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Depuis leur départ discret du Gabon en mai, la famille Bongo a ouvert un nouveau front judiciaire en France contre les autorités gabonaises. Séquestration, torture et spoliation, la famille de l’ex-président Ali Bongo tente d’internationaliser un conflit d’héritage politique et patrimonial. À Libreville, le pouvoir affirme préparer un procès national, « juste et équitable ».
Une offensive judiciaire à Paris
Le 30 juin et le 1er juillet, Ali Bongo, sa femme Sylvia et leur fils Noureddin ont été entendus en tant que parties civiles par des juges d’instruction du tribunal judiciaire de Paris. Leur plainte, déposée par les cabinets Zimeray & Finelle et Doughty Street Chambers, vise les nouvelles autorités gabonaises pour « enlèvement », « séquestration en bande organisée », « actes de torture » et « barbarie ». Cette démarche reflète une stratégie visant à déplacer la bataille judiciaire hors du Gabon.
Un récit de détention choquant
Ali Bongo, toujours marqué par son AVC, aurait fourni un récit détaillé de sa détention après le coup d’État du 30 août 2023. Selon Sylvia Bongo, elle aurait été témoin de la torture de son fils Noureddin. Leurs avocats, Me Pierre-Olivier Sur et Me Clara Gérard-Rodriguez, dénoncent des « détentions arbitraires » et une « vengeance politique ». Avant leur départ, plusieurs membres de la fratrie, dont Léa, Bilal et Jalil, avaient également été entendus par la justice.
Réponse du gouvernement gabonais
La réaction du pouvoir gabonais ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué diffusé après les auditions parisiennes, la présidence a qualifié les accusations de « construction mensongère et dénuée de fondement ». Le gouvernement assure détenir « de nombreux éléments matériels et preuves vérifiables » pour contrer les allégations de la famille Bongo.
Le porte-parole du gouvernement, Théophane Nzame-Nze Biyoghe, a rappelé que Sylvia et Noureddin Bongo demeurent sous contrôle judiciaire, avec des inculpations graves telles que « haute trahison », « détournement de fonds publics » et « falsification de signature présidentielle ».
La guerre du patrimoine
Au-delà des accusations de torture, un autre front alimente ce bras de fer : celui du patrimoine. Les avocats de la famille Bongo dénoncent des saisies jugées illégales d’actifs détenus au Gabon et à l’étranger. Libreville, quant à elle, affirme que ces « restitutions officielles » ont conditionné la mise en liberté provisoire des principaux concernés.
Cette querelle s’étend à la société civile, où certains dénoncent une « tentative de victimisation cynique » des Bongo, tandis que des ONG gabonaises annoncent leur intention de porter plainte pour « crimes de sang » et « crimes financiers à grande échelle » commis sous l’ancien régime.
Un procès en France : enjeux politiques et médiatiques
Le choix de Paris n’est pas anodin pour cette bataille. La France a ouvert, dès 2007, une enquête sur les “biens mal acquis” de la famille Bongo, visant un patrimoine immobilier soupçonné d’avoir été financé par des fonds publics détournés. Ali Bongo, bénéficiant jusqu’en 2023 de l’immunité présidentielle, n’est plus protégé depuis sa chute.
Pour le général Brice Oligui Nguema, désormais à la tête du pays, l’ouverture d’un procès parallèle en France pourrait fragiliser la légitimité de sa transition. Chaque camp cherche à maîtriser la narration, alors que la famille Bongo se présente comme victime d’une purge politique orchestrée par les putschistes.