026 sur la même base que 2025.

Réactions et mesures locales

Audrey Gatian, adjointe PS à la politique de la ville, déplore : « Nous sommes appelés au secours parce que la Métropole se désengage de façon subite sans nous laisser d’autre choix ». Elle précise que le Département étudie des solutions au cas par cas avec l’État pour le maintien des France Services existants.

Réponse de l’État et pistes d’action

Dans une réponse détaillée, la préfecture indique que la préfète déléguée pour l’égalité des chances s’est engagée à maintenir les financements de l’État dédiés aux France Services au titre de la politique de la ville en 2026. Une analyse des coûts des cinq France Services en situation de fragilité est en cours et les services de l’État travaillent à un plan d’action pour les soutenir.

Le Département réfléchit à une mutualisation dans les Maisons des solidarités, tandis que l’État travaille avec la municipalité pour de nouveaux locaux. « Le renouvellement des conventions des contrats aidés sera traité en priorité et avec attention, dans le cadre de gestion des postes d’adultes-relais », précise la préfecture. Les structures doivent être reçues d’ici la fin de l’année.

En chiffres

  • 12 France Services existent à Marseille, portées par des associations; à Lyon, Rennes, Toulouse ou Lille, ce sont les intercommunalités qui financent. Une 13e structure mobile a été lancée le 17 novembre dans les 14e et 15e arrondissements.
  • 66 305 visites ont été enregistrées à Marseille en 2024, pour 86 408 accompagnements, notamment face à des ruptures de paiement de la CAF ou de l’assurance maladie, et des logements indécents.
  • 50 000 € ont été débloqués en urgence par l’Agence nationale de la cohésion des territoires cet été à la demande de la préfecture pour éviter le risque de fermeture des six France Services les plus exposées.
  • Au total, l’État verse 1,1 million € pour les structures marseillaises.

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