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Gaza : près de 14 000 disparus, un drame en silence
La nuit est tombée sur le centre d’hébergement où se trouvait la mère palestinienne, Ittidal Loulou. Les centaines de tentes blanches et bleues, dispersées à l’intérieur, ressemblaient à de grandes lanternes illuminées par la lumière des téléphones portables des résidents.
Les déplacés regagnent leurs lits en prévision de la nuit, mais Ittidal reste dehors, attendant le retour de son fils, Taha, âgé de 27 ans, qui n’est pas encore rentré, c’était le vendredi 12 juillet dernier.
Une inquiétude grandissante envahit la mère, qui tente en vain de chasser les angoisses qui l’assaillent, surtout que le centre d’hébergement, situé au nord du camp de Nuseirat dans la bande de Gaza, est proche du carrefour des martyrs, zone où l’armée d’occupation est présente, avec des bruits incessants d’obus et de balles. Les véhicules militaires et les avions de l’occupant empêchent les équipes de secours d’atteindre les blessés et les corps dans les zones voisines.
Un mois d’attente
Un jour, deux jours, puis une semaine passent, et Taha n’est toujours pas rentré. La famille se tourne vers le Croissant-Rouge international et d’autres organisations de droits humains pour obtenir des nouvelles, en vain.
Après un accord de cessez-le-feu entre le Hamas et Israël, il était difficile pour Ittidal de quitter son abri et de rentrer chez elle sans Taha. Elle finit par le faire, mais avec le cœur lourd.
Aujourd’hui, après sept mois d’absence, l’espoir de retrouver son fils demeure, ou du moins de recevoir des nouvelles sur son sort.
Le fléau des disparus
Le sujet des disparus à Gaza est l’une des questions les plus douloureuses engendrées par l’agression israélienne. Selon Ismail Thawabteh, directeur du bureau d’information gouvernemental, le nombre de disparus peut atteindre près de 14 000 personnes.
Thawabteh estime qu’entre 2 000 et 3 000 personnes sont détenues de manière arbitraire dans les prisons israéliennes, sans que l’État d’Israël ne fournisse d’informations à leur sujet. Les autres corps se trouvent sous les décombres des maisons ou dans des zones dangereuses où les équipes de secours ne peuvent accéder.
Les efforts des familles pour retrouver leurs proches demeurent souvent vains en raison du manque de coopération des autorités d’occupation.
Des histoires de disparitions
Les récits des disparitions à Gaza pendant la guerre se ressemblent. Les proches de ceux qui ont disparu affirment qu’ils sont simplement « sortis et n’ont jamais été revus ».
Parmi eux, Mounir Abou Jazar, âgé de 16 ans, qui le 7 octobre 2024, est parti vérifier l’état de sa maison dans le camp d’Asdoud à Rafah, au sud de la bande de Gaza, et depuis ce jour, il n’est jamais revenu.
La famille de Mounir a cherché des informations sur son sort sans succès. Après le cessez-le-feu, ses proches ont exploré la maison et les environs dans l’espoir de retrouver son corps, s’il avait été tué, mais sans résultat.
Espoir de détention
Noha Awaja vit dans l’espoir que son fils Fadi, âgé de 22 ans, soit en détention dans les prisons israéliennes, bien qu’elle n’ait aucune preuve à cet égard. Elle a perdu le contact avec lui à la fin de décembre dernier dans le camp de Jabalia, qui a été frappé par une agression israélienne massive.
Après le cessez-le-feu, elle a cherché désespérément des nouvelles de son fils, sans succès. Certains lui ont dit que Fadi était détenu par l’occupant, ce qui lui donnerait de l’espoir pour un retour éventuel, mais elle demeure dans l’incertitude.
Une nouvelle tragique
Les sentiments de la famille Hassan Madi sont partagés après avoir retrouvé le corps de leur fils disparu. Ils ont beaucoup pleuré sa mort, mais se sentent soulagés de connaître enfin son sort et de pouvoir lui offrir une sépulture.
Hassan avait disparu le 1er février, après la prière du soir, et sa famille n’a pu obtenir aucune information à son sujet jusqu’à récemment, lorsqu’ils ont reconnu son corps à l’hôpital Al-Shifa, tué par un obus israélien.
Un centre pour les disparus
Face à l’augmentation des disparus, un groupe de défenseurs des droits a créé un organisme dédié, nommé « Centre palestinien pour les disparus et les détenus ».
Selon Ghazi Al-Majdalawi, chercheur principal au centre, sa création était une nécessité en raison du nombre élevé de disparus et de la continuité du phénomène. Leur objectif est de documenter et de rassembler des données sur les disparus, de mettre en lumière leurs souffrances et de soutenir leurs familles.
Malgré le début récent de leurs activités, ils ont déjà collecté des données sur environ 1 500 disparus, estimant leur nombre total entre 8 000 et 10 000 personnes.