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La souffrance des familles des prisonniers palestiniens en Israël
À Naplouse, la mère palestinienne Hala Hanani, connue sous le nom de Umm Muhammad, ne pense qu’à ses fils emprisonnés dans les prisons israéliennes. Elle passe ses nuits et ses jours à prier pour eux, alors que les parents des prisonniers subissent une immense souffrance due à la séparation, aux restrictions de visite et à l’absence de communication dans un contexte de répression croissante.
Jour après jour, l’anxiété des familles de prisonniers ne fait qu’augmenter. Les pratiques répressives de l’occupation, les conditions d’emprisonnement et les humiliations subies dépassent toute description. Les chiffres des prisonniers atteignent des niveaux records, et des dizaines d’entre eux ont été tués par l’occupation. Les proches des prisonniers, en particulier ceux ayant plusieurs membres de leur famille derrière les barreaux, comme Umm Muhammad, sont submergés par l’angoisse et l’incertitude.
Au téléphone, Umm Muhammad suit de près les nouvelles concernant ses trois fils emprisonnés, Suhaib, Muhammad et Jamal, espérant trouver un semblant de réconfort, surtout pour Jamal qui a récemment souffert d’un malaise en détention et dont elle n’a pas de nouvelles. Elle scrute également son téléphone à la recherche de photos d’eux, qui lui apportent un peu de réconfort.
Les mères des prisonniers demandent que soient révélées les crimes de l’occupation contre leurs enfants dans les prisons.
Un inquiétude grandissante
Le vide et la désunion sont les pires épreuves que traverse Umm Muhammad en ce moment. Leurs arrestations l’ont laissée lutter seule contre les défis du quotidien dans sa maison à Beit Furik, près de Naplouse. Avant, ses fils remplissaient l’espace de vie et brisaient sa solitude, mais maintenant, leur absence n’a fait qu’accentuer son anxiété et sa peur pour leur sécurité ainsi que pour celle de leurs familles.
Umm Muhammad, qui a déjà vécu l’angoisse de l’emprisonnement avec ses frères, fils, petits-enfants et son mari, a vu cette douleur se raviver. Elle explique que « cette fois, l’arrestation est plus dure en raison du silence imposé sur mes enfants et de l’absence d’informations à leur sujet ».
Elle déclare : « Depuis près de 40 ans, je me bats contre l’occupation et ses prisons, mais la douleur de l’emprisonnement aujourd’hui est plus amère, surtout que l’occupation interdit les visites et rompt tout contact avec les prisonniers, leur refusant même les droits les plus fondamentaux tels que la nourriture, l’eau, et des vêtements adéquats. »
Une détresse sans fin
Tout cela ne fait qu’augmenter la tristesse d’Umm Muhammad, qui vit dans une peur constante pour l’avenir de ses fils, surtout lorsqu’elle entend des nouvelles alarmantes sur la santé des prisonniers, alors que près de 50 d’entre eux ont été tués sous la torture depuis le début des hostilités à Gaza. Son inquiétude grandit encore plus lorsqu’elle doit répondre aux questions de ses petits-enfants sur leurs pères emprisonnés.
La mère de famille ne laisse passer aucune information ou nouvelle concernant ses fils. Elle interroge régulièrement les anciens prisonniers pour savoir ce qu’il leur est arrivé, et elle s’adresse aux organisations qui s’occupent des droits des prisonniers pour obtenir un peu d’espoir et de réconfort, alors qu’elle ne connaît que leurs lieux de détention.
Selon le Club des prisonniers palestiniens, Israël a procédé à plus de 12 000 arrestations depuis le début de son offensive sur Gaza en octobre 2023, dont 10 300 prisonniers sont encore détenus dans ses prisons. Ces chiffres n’incluent pas les arrestations dans la bande de Gaza, qui comptent des milliers de cas, dont de nombreux ont été tués, sans qu’Israël n’ait divulgué leur identité, et beaucoup restent portés disparus.
Un coût à payer pour l’absence
Au rond-point des martyrs à Naplouse, Umm Iman Hamza a assisté à une manifestation de solidarité pour les prisonniers, tenant une photo de ses fils, Imad et Ahmad Yassine, tous deux emprisonnés. Elle a crié, avec d’autres mères de prisonniers, contre les crimes de l’occupation et a appelé les organisations humanitaires et les droits de l’homme à l’aide.
Les larmes aux yeux, elle partage son inquiétude : elle ne sait rien sur leur condition, ce qui lui pèse énormément, surtout pour Imad, qui a été arrêté alors qu’il était blessé par balle dans la jambe. Elle a vu une photo d’Imad parmi d’autres prisonniers, les mains et les pieds enchaînés, allongés au sol.
Leurs absences ont changé la dynamique familiale, tant sur le plan matériel qu’émotionnel, en particulier pour leur père, atteint d’un cancer. Le manque d’informations à leur sujet accentue leur souffrance, et la famille a dépensé jusqu’à présent plus de 2300 dollars pour les avocats afin de garder des nouvelles de leurs fils.
Au cours de cette mobilisation, Umm Iman et son mari, qui a dû interrompre rapidement son traitement à l’hôpital pour la rejoindre, se sont unis à d’autres mères portant des photos de leurs fils. Beaucoup d’entre elles ont au moins deux fils derrière les barreaux, et toutes ont fait le déplacement pour faire entendre leur voix et demander un arrêt aux crimes de l’occupation.
Des familles en souffrance
La famille Imar à Qalqilya vit une douleur accrue avec l’emprisonnement de leurs fils, Nour, Nidal et Abdul Salam, qui purgent plusieurs peines de réclusion à perpétuité.
Selon le directeur du Club des prisonniers palestiniens à Naplouse, Mouzaffar Doukan, la situation la plus critique pour les familles de prisonniers, en particulier pour celles ayant plusieurs membres emprisonnés, est « la peur et l’anxiété concernant le destin de leurs enfants, dans un contexte de hausse des arrestations et des meurtres à l’intérieur des prisons par la torture et des traitements inhumains. »
« Il y a en effet une réelle inquiétude pour leur vie, car l’occupation interdit les visites, » a-t-il ajouté. « Il existe également un silence international sur les crimes de l’occupation, ce qui l’encourage à aggraver ses violations, et les prisonniers sont soumis à une autre forme de punition, à savoir l’interdiction de se rencontrer, ce qui accroît leur souffrance psychologique. »
De plus, l’arrestation de plusieurs membres d’une même famille aggrave les difficultés économiques des proches, qui doivent faire face à des frais importants, en particulier les coûts des avocats pour suivre leurs dossiers et répondre aux besoins des prisonniers.