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La prosopagnosie développementale, souvent appelée « cécité des visages », touche profondément la vie quotidienne des personnes affectées, qui peinent parfois à reconnaître même leurs proches lors de rencontres ordinaires, révèle une étude récente.
Une affection rare aux conséquences majeures
Cette maladie neurodéveloppementale rare, estimée toucher environ 2 % de la population, se manifeste par une incapacité persistante à identifier les visages familiers, alors que la vision, la mémoire et les capacités intellectuelles restent normales. Le diagnostic repose sur un ensemble de tests objectifs et de témoignages subjectifs, en l’absence d’un outil diagnostique validé unique.
Les chercheurs ont souligné que les expériences vécues par les individus concernés avaient été peu explorées jusqu’à présent.
Étude menée auprès de personnes atteintes
Pour mieux comprendre cette réalité, une équipe dirigée par Judith Lowes, docteure en psychologie à l’Université de Stirling (Écosse), a interrogé en ligne 29 participants (19 hommes et 10 femmes) présentant des difficultés confirmées de reconnaissance faciale. Les résultats ont été publiés dans la revue PLOS One fin avril.
Un impact profond et surprenant
Si 62 % des répondants affirment pouvoir reconnaître les membres de leur famille proche (parents, partenaires, enfants), 35 % ne peuvent le faire de manière fiable en dehors du contexte habituel. Seulement 45 % reconnaissent systématiquement leurs trois amis les plus proches lors de rencontres imprévues, illustrant que la prosopagnosie altère aussi l’identification de visages très familiers, porteurs de liens affectifs forts.
Plus des deux tiers (69 %) des participants estiment pouvoir identifier moins de 10 visages connus, alors qu’un adulte moyen en reconnaît environ 5000.
Les répercussions psychosociales
Les témoignages recueillis révèlent une souffrance sociale et psychologique importante :
- « Cette condition affecte tous les aspects de ma vie — relations, amitiés, travail, activités, vie sociale. Elle mérite davantage d’attention car elle peut avoir un impact sérieux sur la santé physique et mentale. »
- « Lors d’événements sociaux ou professionnels, où l’on doit rencontrer de nouvelles personnes, c’est difficile. Je ne sais pas si quelqu’un est nouveau ou pas, donc je ne peux jamais me présenter — il se pourrait même qu’on travaille ensemble depuis dix ans. »
- « J’évite les groupes de plus d’une ou deux personnes et je me sens très nerveux dans les rassemblements. C’est dommage car j’aime être avec les gens. »
- « J’éprouve de l’anxiété en société, car je pense constamment que certains me jugent impoli parce que je n’aborde jamais personne. »
Stratégies pour compenser la difficulté de reconnaissance
La peur d’être mal évalués pousse la majorité des participants à développer des tactiques complexes, mais souvent imparfaites, pour masquer leurs difficultés :
- 28 % prennent des notes sur l’apparence, les gestes, tatouages, piercings, habitudes, salutations et loisirs des personnes.
- Ils révisent fréquemment ces notes avant des rencontres attendues.
- Certains anticipent la présence de personnes spécifiques lors d’une situation et éliminent progressivement les inconnus.
- D’autres apprennent à reconnaître la voix ou l’accent comme aide compensatoire.
Tous ont testé au moins quatre stratégies différentes avec des succès variables.
Appels à une meilleure sensibilisation et recherche
Les participants insistent sur la nécessité d’une prise de conscience accrue concernant la prosopagnosie, tant auprès du grand public que des professionnels de santé, de l’éducation, et dans une moindre mesure, des milieux professionnels. La recherche sur d’éventuelles interventions pour améliorer la reconnaissance faciale est également fortement souhaitée.
Plusieurs ont cité l’organisation Faceblind UK et le site Faceblind.org comme des ressources précieuses pour les malades et leurs familles.