À quoi ressemblera l’avenir des Israéliens déplacés des zones de Gaza et du nord ?
De nombreuses familles israéliennes évacuées des colonies et kibboutzim du nord et du « périmètre de Gaza » au milieu de l’offensive « La Tempête d’Al-Aqsa » ne souhaitent pas retourner dans ces zones. Ceci s’explique par la persistance des affrontements et l’échec de l’armée israélienne à « éradiquer le Hamas ».
Après une attaque inattendue de la « Résistance islamique » le 7 octobre 2023, le gouvernement israélien a rapidement décidé d’évacuer tous les habitants des kibboutzim et colonies adjacentes à la bande de Gaza, soit 25 au total. Cette mesure a concerné 65 000 personnes. En parallèle, 60 000 autres individus ont été évacués des zones frontalières avec le Liban, dans la Haute Galilée, en raison des affrontements entre l’armée israélienne et le Hezbollah.
Outre ces informations officielles du ministère de la Sécurité israélien, des dizaines de milliers de résidents du nord du Néguev, de Sdérot et d’Ashkelon ont également choisi de partir d’eux-mêmes, sans suivre les instructions des autorités, portant à plus de 200 000 le nombre de personnes vivant dans ces zones proches du « périmètre de Gaza ».
Coût de l’évacuation
Par le passé, le gouvernement israélien avait planifié un système d’évacuation pour des dizaines, voire des centaines de milliers d’Israéliens des zones frontalières vers d’autres localités en cas de guerre. Une planification qui, pourtant, a été abandonnée. La stratégie prévue, appelée « Hôtel civil », s’est révélée défaillante au moment de la mise en œuvre effective de l’évacuation.
Selon le correspondant aux affaires économiques du journal « Yediot Aharonot », Gadi Leivor, les coûts pour loger une famille de 6 personnes dans un hôtel s’élevaient à environ 45 000 shekels (12 000 dollars) par mois. Pour une famille avec deux enfants, les allocations s’élevaient à 18 000 shekels (4 800 dollars) si elle n’était pas hébergée dans un hôtel.
Selon les chiffres du ministère du Tourisme israélien, près de 56 000 chambres d’hôtel existent en Entité sioniste, dont environ 40 000 situées loin des zones de combats et dans lesquelles les habitants ont été relogés. Cette situation devrait entraîner une perte significative pour les grandes chaînes hôtelières en raison de la guerre.
Plan de réinstallation
Alors que les différentes entités gouvernementales travaillent sur un plan de réinstallation des personnes évacuées dans leurs foyers, elles n’ont pas encore pris de décision concernant ceux qui refusent de retourner dans les zones du « périmètre de Gaza » et du nord du Néguev.
Pour faciliter cette opération de réinstallation, le gouvernement israélien a créé une direction appelée « Takeuma » et lui a alloué un budget de 18 milliards de shekels (5 milliards de dollars) sur 5 ans pour reconstruire le « périmètre de Gaza » et préparer le retour des personnes évacuées.
D’après des données préliminaires recueillies par le journal économique « The Marker » et provenant de discussions avec les collectivités locales du sud, environ 20 % des familles israéliennes, en particulier celles avec de jeunes enfants, qui ont été évacuées depuis le 7 octobre dernier, ont décidé de ne pas retourner dans les zones du « périmètre de Gaza ». Elles cherchent des logements alternatifs dans des localités éloignées des zones de combats.
Peur de l’avenir
Mirav Erolzorof, analyste des affaires économiques pour « The Marker », estime que les adultes et les jeunes souhaitent revenir, tandis que les familles avec enfants ne sont pas intéressées par un retour et cherchent la stabilité dans d’autres localités.
Elle souligne que, compte tenu de la persistance des combats, du renforcement de la conviction des Israéliens dans l’échec de l’armée à renverser le régime du Hamas et à éliminer son arsenal militaire, et de l’absence de plan gouvernemental clair pour reloger les déplacés et reconstruire le « périmètre de Gaza », même les familles prêtes à retourner trouvent difficile de s’adapter à la situation, surtout que plus le temps passe, plus les choses se compliquent et deviennent incertaines.
En comparant la façon dont les gouvernements israéliens ont géré l’évacuation des colons du bloc de colonies de Gush Katif dans la bande de Gaza et de la région du Sinaï à la façon dont le gouvernement actuel traite l’évacuation des familles israéliennes du « périmètre de Gaza », elle affirme que le gouvernement actuel ne fonde pas sa politique sur des incitations financières pour encourager un retour dans le « périmètre ».
En 2007, le coût du démantèlement du bloc de colonies dans la bande de Gaza a dépassé 10 milliards de shekels (2,7 milliards de dollars), dont 6,5 milliards étaient des coûts civils pour l’évacuation de 1800 familles de colons y vivant. Plus de la moitié de ces dépenses sont directement allées dans les poches des colons évacués.
Erolzorof explique que chaque famille évacuée de Gush Katif lors du désengagement a reçu en moyenne 2 millions de shekels (550 000 dollars), car le gouvernement était tenu de continuer à soutenir le projet de colonisation et de montrer de la générosité envers les évacués. Cependant, pendant la guerre contre Gaza, le gouvernement israélien craint de montrer une générosité excessive envers les personnes évacuées du sud et de la Haute Galilée, et s’abstient de mettre en place une politique pour les familles qui ne souhaitent pas retourner dans leurs kibboutzim.
Contrairement à l’évacuation du Sinaï ou de Gush Katif, où les colons n’avaient pas de lieu de retoueme, les déplacés actuels du « périmètre de Gaza » et des colonies frontalières avec le Liban ont un endroit où retourner et l’intérêt suprême de l’État réside dans le retour des habitants dans leurs zones frontalières, car le refus de revenir pourrait être interprété comme une défaite.