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La situation autour du lac Tchad est alarmante, marquée par une montée des eaux et une insécurité croissante alimentée par Boko Haram. Les conséquences de cette crise touchent de nombreux habitants, notamment les agriculteurs qui voient leurs terres englouties par l’eau. Mahamat Mbomi, un agriculteur local, témoigne de la perte de ses récoltes : « Le sorgho, la pastèque, le melon… Tout est perdu. » Ce paysage, autrefois fertile, est désormais un symbole de désespoir.
Un lac en pleine expansion
« Il n’y avait pas eu d’eau ici depuis la mort de Tombalbaye ! », s’exclame Mahamat, en référence au premier président tchadien. Contrairement aux croyances passées, le lac Tchad ne s’assèche pas mais se remplit au contraire, aggravant la crise alimentaire et sécuritaire sur ses rives. Garmadji Sangar, responsable à la Sodelac, observe chaque jour cette montée des eaux à la station hydrologique de Bol. Malheureusement, l’échelle de crue est hors d’usage, et M. Sangar exprime son inquiétude face aux résultats alarmants de ses observations.
Une hausse préoccupante de 11 cm
Les données recueillies indiquent une augmentation du niveau du lac de 11 cm par rapport à l’an dernier. Florence Sylvestre, paléoclimatologue, souligne l’importance de cette hausse : « C’est énorme ! On n’avait pas vu ça depuis les années 1960. » Les sécheresses des décennies précédentes avaient entraîné une réduction drastique de la superficie du lac, qui avait perdu jusqu’à 90 % de sa taille dans les années 1990.
Conflits et insécurité
La situation ne fait qu’empirer. Les éleveurs perdent leurs pâturages, et les conflits fonciers explosent alors que les terres agricoles disparaissent. Mahamat Alhadji Adam, armé d’une lance, garde un œil vigilant sur sa propriété. Il souligne que les tensions entre agriculteurs et éleveurs se sont intensifiées, rendant la vie quotidienne de plus en plus difficile.
La menace de Boko Haram
Les attaques de Boko Haram ajoutent une autre couche de complexité à cette crise. Dans le village de Kiskawa Dine, Mahamat Abakar Sidick raconte comment les djihadistes ont pris possession de son ancien domicile après que lui et sa communauté ont été contraints de fuir. « Les soldats tchadiens contrôlent la terre, mais les terroristes règnent sur l’eau », déclare-t-il, soulignant l’ironie tragique de sa situation.
Impact sur la pêche
La sécurité précaire force les pêcheurs à se limiter aux zones proches des villages, faisant grimper les prix du poisson. Aristide Badoum, responsable de programme pour l’ONG Concern, constate une multiplication par cinq du prix du poisson. Cette hausse est le résultat direct de l’insécurité et des effets du changement climatique.
Innovations pour l’avenir
Malgré ces défis, des initiatives émergent. Adam Tielou, cheffe d’un groupement de femmes mareyeuses, mise sur la transformation du poisson pour faire face à la raréfaction des ressources. « Une partie pour vendre frais, une autre pour fumer ! », explique une des travailleuses, soulignant l’importance de l’innovation dans un contexte difficile. De plus, un système d’irrigation solaire a été introduit pour améliorer les cultures dans un environnement de plus en plus irrégulier.
Le potentiel du lac
Les efforts de développement agricole continuent, avec des projets de polders et d’irrigation qui montrent un potentiel prometteur. Le chef du village de Mane évoque des cultures de gombo qui émergent malgré les inondations, un signe d’espoir dans cette lutte contre le changement climatique. « Voilà qui donne une idée du potentiel agricole de la région », conclut-il.