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Antonio Hodgers : Bilan et Démission du Ministre Genevois

by Sara
Antonio Hodgers : Bilan et Démission du Ministre Genevois
Suisse

Antonio Hodgers, ministre du Territoire de Genève depuis 2013, a décidé de démissionner en plein milieu de sa troisième législature, marquant la fin d’un parcours politique marqué par des succès, des controverses et une vision ambitieuse pour le canton.

Un départ inattendu dans un contexte tendu

La démission surprise d’Antonio Hodgers reflète bien sa personnalité complexe. Surnommé « wonderboy » de la politique genevoise et réputé pour son franc-parler, il quitte ses fonctions alors que sa popularité est mise à rude épreuve. Depuis l’affaire Fischer, qui a entaché son département à cause de mandats attribués sans appels d’offres, jusqu’aux revers électoraux et aux tensions politiques, le ministre semblait avoir perdu une part de sa passion initiale.

Contesté par la droite au Grand Conseil, il a souvent dû batailler pour faire passer ses projets, ce qui l’a visiblement usé. Cette démission intervient donc après plusieurs années d’une lutte politique intense et parfois conflictuelle.

Un parcours migratoire hors norme

Né à Buenos Aires dans une famille d’opposants marxistes-léninistes à la dictature argentine, Antonio Hodgers a connu une enfance difficile : son père a été assassiné par la junte peu après sa naissance, tandis que sa mère a été emprisonnée et torturée avant de fuir vers la Suisse en 1981 avec ses enfants. Naturalisé suisse en 1990, il est le premier conseiller d’État genevois à démontrer qu’un tel parcours migratoire peut mener aux plus hautes fonctions politiques en Suisse.

Engagé d’abord dans l’humanitaire, il débute sa carrière politique en 1993 au Parlement des jeunes de Meyrin, où il défend le droit de vote des étrangers avec l’initiative «J’y vis, j’y vote». Élu plus jeune député au Grand Conseil en 1997, puis président des Verts genevois, il accède au Conseil national en 2007 avant d’être élu au Conseil d’État genevois en 2013.

Une personnalité haute en couleur et une ambition assumée

Vif, éloquent et parfois impulsif, Antonio Hodgers s’est imposé rapidement comme une figure forte du gouvernement genevois. Sa rivalité avec Pierre Maudet, ex-camarade du Parlement des jeunes, illustre son franc-parler et sa combativité. Souvent direct, voire agressif, il n’a jamais hésité à défendre ses positions avec véhémence.

En 2019, il suscite l’attention en évoquant une possible candidature au Conseil fédéral, signe de sa grande ambition politique. Toutefois, malgré ses grandes idées, il a été critiqué pour un manque d’assiduité aux séances parlementaires, convaincu que l’essentiel de l’action politique se joue ailleurs.

Des projets ambitieux mais des revers notables

Sous son impulsion, Genève a vu naître en 2020 un nouveau plan directeur de l’énergie et, en 2021, un plan climat ambitieux. Mais dès 2023, il subit un échec : la loi cantonale sur l’énergie est adoptée avec une modification contre son avis, et il est accusé d’avoir menacé deux députés agricoles, ce qui dégrade le climat politique.

Malgré ces difficultés, il réussit à faire adopter un nouveau projet de loi climat visant la neutralité carbone d’ici 2050, fruit d’un compromis entre différentes forces politiques.

« Betonio » et le développement urbain maîtrisé

Antonio Hodgers est surnommé « Betonio » à cause de son implication dans le développement urbain de Genève. Bien qu’il ne soit pas à l’origine de plusieurs grands projets de quartiers, il en a soutenu la réalisation, à l’image de la Chapelle Les Sciex, des communaux d’Ambilly, des Esserts ou du quartier de l’Étang.

Reconnaissant en 2024 que la densification n’a progressé que de 1% sur les 11% espérés, il reste toutefois ambitieux pour 2050. Il parvient également à un accord avec la droite et les milieux immobiliers pour renforcer la rénovation énergétique des bâtiments.

Sur le Plan d’Aménagement et de Valorisation (PAV), il accélère les démarches tout en protégeant la zone agricole, notamment à Bernex où il obtient une réduction de 30% de l’emprise du déclassement.

Parmi ses réussites, la convention d’objectifs signée avec les Services Industriels de Genève (SIG) en 2021 et la loi qui accorde aux SIG le monopole sur les réseaux thermiques structurants, adoptée par une large majorité lors d’une votation populaire.

Échecs, critiques et tensions croissantes

Depuis son troisième mandat, les difficultés s’accumulent. La droite critique vivement sa Vision territoriale transfrontalière et le débat s’envenime autour des réseaux thermiques structurants, jugés trop chers par certains usagers.

Un autre sujet polémique récent est le coût de la patinoire du Trèfle-Blanc, dont le budget a doublé, mettant le ministre en difficulté.

Par ailleurs, ses relations avec son propre parti sont parfois tendues. Il se distingue du dogmatisme croissant autour d’enjeux identitaires et environnementaux, prônant plutôt « l’écologie de l’espoir », un manifeste qu’il a publié en 2023 et dans lequel il critique les logiques d’interdiction et de culpabilisation.

Dans son blog personnel, il exprime régulièrement des opinions plus libres que celles attendues d’un ministre écologiste, ce qui souligne sa singularité politique.

Une fin de mandat à son image

Antonio Hodgers n’aura pas été un conseiller d’État ordinaire. Sa démission fracassante, inattendue et libre reflète son parcours hors normes, marqué par une volonté farouche de laisser une marque durable sur Genève, malgré les obstacles et les critiques.

source:https://www.lemanbleu.ch/fr/Actualites/Geneve/Antonio-Hodgers-ou-l-itineraire-chahute-d-une-forte-tete.html

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