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<h2>Al Jazeera interviewe un designer de Guinness qui recrée un Pharaon</h2>
<p>Comment les policiers peuvent-ils retrouver les traits des victimes défigurées par les criminels pour effacer les traces du délit ? Et comment les scientifiques parviennent-ils à établir une représentation des humains primitifs ou même des personnes ayant vécu à des époques historiques anciennes ?</p>
<p>Je pensais que les logiciels informatiques avaient facilité cette mission et que l’expertise humaine n’était plus aussi cruciale, jusqu’à ce que je tombe sur une étude scientifique concernant une momie égyptienne ancienne dont les traits perdus avaient été rétablis par les chercheurs. Lorsque j’ai contacté le chercheur principal de cette étude, il m’a dirigé vers le premier auteur et leur partenaire de travail « Cicero Moraes », un designer brésilien spécialisé en modélisation 3D. Il m’a alors détaillé les aspects scientifiques de leur travail, ce qui m’a fait réaliser que cette tâche va bien au-delà de simples logiciels.</p>
<p>Je n’ai pas hésité à solliciter une interview avec lui pour mieux comprendre cette profession. À ma surprise, pendant les préparatifs, j’ai découvert que Moraes était derrière de nombreuses réalisations scientifiques médiatisées ces dernières années, comme la reconstitution du visage du [pharaon Toutankhamon](https://www.researchgate.net/publication/371120172_Pharaoh_Tutankhamun_a_novel_3D_digital_facial_approximation), la reconstitution du visage d’une [femme](https://ortogonline-com.translate.goog/doc/pt_br/OrtogOnLineMag/6/Zlaty.html?_x_tr_sch=http&_x_tr_sl=pt&_x_tr_tl=en&_x_tr_hl=pt-BR&_x_tr_pto=wapp) possiblement la plus ancienne à avoir marché sur Terre il y a 45 000 ans, et la production de la première [carapace imprimée en 3D](https://3dprint.com/84180/3d-printed-tortoise-shell-fred/) pour une tortue, un travail qui lui a valu une place dans le Guinness des records.</p>
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<h2>Entretien avec Cicero Moraes</h2>
<p>Nous avons posé 13 questions à Cicero Moraes sur les détails de son métier, qui dévoile les secrets du passé, lève le voile sur certains événements du présent et contribue à soulager les souffrances des humains et des créatures vivantes en participant à la planification des interventions chirurgicales et à l’impression 3D d’organes et de membres perdus.</p>

<p><b>Quel est votre parcours académique et scientifique qui vous a qualifié pour ce travail ?</b></p>
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<li>J’ai obtenu un diplôme en marketing, appris le dessin informatique en autodidacte et étudié les bases de l’anatomie. Aujourd’hui, je participe à de nombreuses recherches avec des équipes internationales en lien avec des universités.</li>
</ul>

<p><b>Qu’est-ce qui vous a attiré dans le design 3D et la reconstitution faciale ?</b></p>
<ul>
<li>En 2011, lors d’un cambriolage à domicile, j’ai affronté deux cambrioleurs armés sans être armé moi-même, et j’ai reçu une balle dans la tête. Bien que je m’en sois sorti sans blessure grave, cet incident a développé une anxiété aiguë et une dépression. Pour combattre ces sentiments, j’ai commencé à étudier la reconstitution faciale légale, ce qui m’a aidé à surmonter et à me rétablir entièrement.</li>
</ul>
<p><b>Comment avez-vous rejoint le domaine de la reconstitution de visages de momies anciennes et de fossiles biologiques ?</b></p>
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<li>Dès le début de mes études, j’étais intéressé par la reconstitution des momies, en particulier celles liées à l’Égypte ancienne, un domaine grandement apprécié et étudié par les archéologues. Le même intérêt s’applique aux fossiles, car la présentation d’un visage augmente l’intérêt des visiteurs des musées et des lecteurs sur les sites internet, ce qui peut même engendrer de nouveaux archéologues ou historiens.</li>
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<p><b>Quels sont les défis principaux que vous rencontrez lors de la reconstitution des visages à partir de restes anciens ou de fossiles ?</b></p>
<ul>
<li>Les défis principaux sont structurels, comme des parties du crâne manquantes, un crâne totalement brisé, ou le besoin de trouver des données d’un homologue moderne ou d’un animal similaire pour reconstruire un être vivant éteint. Nous résolvons ces défis à travers l’étude anatomique et partageons les résultats via des publications pour permettre à d’autres de répliquer la technique.</li>
</ul>
<p><b>Quelles sont les étapes de la reconstitution faciale, de la collecte des données initiales au modèle final en 3D ?</b></p>
<ul>
<li>La première étape consiste à scanner le crâne via tomodensitométrie ou scanner laser, puis utiliser les données recueillies des vivants par diverses méthodes (mesure extérieure, ultrason, tomodensitométrie) pour modéliser approximativement le visage. Je préfère d’ailleurs nommer ce processus « approximation faciale légale » plutôt que reconstitution faciale.</li>
</ul>

<p><b>Comment garantissez-vous l’exactitude de vos reconstitutions, surtout avec des données limitées ou fragmentées ?</b></p>
<ul>
<li>La précision est primordiale quand nous travaillons sur des crânes complets. Cependant, en cas de structures manquantes, nous devons faire des prévisions basées sur d’autres études de crânes similaires, même si l’obtention d’une précision complète est très difficile en raison des parties manquantes.</li>
</ul>

<p><b>Quels sont les projets majeurs sur lesquels vous avez travaillé au cours de votre carrière ?</b></p>
<ul>
<li>Parmi mes réalisations notables : reconstituer le visage de la [femme](https://www.livescience.com/archaeology/see-stunning-likeness-of-zlaty-kun-the-oldest-modern-human-to-be-genetically-sequenced) probablement la plus ancienne à avoir marché sur Terre il y a 45 000 ans, et le visage du [pharaon Toutankhamon](https://www.livescience.com/archaeology/ancient-egyptians/king-tuts-likeness-revealed-in-vivid-new-facial-approximation-of-ancient-egyptian-pharaoh). Nous avons aussi produit la première carapace de tortue imprimée en 3D, enregistrée au [Guinness](https://www.guinnessworldrecords.com/world-records/631259-first-3d-printed-tortoise-shell) des records. Ces avancées participent également à la planification chirurgicale, même si elles ne sont pas médiatisées, elles aident grandement les gens, ce qui me rend très fier.</li>
</ul>

<p><b>Quelle est la contribution des reconstitutions faciales à la compréhension de l’histoire et de la culture humaine ?</b></p>
<ul>
<li>Les approximations faciales permettent de donner un visage aux restes humains, suscitant l’intérêt du grand public tout en offrant une opportunité d’examiner des traits uniques ou moins étudiés. Par exemple, la reconstitution du visage d’une [jeune femme](https://www.livescience.com/syphilis-facial-reconstruction-iceland) du XVIe siècle atteinte de la syphilis tertiaire nous a permis de sensibiliser à cette maladie quasiment oubliée, en utilisant cette reconstitution comme outil pédagogique pour la population.</li>
</ul>
<p><b>Enfin, avez-vous des conseils pour les aspirants designers 3D ou ceux intéressés par la reconstitution faciale et l’archéologie numérique ?</b></p>
<ul>
<li>Il existe aujourd’hui une énorme quantité de matériel éducatif en ligne sur la modélisation 3D et l’approximation faciale. Avec de la volonté, de l’effort et du désir, on peut maîtriser ces techniques. De nombreux étudiants suivent ce parcours à travers mes cours et les publications que nous mettons à disposition, montrant que tout est une question de temps et de détermination.</li>
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