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La justice allemande se penche sur une question délicate concernant la responsabilité du gouvernement à l’égard des missions de drones armés américains menées au Yémen, qui ont été coordonnées depuis la base de Ramstein, située dans l’ouest de l’Allemagne.
Décision imminente de la Cour constitutionnelle
La Cour constitutionnelle allemande doit rendre sa décision mardi à 10H00 (08H00 GMT) sur une plainte déposée par deux Yéménites originaires de la région d’Hadramout. Ces derniers ont perdu des membres de leur famille lors d’une attaque de drone survenue à l’été 2012, alors qu’ils se préparaient à célébrer un mariage.
Selon l’organisation de défense des droits humains ECCHR, qui soutient les plaignants, l’identification des victimes a été particulièrement macabre, nécessitant des heures pour reconnaître « des morceaux de corps carbonisés ». Les plaignants, Ahmed et Khalid bin Ali Jaber, demandent à Berlin d’intervenir auprès des États-Unis pour faire respecter le droit international.
Fonctionnement des drones depuis Ramstein
Bien que les drones ne décollent pas de Ramstein et ne soient pas pilotés depuis cette base, les signaux de contrôle sont transmis par câble depuis les États-Unis jusqu’à Ramstein, où ils sont ensuite relayés par satellite. La question centrale est de savoir si l’Allemagne a des « obligations de protection extraterritoriales », y compris en ce qui concerne les opérations menées au Yémen.
La vice-présidente du tribunal, Doris König, a souligné l’importance de déterminer si le droit fondamental à la vie et à l’intégrité physique impose des responsabilités à Berlin dans ce contexte.
Un parcours judiciaire complexe
La plainte a été déposée en 2014, alors qu’Angela Merkel était chancelière, à une époque où les États-Unis intensifiaient leurs attaques de drones au Yémen pour lutter contre Al-Qaïda. Le tribunal de Münster n’a pas favorablement accueilli la plainte, mais a tout de même exhorté Berlin à prendre des mesures pour s’assurer que les États-Unis respectent le droit international, en particulier en ce qui concerne la protection des civils.
Les autorités allemandes ont fait appel de cette décision auprès du tribunal administratif fédéral de Leipzig, qui a rejeté la demande des plaignants en 2020, jugeant que les efforts diplomatiques de Berlin étaient suffisants. Soutenus par l’ECCHR et Reprieve, les plaignants se sont ensuite tournés vers la Cour constitutionnelle.
Réactions du gouvernement allemand
Le gouvernement allemand a exprimé que la plainte des Yéménites est excessive. Le secrétaire d’État parlementaire au ministère de la Défense a argumenté qu’une intervention de Berlin auprès de ses alliés concernant leur comportement à l’étranger pourrait nuire à la capacité de l’Allemagne à établir des alliances. Bien que les attaques de drones américaines violent souvent le droit international, l’ECCHR a noté que plusieurs gouvernements européens, y compris Berlin, soutiennent ces actions, tout en adoptant des doubles standards en matière de droits de l’homme.