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La récente annonce de la construction d’une éolienne géante de 26 MW par le chinois Dong Fang soulève une question cruciale : l’Europe va-t-elle encore une fois se laisser distancer sur un marché stratégique comme celui de l’éolien en mer ? Face à la montée en puissance de la Chine, l’Europe se trouve à un tournant décisif.
La Chine domine déjà le marché
Les leaders européens dans le domaine de l’éolien, tels que Siemens Gamesa, Vestas et GE Renewable Energy, ont longtemps occupé une position de force. Toutefois, ils sont désormais dépassés par leurs homologues chinois, soutenus par un marché intérieur florissant. En 2023, Goldwind a ajouté plus de 16 GW de nouvelles capacités éoliennes, suivi par Envision avec 14 GW. Vestas, le seul fabricant occidental du top cinq, se classe troisième avec 11,5 GW.
Dans le secteur de l’éolien en mer, la compétitivité dépend de plus en plus de la puissance des turbines, avec une nouvelle référence atteignant 20 MW, tant pour les installations fixes que flottantes. Ce segment révèle un retard préoccupant pour les industriels européens, alors que les entreprises asiatiques continuent d’annoncer des avancées majeures.
Avant Dong Fang, MingYang a présenté une éolienne de 22 MW, dont la production en série est prévue pour 2028. MingYang a déjà sécurisé des contrats en Allemagne et en Italie pour des éoliennes de 18,5 MW, avec l’intention de les construire sur le sol européen. En revanche, Siemens et Vestas n’ont pas encore dévoilé d’équivalent, se concentrant sur des modèles de 15 MW, jugés insuffisants pour répondre à la demande croissante du marché européen d’ici 2030.
Un enjeu économique et stratégique
Les éoliennes de plus grande capacité produisent davantage d’électricité. Par exemple, une éolienne de 26 MW peut alimenter plus de 60 000 foyers. Pour une installation éolienne donnée, moins d’unités sont nécessaires, ce qui réduit les coûts de construction et d’exploitation, tout en minimisant l’impact environnemental.
Au cours des 15 dernières années, la puissance des éoliennes a été multipliée par cinq, tandis que le coût de l’électricité a baissé de 75 %. Les derniers appels d’offres français pour l’éolien en mer ont été attribués à 45 euros/MWh, rendant l’éolien maritime plus compétitif que les énergies fossiles. Les modèles de 26 MW pourraient propulser cette compétitivité encore plus loin.
Les acteurs européens font face à un double défi. D’une part, les États et opérateurs recherchent une électricité abordable pour répondre aux besoins croissants en énergie renouvelable et atteindre leurs objectifs climatiques. D’autre part, les constructeurs de turbines européens se retrouvent dans une spirale difficile : chaque nouveau modèle risque d’être rapidement obsolète face à des offres concurrentes plus puissantes, ce qui fragilise l’ensemble du secteur.
L’avenir de l’éolien se joue au large
Abandonner cette course signifie céder le monopole des turbines de grande puissance, les plus compétitives, à des concurrents étrangers, avec des conséquences stratégiques et économiques qui pourraient être considérables. La Chine a clairement identifié que l’avenir de l’éolien se situe en mer, où les conditions sont idéales.
La publication le 18 octobre de la cartographie des nouvelles zones maritimes à développer en France, ainsi que le lancement imminent d’un nouvel appel d’offres (9 GW de capacité additionnelle), en témoignent. À l’échelle mondiale, près de 380 GW de nouvelles capacités pourraient être ajoutés d’ici 2032 aux 70 GW déjà en opération, selon le Global Wind Energy Council.
Investir pour rester indépendant
Il est impératif pour l’Europe, tant pour ses institutions que pour ses industriels, de saisir l’importance stratégique de l’éolien en mer. Les aides publiques, telles que le NZIA, doivent être activées pour soutenir le développement de turbines géantes capables de rivaliser avec celles que la Chine commence déjà à produire.
Pour conserver son avance technologique, protéger ses emplois et garantir son indépendance énergétique, l’Europe doit investir massivement dans l’innovation.