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Au Soudan, la banque de gènes végétaux de la ville de Wad Madani, située dans l’État d’Al-Jazirah, est presque réduite à néant. Lors de la prise de contrôle de cette région par les forces du soutien rapide en décembre 2023, de nombreuses ressources végétales rares, notamment des échantillons génétiques précieux, ont été perdues ou détruites, mettant en péril la biodiversité agricole locale et nationale.
Un centre de ressources génétiques en ruine
Une visite sur place a révélé les lourds dégâts subis par le centre de conservation génétique rattaché à l’Autorité de recherche agricole. Seules les structures du bâtiment subsistent, marquées par les violences du conflit, tandis que des graines et échantillons végétaux jonchent les étagères et le sol du site.
Le rôle vital de la banque de ressources génétiques
Créée au début des années 1980, la banque de ressources génétiques végétales a débuté comme une unité modeste dédiée à la collecte et à la conservation des ressources horticoles. Dans les années 1990, elle est devenue un programme autonome chargé de préserver tous les matériaux génétiques végétaux agricoles du Soudan.
Son directeur, Ali Zakaria Babiker, souligne que plus de 17 000 entrées génétiques issues de multiples cultures sont conservées dans des congélateurs à -20 °C, ce qui garantit leur viabilité pour des décennies. Ces ressources sont essentielles pour la recherche scientifique, les programmes d’amélioration génétique, et la pérennité agricole du pays.
Le centre est la seule institution soudanaise dédiée à la collecte et à la conservation des ressources génétiques agricoles, jouant un rôle clé pour l’amélioration des semences, notamment par la création de variétés résistantes à la sécheresse, aux maladies, ou à la salinité.
Des cultures agricoles variées et précieuses
Le centre est composé de deux sections principales :
- Un département de conservation des ressources génétiques végétales.
- Un département de gestion des informations génétiques, contenant des variétés essentielles pour renforcer la résistance au changement climatique et aux ravageurs.
Selon l’ancien directeur Taher Ibrahim Mohamed, la banque conserve des graines de plus de 15 000 variétés traditionnelles locales et sauvages, provenant de toutes les régions du pays. Parmi ces cultures figurent le maïs, le mil, le sésame, l’arachide, les haricots, la pastèque, la courge, le gombo, la tomate, le piment fort, et l’hibiscus.
Une importance agricole et économique cruciale
Un rapport obtenu par les autorités agricoles révèle la destruction partielle du centre, qui abritait non seulement des milliers de ressources génétiques, mais aussi des laboratoires de recherche spécialisés. Le responsable principal, Ezz El-Din Mohamed, indique que ce centre est unique au Soudan et se classe quinzième au niveau mondial dans son domaine.
La perte de ces ressources génétiques équivaut à la disparition d’une matière première indispensable à la recherche, à l’amélioration variétale, et à l’augmentation de la productivité agricole. Une telle destruction menace directement la sécurité alimentaire du pays.
Ali Zakaria rappelle également que la banque joue un rôle clé en rétablissant les systèmes agricoles dans leurs environnements d’origine, contribuant ainsi à la sécurité alimentaire, mais aussi à la fourniture de vêtements et de médicaments pour la population.
Évaluation des dégâts et perspectives
Les dommages causés au centre de conservation sont inestimables, souligne Ali Zakaria. De nombreux échantillons, collectés il y a plus de quarante ans à travers tout le pays, ont été définitivement perdus. Il est incertain de pouvoir les reconstituer, notamment en raison des changements climatiques et des modifications des cultures dans leurs zones d’origine.
En plus des pertes biologiques, 35 congélateurs et serveurs informatiques contenant les données des ressources génétiques ont été volés, ainsi que plus de huit ordinateurs et l’ensemble du matériel de laboratoire. Cette situation compromet gravement la reprise des activités et remet en cause la continuité du travail scientifique.