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Les étudiants internationaux au Canada : atout ou défi économique ?

by Sara
Canada

Les étudiants internationaux au Canada : atout ou défi économique ?

Le Canada a connu une augmentation significative du nombre d’étudiants étrangers, avec environ 560 000 permis d’études délivrés en 2023 seulement. Ce secteur a considérablement contribué à l’économie nationale, ajoutant près de 31 milliards de dollars et soutenant plus de 360 000 emplois. Cependant, ces bénéfices ne sont pas sans coûts.

Ce développement rapide a engendré des défis complexes, notamment la pression sur le secteur du logement et le marché du travail, ainsi que des préoccupations croissantes concernant l’intégrité de certaines institutions éducatives dans ce domaine.

En conséquence, ce dossier est passé d’une source de revenus importante pour le gouvernement canadien à une problématique multidimensionnelle représentant un défi majeur et un facteur influençant sa popularité.

University of Toronto campus with University College building, built circa 1850

Pourquoi les étudiants internationaux choisissent-ils le Canada ?

Le Canada se positionne comme une destination mondiale de premier plan pour les étudiants internationaux, rivalisant avec des pays leaders dans ce secteur tels que les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie. Parmi les nombreux atouts, la qualité de l’éducation et la réputation académique élevée se distinguent.

Selon le classement QS des universités mondiales de 2025, l’Université de Toronto se classe au 25e rang des meilleures universités mondiales, suivie par l’Université McGill au 29e rang, avec les Universités de la Colombie-Britannique, d’Alberta et de Waterloo également bien positionnées.

Un autre avantage qui attire les étudiants au Canada est le coût raisonnable des frais de scolarité, qui varient généralement de 11 000 à 59 000 dollars, selon le type d’études et leur localisation, s’avérant attractifs comparés à d’autres pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie.

De plus, le Canada offre à ses diplômés internationaux la possibilité de travailler après l’obtention de leur diplôme grâce au Programme de permis de travail post-diplôme (PGWP), permettant aux étudiants d’acquérir de l’expérience professionnelle. Pour beaucoup, cette formation ouvre la voie à une demande de résidence permanente via des programmes tels que le Système d’Entrée Express.

Des villes comme Toronto, Vancouver et Montréal offrent un environnement accueillant pour les étudiants de différentes cultures, soutenu par des politiques canadiennes promouvant la diversité et l’ouverture, facilitant ainsi l’intégration des étudiants internationaux dans la société.

Enfin, le Canada est l’un des pays les plus sûrs au monde, offrant un niveau de vie élevé, ce qui en fait l’un des choix privilégiés pour les étudiants à la recherche d’un cadre éducatif sûr et stable.

Graduation ceremony at Yukon University

L’importance des étudiants internationaux pour le Canada

Avec l’augmentation de leur nombre, les étudiants internationaux sont devenus une source importante de revenus pour le trésor canadien. Un rapport publié par le ministère des Affaires mondiales du Canada indique que ces étudiants et leurs familles ont contribué à hauteur de 37,3 milliards de dollars aux dépenses annuelles en 2022, entraînant une augmentation de 30,9 milliards de dollars du PIB canadien, soit 1,2 % du PIB national.

En outre, les dépenses des étudiants internationaux ont soutenu près de 361 230 emplois à travers le Canada, ce qui équivaut à 246 310 emplois à temps plein, générant 7,4 milliards de dollars de recettes fiscales, confirmant leur rôle vital dans l’économie canadienne. En 2022, les services de l’éducation internationale représentaient 23,1 % des exportations totales de services et 5,1 % des exportations totales de biens.

Les étudiants internationaux jouent également un rôle essentiel en fournissant une main-d’œuvre nécessaire sur le marché canadien, contribuant à atténuer la pénurie de travailleurs dans des secteurs tels que la construction, la fabrication et l’agriculture, tout en représentant un réservoir de talents hautement qualifiés, notamment en ingénierie et en informatique, où leur nombre dépasse celui des étudiants locaux.

La part des étudiants internationaux travaillant pendant leurs études a considérablement augmenté, passant de 7 % en 2000 à 57 % en 2018. Pendant la période de reprise économique post-COVID, ces étudiants ont été cruciaux pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre, et après que le gouvernement a relevé la limite de travail à 20 heures pour les étudiants internationaux, plus de 500 200 d’entre eux ont intégré le marché du travail.

Economics lecture at York University

Comment le nombre d’étudiants internationaux a-t-il augmenté ?

Le nombre d’étudiants internationaux inscrits dans les établissements d’enseignement supérieur canadiens a augmenté régulièrement au cours des deux dernières décennies, dépassant le nombre d’étudiants canadiens. En 2016-2017, le total des étudiants internationaux atteignait 245 895, représentant 12,0 % de l’ensemble des inscrits.

Ce chiffre a ensuite crû pour atteindre 637 855 en 2019, alors qu’il a connu une forte augmentation au cours des trois années suivantes, atteignant 807 260 en 2022. À la fin de l’année suivante, le nombre d’étudiants internationaux a dépassé le million, atteignant 1 028 850 avec des permis d’études valides.

Concernant les pays d’origine, on constate une augmentation remarquable du nombre d’étudiants indiens venant au Canada. En 2016, ils occupaient la deuxième place derrière leurs homologues chinois, avec 67 320 contre 131 830. En 2023, leur nombre a grimpé à 278 250, représentant 40,7 % du total des étudiants internationaux cette année-là.

McGill University Open Doors event

Des revenus élevés

L’augmentation du nombre d’étudiants a également creusé l’écart entre les frais payés par les étudiants étrangers et ceux des étudiants locaux au cours des deux dernières décennies. Par exemple, en 2002, un étudiant international en première année d’études en arts et sciences humaines à l’Université Western payait 9 300 dollars, tandis qu’un étudiant local ne payait que 4 000 dollars. En 2023, les frais pour les étudiants internationaux dans le même programme ont grimpé à 42 233 dollars, comparativement à une augmentation modeste pour les étudiants locaux, qui ont vu leurs frais passer à 6 050 dollars.

Ces chiffres ont suscité des critiques selon lesquelles ces étudiants deviennent une « vache à lait » pour les établissements d’enseignement, qui privilégient la génération de revenus au détriment de leur réussite académique et de leur bien-être, accompagnés de plaintes continues concernant les conditions de vie de ces étudiants.

Une étude gouvernementale canadienne a révélé que entre 25 % et 63 % des étudiants internationaux dans les grandes municipalités canadiennes vivent dans des logements inappropriés, comparativement à des taux inférieurs de 13 à 45 % pour les étudiants nés au Canada.

Businessman analyzing investment charts

Un passage de ressource à défi

Par ailleurs, l’augmentation massive du nombre d’étudiants internationaux au Canada a eu des effets négatifs dans plusieurs domaines, y compris le logement. La nécessité pour de nombreux étudiants de trouver un logement près des universités a conduit à une demande accrue pour les unités de logement louées, ce qui a contribué à l’augmentation des loyers et à la baisse de la disponibilité du logement pour les résidents locaux.

De plus, la volonté de nombreux étudiants de louer des appartements partagés ou des unités de logement dans les sous-sols a créé des difficultés pour les Canadiens à faible revenu et les nouveaux immigrants cherchant ces logements qui étaient traditionnellement leur refuge.

Dans ce contexte, certains propriétaires préfèrent louer leurs biens aux étudiants internationaux avec des contrats à court terme, leur permettant de facturer des loyers plus élevés et d’éviter les lois de protection des locataires, ce qui a également eu un impact négatif sur la disponibilité de logements stables pour les familles locales.

Tout cela a poussé l’Agence canadienne d’hypothèques et de logement à affirmer dans ses rapports que l’augmentation du nombre d’étudiants internationaux a été l’un des facteurs ayant contribué à l’aggravation de la crise du logement.

Par ailleurs, des centaines de milliers d’étudiants internationaux ont également provoqué une saturation du marché du travail et une concurrence accrue pour les emplois, de nombreux étudiants travaillant à temps partiel pendant leurs études, ce qui a intensifié la compétition pour les emplois de compétence intermédiaire et débutante, rendant plus difficile pour les Canadiens, notamment les jeunes, de trouver des opportunités d’emploi.

Des rapports indiquent que certains employeurs dans des secteurs tels que le commerce de détail, l’hôtellerie et les services alimentaires choisissent d’embaucher des étudiants internationaux car ils sont plus disposés à accepter des salaires plus bas, ce qui suscite des inquiétudes quant à l’exploitation de la main-d’œuvre bon marché, entraînant une baisse générale des salaires, certains étudiants devant travailler pour des salaires inférieurs au minimum légal ou dans des conditions illégales.

Students arriving at the UBC Vancouver campus

Corruption organisée

En outre, certains chercheurs soulignent que ces étudiants sont exposés à l’exploitation sur le marché du travail, car la limite imposée par le gouvernement de 24 heures de travail par semaine pousse les étudiants vers l’économie informelle pour faire face à la hausse des coûts de la vie, les rendant vulnérables à l’exploitation par des employeurs peu scrupuleux.

Un autre aspect de l’exploitation des ambitions de ces étudiants a été révélé en 2023 et 2024, lorsque de nombreux étudiants internationaux, notamment d’Inde, sont entrés au Canada avec des lettres d’acceptation falsifiées fournies par des agents éducatifs peu fiables dans leurs pays. Certains de ces étudiants n’étaient pas au courant que leurs documents étaient frauduleux, les exposant au risque d’expulsion une fois la fraude découverte.

Cette affaire a suscité une grande attention médiatique à l’époque, incitant le gouvernement à examiner individuellement les dossiers des étudiants concernés avant de prendre des décisions d’expulsion.

Canadian consular officer giving passport

Mesures gouvernementales

Face à un « système devenu incontrôlable », selon les mots du ministre de l’immigration, Mike Miller, le gouvernement canadien a pris plusieurs mesures pour contenir les aspects négatifs liés à l’augmentation du nombre d’étudiants internationaux dans le pays.

Dans ce cadre, le gouvernement a fixé un plafond de 360 000 permis d’études pour 2024, soit une baisse de 35 % par rapport à l’année précédente, tandis que Miller a prévu que les changements gouvernementaux entraîneraient une réduction d’environ 300 000 permis d’études au cours des trois prochaines années.

Afin de lutter contre la fraude dans les demandes de visa, le gouvernement a imposé que toute demande de permis d’études soit accompagnée d’une lettre de validation émise par la province où l’étudiant étudiera, garantissant que les étudiants acceptés relèvent du quota provincial établi.

Le gouvernement a également contraint les institutions éducatives à vérifier l’authenticité des lettres d’acceptation et a imposé de strictes sanctions aux établissements ne respectant pas ces exigences, comme leur interdiction d’accepter de nouveaux étudiants internationaux pendant une période pouvant aller jusqu’à un an.

Students crossing a bridge to the University of Western Ontario

Le revers de la médaille

Le gouvernement souhaitait tirer parti de ces mesures, car limiter le flux d’étudiants internationaux devrait avoir un impact positif sur le marché du logement, en particulier dans les grandes villes, ainsi que contribuer à alléger la pression sur les services et à freiner les pratiques d’institutions peu scrupuleuses qui profitent des frais de scolarité élevés tout en offrant une éducation de mauvaise qualité, selon le ministre de l’immigration, Mike Miller.

Cependant, cela ne représente qu’un aspect de la réalité, car ces changements ont eu des conséquences sur plusieurs niveaux, certaines rapports indiquant qu’ils ont rendu le Canada moins attractif pour les étudiants internationaux, qui commencent à se tourner vers d’autres destinations.

Les établissements d’enseignement dépendant des étudiants internationaux sont les plus touchés par ces mesures, avec des universités en Ontario qui devraient subir des pertes financières d’environ un milliard de dollars canadiens, tandis que les pertes dans la région de l’Atlantique sont estimées à environ 163 millions de dollars canadiens.

Ces pertes ont automatiquement conduit certaines universités à fermer des programmes académiques et à licencier du personnel, amenant les universités à demander au gouvernement de revoir ces politiques. Certaines provinces, comme l’Ontario, ont annoncé un plan de soutien financier de 1,2 milliard de dollars sur trois ans pour aider les universités à faire face à leurs pertes financières.

À l’avenir, le gouvernement fédéral pourrait se voir contraint de modifier ses politiques pour éviter les effets négatifs sur le secteur de l’enseignement supérieur et le marché du travail, garantissant ainsi un équilibre entre la régulation de l’immigration et la préservation des avantages économiques et éducatifs des étudiants internationaux.

source:https://www.aljazeera.net/politics/2025/3/4/%d8%a7%d9%84%d8%af%d8%b1%d8%a7%d8%b3%d8%a9-%d9%81%d9%8a-%d9%83%d9%86%d8%af%d8%a7-%d8%a7%d9%84%d8%b7%d9%84%d8%a7%d8%a8-%d8%a7%d9%84%d8%af%d9%88%d9%84%d9%8a%d9%88%d9%86-%d9%85%d9%86

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