Les autorités françaises et les acteurs associatifs se mobilisent pour mieux comprendre la réalité des personnes sans domicile en France, un enjeu social majeur dont l’ampleur demeure encore difficile à cerner précisément. Des études inédites, menées par l’Insee en collaboration avec la Drees, visent à dresser un portrait plus fidèle de cette population vulnérable. La première phase de ces enquêtes qualitatives et quantitatives a déjà permis d’identifier près de 100 agglomérations où plus de 4 000 visites ont été réalisées auprès de personnes de plus de 16 ans, fréquentant des structures d’aide ou se trouvant dans la rue.
Une démarche d’étude en évolution pour mieux cibler la réalité
Les nouvelles études, lancées en mars dernier, voient leur premier rapport attendu en fin d’année 2026. Leur objectif principal n’est pas un recensement exhaustif, mais une investigation approfondie sur les profils, les conditions de vie et les parcours des personnes sans domicile. Thomas Lellouch, directeur du projet à l’Insee, insiste : « Au-delà des chiffres, nous cherchons à comprendre les mécanismes d’exclusion et les facteurs de précarité ».
Depuis 2012, la méthode d’enquête a considérablement évolué, intégrant notamment l’utilisation d’outils numériques et de questionnaires traduits en plusieurs langues, facilitant l’accès à une population plus diversifiée. La collecte de données s’étend aussi bien aux personnes en situation de rue qu’à celles hébergées dans divers dispositifs comme les centres d’hébergement, hôtels ou logements sociaux. En 2012, le dernier chiffre officiel disponible indiquait 143 000 personnes sans domicile, tous profils confondus. Toutefois, selon la Fondation pour le logement des défavorisés, ce chiffre pourrait atteindre 350 000, soulignant une invisibilisation chronique de cette population en l’absence de données actualisées.
Les enjeux d’une meilleure connaissance pour une action publique renforcée
Les résultats attendus de ces enquêtes doivent permettre d’alimenter la réflexion politique, d’orienter les politiques publiques et d’appuyer le plaidoyer des associations. « Il est crucial d’avoir des chiffres consensuels pour éviter la contestation et pour produire des politiques efficaces », explique Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre. La disponibilité de données fiables pourrait aussi créer un électrochoc en pleine période préélectorale, amplifiant la pression pour agir.
Le rapport d’avancement sera disponible fin 2026, mais d’ores et déjà, tous s’accordent à dire que la situation est préoccupante : la dégradation des conditions de vie, les violences subies et l’insuffisance des dispositifs d’hébergement accentuent leur vulnérabilité. La lutte contre l’exclusion et la précarité majeure demeure au cœur des problématiques sociales françaises, nécessitant une compréhension fine et des mesures adaptées.