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Conflit sur les rives du Nil : des institutions en alerte en Égypte
Le Caire – Une décision récemment prise par le « Service des projets fonciers des armées » en Égypte a suscité une grande colère et un mécontentement généralisé. Ce service a annoncé l’annulation des contrats de droit d’usage pour plusieurs organismes et institutions gouvernementales, qui font partie intégrante du tissu judiciaire, culturel et éducatif du Caire, le long des rives du Nil.
Ce choix inattendu, motivé par des directives présidentielles, ouvre la voie à l’évacuation de locaux judiciaires, culturels, éducatifs et récréatifs, qui sont ancrés dans l’histoire de la ville légendaire sur une bande fluviale s’étendant sur plus de 30 kilomètres, du nord au sud de la capitale.
Les répercussions de la décision
Les institutions touchées, telles que le Club des juges du Conseil d’État, le Club des conseillers de l’administration, l’École de tourisme et d’hôtellerie de l’Université de Helwan, ainsi que le jardin Om Kalthoum et le théâtre flottant sous l’égide du ministère de la Culture, considèrent cette décision comme un coup dur porté à des décennies de patrimoine.
Pour l’heure, ces institutions n’ont pas encore répondu aux lettres leur demandant de remettre les terrains, y compris les bâtiments qui s’y trouvent, à la commission conjointe composée du Service des projets fonciers et de la gestion de la protection du Nil au ministère de l’Irrigation, lançant un appel au président de la République pour intervenir et stopper cette décision.
Réactions gouvernementales et discussions en cours
Jusqu’à présent, le gouvernement n’a pas fait de commentaire, mais a signalé dans un communiqué du Conseil des ministres, publié mardi dernier, qu’une réunion avait eu lieu, présidée par le ministre des Ressources en eau et de l’Irrigation, en présence du ministre du Tourisme et des Antiquités, ainsi que du directeur général du Service des projets fonciers, pour examiner les procédures relatives aux terrains le long du fleuve, de Shubra à Helwan.
Au cours de cette réunion, il a été question de respecter toutes les normes techniques pour préserver le secteur hydraulique du fleuve, protéger ses rives et maintenir les investissements en conformité avec les réglementations en vigueur.
Le transfert de la gestion des terrains au Service des projets de l’armée
La gestion des terrains le long du Nil à La Grande-Caire a été transférée au Service des projets fonciers des armées depuis la publication du décret n° 2637 de 2020. Un protocole a été signé avec le ministère de l’Irrigation pour gérer ces terres et tirer parti des étendues d’eau à l’est et à l’ouest du Nil, de Shubra à Helwan.
Depuis, le Service des projets des armées a mis plusieurs de ces terrains en vente aux enchères pour des investissements touristiques et commerciaux.
Un refus grandissant parmi les institutions concernées
Au fil du temps, le rejet de l’exécution de ces lettres d’annulation et d’évacuation s’est élargi. Un conseiller de l’administration a déclaré qu’il y avait « un vaste refus concernant la décision d’évacuer et de remettre les locaux de la justice sur les rives du Nil ».
Ce conseiller, qui a souhaité garder l’anonymat, a déclaré à Al Jazeera Net que cette décision était inattendue, suscitant la colère des membres de l’autorité judiciaire et soulevant des questions quant aux raisons de cette demande de remise des bâtiments au Service des armées, privant des milliers de membres de leurs installations et des services qu’ils offrent.
Un conflit historique en perspective
Ces lieux sont souvent les seuls espaces pour la majorité des institutions concernées, représentant des aspects sociaux, éducatifs et récréatifs essentiels. Le vice-président du Conseil d’État a souligné que le refus du président du Club des juges de remettre le club à la commission conjointe est la première étape d’un long conflit, mais finalement, il n’a d’autre choix que de se conformer, car ces terrains sont des « droits d’usage et non des propriétés ».
Il est anticipé que l’évacuation sera reportée, mais non annulée, avec la certitude que toute exception pour les institutions judiciaires ouvrirait la voie à des demandes similaires, compliquant les efforts du Service des projets fonciers des armées pour récupérer tous les terrains.
Réactions parlementaires
Au niveau parlementaire, la membre du Conseil populaire, Maha Abdel Nasser, a indiqué avoir soumis une demande d’interpellation au Premier ministre, au ministre de l’Enseignement supérieur et à celui de la Culture, concernant l’annulation et le non-renouvellement des contrats d’usage pour tous les terrains du fleuve s’étendant de Shubra à Helwan.
Elle a souligné que cette question ne concerne pas seulement des aspects juridiques, mais qu’il existe également des dimensions historiques, sociales et culturelles qui doivent être prises en compte dans le traitement des institutions ayant une réputation et un héritage établis.
Conséquences économiques
Du point de vue économique, l’analyste en économie politique, Mustafa Youssef, a exprimé son avis selon lequel « l’objectif principal de cette démarche est d’investir dans ces zones, en raison de leur emplacement stratégique sur les rives du Nil, et de tirer parti de ces terrains en les proposant à des investisseurs locaux ou étrangers ».
Il a noté que les objectifs d’investissement du gouvernement égyptien, dans le contexte actuel de crise économique, prennent le pas sur d’autres considérations sociales ou de développement, cherchant à renforcer ses ressources en devises étrangères par tous les moyens possibles, même si cela implique la vente ou la location d’actifs souverains ou de projets vitaux.