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Les récentes images de Narges Mohammadi, la lauréate iranienne du Prix Nobel de la paix 2023, ont suscité une vive attention. Arrivée chez elle à bord d’une ambulance après avoir été libérée de la tristement célèbre prison d’Evin, elle a pu profiter de trois semaines de repos après une opération à la jambe. Toutefois, cette liberté est temporaire, car elle devra ensuite retourner derrière les barreaux pour purger une peine de plus de trente ans en raison de accusations de propagande contre l’État. Ce qui a particulièrement marqué les esprits, c’est son apparition sans hijab et vêtue d’une robe jugée inappropriée selon les standards iraniens, proclamant : « Bonjour liberté ! La liberté est notre droit. Vive la liberté ! » en scandant le slogan des manifestations anti-régime de 2022 : « Femme, vie, liberté ! ».
Un contexte de tensions internes
La manifestation de Mohammadi, qui a eu lieu le 4 décembre, s’inscrit dans un contexte de lutte interne au sein du régime iranien concernant le respect des règles vestimentaires. Cette lutte est actuellement éclipsée par la situation en Syrie, où le régime de Bachar al-Assad est en pleine implosion, et par la destruction continue de la bande de Gaza par Israël. Si les extrémistes de l’intérieur de l’Iran venaient à perdre du terrain, cela pourrait entraîner un changement significatif dans les rues de l’Iran.
Le poids du passé et les révoltes actuelles
Pour comprendre cette lutte, il faut revenir à l’ayatollah Khomeiny, le leader de la révolution islamique de 1979, qui affirmait que les femmes non voilées ne pouvaient rien de bon apporter. Cette idéologie a rapidement contraint les femmes iraniennes à porter des vêtements islamiques, une décision qui a suscité une résistance croissante. En effet, une enquête réalisée par le journal réformiste *Shargh* a révélé qu’environ 84 % des 12 000 répondants s’opposent aux règles vestimentaires imposées.
Les manifestations et les nouvelles lois
Le mécontentement s’est intensifié suite à la mort tragique de Mahsa Amini, causée par la police des mœurs, qui a entraîné des manifestations massives. Aujourd’hui, une lutte se dessine entre les durs et les modérés au sein du régime, avec une nouvelle loi sur la « Protection de la famille par la promotion de la culture de la chasteté et du hijab ». Cette loi, qui vise à renforcer le port du hijab, prévoit des peines pouvant aller jusqu’à 15 ans de prison et des amendes pouvant atteindre 20 000 euros pour les contrevenants, voire la peine de mort dans les cas jugés de « corruption sur Terre ».
Les réactions au sein du gouvernement
Après un long débat au parlement, la loi a été ajustée par le Conseil des Gardiens et devait entrer en vigueur le 13 décembre. Cependant, le président Masoud Pezeshkian s’oppose à son application stricte, craignant des troubles sociaux. Même certains clercs influents ont exprimé leurs réticences, avertissant que cette loi pourrait engendrer un ressentiment parmi les jeunes vis-à-vis de l’éducation religieuse.
Un avenir incertain
La question demeure : les durs ont-ils exagéré? Au lieu de ratifier la loi, le président l’a soumise à l’ordre du jour du Conseil suprême de la sécurité nationale. La situation économique est catastrophique et des interrogations subsistent quant à savoir si l’ayatollah Khamenei, le dirigeant suprême, acceptera d’assouplir les règles pour préserver son régime. L’avenir de la liberté vestimentaire en Iran pourrait en dépendre.