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Le ministère italien de l’Université et de la Recherche a adressé une mise en demeure à la société Royal Exor Srl pour usage illégal du sigle « Miur » sur son site proposant des formations en ligne pour l’« abilitazione al sostegno ». Cette mesure soulève un débat important sur la reconnaissance des formations à l’étranger et la réglementation des cours en ligne dans le secteur éducatif.
Une mise en demeure pour usage abusif du sigle Miur
Le ministère de l’Université et de la Recherche (Mur) a formellement demandé à Royal Exor Srl, qui propose via le site www.corsimiur.com des parcours pour l’« abilitazione al sostegno » et d’autres formations en ligne, de cesser d’utiliser le sigle « Miur ». Selon le ministère, cette appellation, qui correspondait autrefois au ministère de l’Éducation et de l’Université avant sa scission en Mim (Ministère de l’Éducation et du Mérite) et Mur, est utilisée de manière trompeuse, pouvant induire les utilisateurs en erreur quant à une validation officielle des formations.
La diffida (mise en demeure) a été envoyée suite à plusieurs vérifications des services du ministère. Royal Exor a accepté cette demande par l’intermédiaire de son cabinet juridique, et a modifié l’intitulé visible sur la page d’accueil de son site web, supprimant l’acronyme Miur pour « corsi iur.com », même si le sigle reste présent dans le nom de domaine.
Francesco Vergari, administrateur unique de Royal Exor, a expliqué : « Nous avions créé cette marque à l’époque où le Miur existait encore. Nous ne sommes pas d’accord avec la réclamation, mais nous allons nous y conformer. Nous ne cherchons pas à tromper qui que ce soit en nous présentant comme le Miur, mais simplement à identifier les cours que nous proposons en partenariat avec Keplero, qui est un organisme dûment habilité. »
Questions autour des formations et de leur validité
Le cas de Royal Exor a été soulevé récemment par Filippo Degasperi, conseiller de la Province autonome de Bolzano où la société est basée. Suite à des signalements, il a interrogé le ministère sur la reconnaissance des cours proposés et sur les coûts pratiqués, qui peuvent être élevés :
- Master en italien langue seconde à environ 890 € ;
- Trente crédits universitaires pour titulaires de classes de concours à 2 500 € ;
- Cours de perfectionnement en méthodologie CLIL à 500 € ;
- Et d’autres formations complémentaires.
Marco Galateo, chargé de l’éducation provinciale, a précisé que la société ne figure pas parmi les entités accréditées et reconnues par le Mim. L’administration scolaire locale ne connaissait pas non plus cette entreprise.
En réponse, Vergari a menacé de poursuites pour diffamation, affirmant que son activité repose sur un partenariat avec Keplero Education, un acteur majeur européen. Il a souligné qu’il n’a pas besoin d’accréditation pour exercer et que ses formations, délivrées en ligne, respectent la législation européenne, avec le soutien de l’université Nebrija de Madrid, un établissement privé reconnu officiellement en Espagne.
Par ailleurs, des vérifications ont révélé une incohérence quant à l’adresse de Royal Exor à Bolzano : l’entreprise était localisée dans une rue où personne ne semblait en avoir connaissance. Vergari a admis une erreur initiale dans la déclaration de l’adresse, désormais corrigée.
Un modèle de formation en ligne controversé
Royal Exor agit comme distributeur des formations Keplero, très prisées par de nombreux jeunes enseignants souhaitant obtenir une habilitation au soutien à l’étranger, avec un coût élevé. Ces formations peuvent être suivies totalement en ligne, évitant ainsi certains obstacles liés aux formations traditionnelles.
Le site corsimiur.com met à disposition plusieurs contacts pour informer les candidats et propose un entretien en visioconférence avant toute inscription. Selon la société, la formation, réalisée avec l’Université de Madrid, ne comporte pas d’examen préliminaire, dure six mois, et est entièrement numérique, de la théorie au stage pratique, sans obligation de présence physique. Le titre obtenu permettrait d’accéder en Italie à la première catégorie de concours pour le soutien scolaire. Le coût total est d’environ 5 500 €, payable en six mensualités, avec un acompte précisé par le conseiller pédagogique.
Formation au soutien : la reconnaissance des diplômes étrangers selon le ministère
Le Mur rappelle que, dans l’attente de la création de classes spécifiques d’habilitation et de la mise en place de parcours réglementés, la spécialisation pour le soutien scolaire des élèves en situation de handicap ne peut être obtenue qu’auprès des universités italiennes.
Le parcours universitaire comprend un stage et la validation de 60 crédits universitaires (CFU), avec un nombre de places fixé annuellement en fonction des besoins régionaux. Aucune autre institution publique ou privée n’est autorisée à délivrer des formations alternatives reconnues pour la spécialisation dans ce domaine.
Toutefois, le ministère ne dispose pas de liste officielle des organismes accrédités, ni de pouvoirs d’inspection pour contrôler ces formations.
Une problématique plus large pour le système éducatif italien
Giuseppe D’Aprile, secrétaire général de la Uil Scuola, a souligné la nécessité d’abandonner le numerus clausus dans les universités pour les formations spécialisées et d’adapter le nombre de places aux besoins territoriaux. Cela éviterait que des enseignants non qualifiés soient envoyés auprès d’élèves handicapés, ces enseignants devant souvent se tourner vers des formations à l’étranger, dans un contexte où la spéculation prospère.
Ces diplômes obtenus en Espagne, en Roumanie ou à Malte représentent un marché lucratif, avec des agences proposant des formations entièrement en ligne, dont les contenus et méthodes diffèrent largement de ceux des universités italiennes.
La présence de classes spéciales dans ces pays, abolies en Italie depuis 1977, illustre l’écart culturel et pédagogique avec le modèle inclusif italien. Selon la Uil, plus de 12 000 demandes de reconnaissance de diplômes étrangers ont été déposées auprès du ministère italien, dont environ 10 000 sont encore en attente de traitement.
Sanctions et mesures récentes du ministère italien
Grâce au Ministre Valditara, ces diplômes ont récemment bénéficié d’une reconnaissance accrue : les titulaires peuvent s’inscrire aux listes d’aptitude et signer des contrats de suppléance même en attente de validation officielle. Le décret-loi n° 71/2024 a lancé une véritable régularisation, offrant un accès sans sélection à des cours de spécialisation entièrement en ligne, validés en quatre mois.
Giuseppe D’Aprile alerte cependant sur la baisse de qualité de ces formations à distance par rapport aux cursus traditionnels du Tfa, qui comprennent 60 crédits universitaires, des enseignements en présentiel, des ateliers et plus de 150 heures de stage en classe. Il met en garde contre les risques pour les élèves et pour l’école elle-même.