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Les producteurs d’huiles essentielles de lavande traversent une crise économique inédite : baisse spectaculaire des volumes de récolte liée aux fortes chaleurs et concurrence accrue ont provoqué un effondrement des prix et menacent la viabilité de nombreuses exploitations.
Récoltes 2025 de lavande sur le plateau de Valensole
Fin de récolte pour Rémi Angelvin sur le plateau de Valensole, où 2025 apparaît comme une mauvaise année en termes de volume. Sur place, le constat est sans appel : la production a fortement chuté. « Moins de 30%, comparé à d’habitude », précise-t-il amèrement. « C’est dû principalement au gros coup de chaud qu’on a eu fin juin, juste au moment où les plants ont commencé à fleurir. »
Les producteurs présents sur les plateaux de Provence rapportent que la floraison, et donc la quantité de fleurs utilisables pour l’extraction des huiles essentielles, a été perturbée par cet épisode de chaleur. La contraction des volumes a un impact direct sur les marges des exploitations, déjà fragilisées.
Effondrement des prix et concurrence accrue
Parallèlement à la baisse des volumes, le marché souffre d’un déséquilibre entre l’offre et la demande. Le prix du marché de l’huile essentielle de lavande s’est effondré ces cinq dernières années, selon les professionnels rencontrés.
« À l’heure actuelle, on ne vend pas notre produit. Pour ceux qui vendent, ils vendent à perte. C’est le cas pour tous [les lavandiculteurs]. On arrache mais on ne replante pas… Parce qu’on ne fait pas de l’argent avec ça, du tout. Donc travailler juste pour le paysage, c’est bien gentil, mais au bout d’un moment, ça ne nous fait pas manger »
confie le lavandiculteur.
Ce discours illustre un cercle vicieux : face à des prix trop bas, certains producteurs choisissent d’arracher leurs plants plutôt que de poursuivre une activité non rentable, ce qui pose la question de la pérennité des surfaces cultivées en lavande.
Alain Aubanel, président de la PPAM (syndicat des professionnels de plantes à parfum aromatique et médicinal), identifie une cause structurelle : l’attrait passé pour l' »eldorado » de l’huile essentielle a suscité un afflux d’installations, y compris d’agriculteurs en difficulté qui se sont tournés vers la lavande.
« Ça donnait aussi l’idée à tous les agriculteurs qui avaient des cultures un petit peu en difficulté de se lancer sur de la lavande. Il y a eu trop de production, donc les prix ont commencé à baisser entre 70 et 80%. Et ça fait quatre ou cinq ans que les gens vendent la perte. Et ça, c’est pas durable »,
constate-t-il.
Selon ces acteurs, la surproduction a entraîné une chute des prix de l’ordre de 70 à 80 % dans certains cas, et de nombreux producteurs écoulent désormais leur récolte à perte depuis plusieurs années.
Conséquences pour les territoires et le tourisme
Les implications dépassent le cadre strictement agricole. Si des parcelles sont arrachées et que les surfaces de lavande diminuent, les professionnels s’inquiètent d’effets en cascade sur le tourisme local. Les paysages de lavande, marqueurs identitaires de régions comme la Provence, attirent chaque année des visiteurs ; leur disparition pourrait avoir des répercussions économiques pour les acteurs touristiques et pour les territoires concernés.
Les témoignages recueillis mettent en relief la double fragilité du secteur : d’une part, la vulnérabilité face aux aléas climatiques (les épisodes de chaleur affectant la floraison) ; d’autre part, la fragilité économique liée à une offre excédentaire et à des prix insuffisants pour couvrir les coûts de production.
État actuel et perspectives opérationnelles
Sur le terrain, la situation se traduit déjà par des décisions concrètes : arrachage de plants, absence de replantation et poursuite d’activités au ralenti tant que les conditions économiques ne deviennent pas favorables. Les propos des producteurs mettent en avant une simple réalité budgétaire : sans perspectives de revenus suffisants, il devient difficile de maintenir des exploitations spécialisées en lavande.
Les acteurs du secteur appellent implicitement à des ajustements du marché et à des mesures collectives pour rétablir un équilibre entre l’offre et la demande, mais le reportage se contente de constater la crise actuelle sans annoncer d’actions précises engagées à ce stade.