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Nigeria : habitants réclament des solutions locales face à la violence

by Sara

Au Nigeria, habitants et experts demandent des réponses locales face à une violence qui s’intensifie et affecte des communautés de toutes confessions. Les menaces d’intervention étrangère soulèvent l’inquiétude et renforcent l’appel à des solutions nationales adaptées à la réalité du terrain.

Des pertes et des traumatismes à Miango

Lawrence Zhongo, agriculteur d’igname et de maïs à Miango, dans l’État de Plateau, dit avoir perdu de nombreux proches lors d’attaques meurtrières. Sa femme a notamment perdu huit membres de sa famille lors de l’assaut de Zike en avril, où des centaines de personnes ont assisté aux funérailles des victimes.

Dans l’attaque de Zike, des hommes armés ont fait des raids nocturnes dans des maisons, tuant plus de 50 personnes selon des comptes rendus. Quelques jours plus tôt, 40 personnes auraient été tuées dans une attaque similaire dans la zone de Bokkos.

Les habitants pointent du doigt l’échec du système de sécurité et reprochent au gouvernement son incapacité à protéger les civils.

École primaire endommagée pendant des violences au Nigeria

Des victimes de tous bords

La violence touche des personnes de confessions et d’ethnies différentes. Ali Tiga, ancien musulman converti au christianisme, relate la perte de proches et la brutalité des attaques, y compris des violences pratiquées contre des femmes enceintes.

De nombreux éleveurs peinent aussi à se protéger : Aliyu, un éleveur peul, raconte des embuscades dans les zones de pâturage où l’on tire sur les troupeaux et sur les bergers. Au-delà des pertes matérielles, ces violences détruisent des relations intercommunautaires établies de longue date.

  • Perte de vies humaines et de bétail.
  • Familles déplacées et accès limité aux terres agricoles.
  • Polarisation croissante entre communautés chrétiennes et musulmanes.

Église catholique et mosquée centrale à Kaduna

Une crise multiforme et enracinée

Le centre du pays, ou « middle belt », subit depuis des décennies des affrontements entre éleveurs peuls et agriculteurs majoritairement chrétiens, liés à la compétition pour des ressources telles que la terre et l’eau.

Parallèlement, le nord est confronté depuis plus d’une décennie aux attaques de Boko Haram et de groupes affiliés à l’État islamique, qui ont causé des milliers de morts et des déplacements massifs.

Selon des experts, la violence entre éleveurs et agriculteurs serait jusqu’à six fois plus meurtrière que la rébellion de Boko Haram, et a contribué à une urgence alimentaire en empêchant les agriculteurs d’accéder à leurs terres.

Patrouille de sécurité lors d'une montée de violence dans l'État de Plateau

Polémiques internationales et réactions d’Abuja

Les récentes déclarations du président américain Donald Trump menaçant une intervention « guns-a-blazing » ont été largement débattues et critiquées. Trump a appelé à des mesures rapides et militaires si les violences contre des chrétiens se poursuivaient.

Le département d’État américain a par ailleurs désigné le Nigeria comme « Country of Particular Concern » (CPC), une liste qui inclut des pays accusés de graves violations de la liberté religieuse.

Le gouvernement nigérian, sous la présidence de Bola Tinubu, a rejeté fermement ces accusations, affirmant que la caractérisation de l’État comme intolérant religieux ne reflète pas la réalité nationale.

Pour en savoir plus sur les déclarations et réactions, voir les articles publiés par Al Jazeera :

  • Trump menace d’attaques au Nigeria
  • Abuja réfute les accusations américaines

Des solutions locales privilégiées

Sur le terrain, nombreux sont ceux qui refusent une intervention étrangère et préconisent des réponses nationales et communautaires. Les habitants craignent qu’une action militaire externe n’aggrave la crise humanitaire et les déplacements.

Des experts recommandent des mesures concrètes et ancrées localement, parmi lesquelles :

  • Renforcer la volonté politique et la responsabilité pour protéger les civils et poursuivre les auteurs d’atrocités.
  • Améliorer le renseignement et le travail policier pour une réponse plus efficace et impartiale.
  • Soutenir des mécanismes communautaires d’alerte précoce et des programmes de médiation interconfessionnelle.
  • Associer les opérations militaires à des garanties en matière de droits humains et à des programmes de développement pour s’attaquer aux causes profondes.

Les autorités avaient lancé en 2019 un « National Livestock Transformation Plan » visant à moderniser le secteur et réduire les conflits, mais sa mise en œuvre a été entravée par des lacunes politiques, des délais et un manque de financement, selon des analyses comme celle du International Crisis Group.

Vers la réconciliation et la protection

Des spécialistes insistent sur la nécessité d’associer justice, développement et médiation locale pour briser le cercle de la violence. Sans amélioration du niveau de vie, de l’emploi et des infrastructures de base, les forces de sécurité seules ne suffiront pas à prévenir la récurrence des attaques.

À Miango, Zhongo espère une intervention résolue du gouvernement nigérian qui protège les communautés sans approfondir les divisions.

« Le gouvernement nigérian suffit, s’il veut réellement combattre ces groupes », dit-il, encore marqué par le souvenir des nombreux enterrements collectifs qu’il a dû organiser.

source:https://www.aljazeera.com/features/2025/11/8/nigerians-demand-own-solutions-to-violence-as-trump-threatens-us-invasion

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