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La violence à l’égard des soignants est un sujet de préoccupation croissant au sein des établissements de santé. Une analyse des données récentes révèle des tensions persistantes entre les patients et le personnel médical, et les espaces de médiation des hôpitaux jouent un rôle essentiel dans la compréhension de ces conflits.
Une hausse alarmante des violences
Les violences commises contre le personnel soignant sont en augmentation. Au CHUV, en 2024, un total de 362 incidents a été enregistré, contre 266 en 2023, soit une hausse de 36 %. La majorité de ces incidents (41 % en 2024) sont des insultes, des comportements perturbateurs ainsi que des propos diffamatoires.
À Genève, les HUG ont observé une baisse de 3,6 % entre 2023 et 2024, avec le nombre d’interventions des agents de sécurité passant de 5318 à 5125. Cependant, la nécessité d’utiliser la contrainte physique a augmenté, de 899 cas en 2023 à 954 en 2024, soit une hausse de 6 %. Les chiffres varient considérablement selon les hôpitaux, chaque établissement ayant son propre système d’enregistrement des incidents.
Des données précieuses issues de la médiation
Depuis 2012, le CHUV a ouvert un espace de médiation pour accueillir des patients et leurs proches en cas de conflit avec le personnel soignant. Bien que ce service ne traite pas directement les cas de violence, il permet de recueillir des données sur les causes des tensions au sein de l’hôpital. Béatrice Schaad, directrice du Centre sur le vécu des patients, souligne que les plaintes des patients et de leurs proches révèlent des problèmes récurrents.
Une incivilité en augmentation
Le système de santé suisse pourrait expliquer cette montée de la violence. «Nous sommes dans un système de rémunération très spécifique, où les gens relient souvent la prime qu’ils paient et les soins qu’ils souhaitent recevoir», explique Béatrice Schaad. Elle note une incivilité croissante dans la société, visible même dans d’autres institutions comme les écoles, et souligne que la violence ne devrait pas avoir sa place dans les hôpitaux.
Elle évoque également une «culture du résultat» où les attentes des patients peuvent créer des tensions face à la réalité des soins médicaux. Les plaintes, telles que «J’aimerais que vous me rendiez mon mari comme avant», reflètent cette pression.
Un espace de médiation actif
Au CHUV, l’espace de médiation recueille également des témoignages de professionnels de santé. Depuis 2016, des soignants ont commencé à faire part de leurs difficultés face à des patients, une démarche qui restait auparavant taboue. Béatrice Schaad mentionne l’endurance du personnel face à la souffrance et la peur de signaler des incidents, souvent perçus comme un manque de professionnalisme.
Aux HUG, l’espace de médiation, ouvert en 2007, a connu une augmentation de sa fréquentation avec 925 situations traitées en 2024, contre 883 en 2023. Les témoignages des patients aident à identifier les causes des conflits.
Des attentes longues et stressantes
Corinne Héritier-Castella, médiatrice hospitalière, souligne que «Personne ne vient de bon cœur à l’hôpital». Les longs temps d’attente peuvent engendrer de la frustration, surtout lorsque les patients ne comprennent pas les raisons de ce délai. Cette situation est exacerbée dans les cas d’attente pour des examens ou des résultats.
Cependant, malgré le nombre élevé de patients pris en charge chaque année, les cas de violence restent minoritaires. En 2023, le CHUV a traité 79 545 urgences et 53 964 patients hospitalisés, tandis que seulement 266 cas de violence ont été enregistrés, et l’espace de médiation a été sollicité 539 fois.