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À Sainte-Soline, le parquet de Rennes a annoncé le classement sans suite des violences imputées à des gendarmes sur quatre manifestants blessés lors de la manifestation du 25 mars 2023, dans les Deux-Sèvres. L’annonce, relayée par Libération et Mediapart, précise qu’aucun gendarme n’a été auditionné comme suspect dans l’enquête préliminaire. Le parquet précise que l’usage des armes peut être considéré comme absolument nécessaire et proportionné au but à atteindre, qui est de faire respecter l’interdiction préfectorale, de prévenir l’envahissement des bassines et de repousser les tentatives».

À Sainte-Soline, classement sans suite des violences de gendarmes
Le parquet détaille que l’enquête préliminaire a conclu à des blessures chez quatre personnes grièvement blessées et que, durant les affrontements, les gendarmes ont été victimes de jets de pierres, de cocktails Molotov et de mortiers, et que 45 gendarmes ont été blessés, dont six brièvement hospitalisés, selon les éléments évoqués par le procureur Frédéric Teillet. «Les premières grenades lacrymogènes sont tirées à compter de 12 h 35 pour disperser les manifestants, qui poursuivent malgré tout leur progression» vers le chantier de la mégabassine, et «les premiers heurts avec les black blocs se produisent vers 13 h 05».
Pour motiver le classement sans suite des blessures d’Olivier (1), gravement blessé au pied par la détonation d’une grenade GM2L, composée d’une charge explosive et de fumée lacrymogène, le procureur retient une «conformité du tir aux règles d’emploi». L’enquête n’a pas permis de déterminer si la grenade avait été lancée en cloche ou en tir tendu, et par ailleurs, le gendarme qui l’a effectué n’a pas été retrouvé.
Concernant les blessures de Alix (1), et de Serge D. et Mickaël B., blessés à la tête et au visage, par des tirs tendus de grenade lacrymogène (un doute subsiste concernant Mickaël B. qui a également pu être atteint par un tir de LBD selon l’expertise judiciaire), le parquet de Rennes classe sans suite l’enquête pour deux motifs. Le premier est «l’absence d’identification des auteurs des tirs les ayant blessés».
Cependant, ce classement sans suite est prononcé en raison de la «possibilité que ces tirs, même non conformes aux règles d’emploi, puissent avoir été effectués dans des conditions relevant d’un fait justificatif prévu par l’article L 435-1 du code de la sécurité intérieure». Le procureur avance ainsi l’hypothèse que la violence des manifestants peut justifier l’usage même potentiellement mortel des grenades lacrymogènes en tir tendu, interdits en maintien de l’ordre, dans une situation équivalente à la légitime défense. «Aucune investigation supplémentaire ne peut permettre d’éclaircir les circonstances de ces tirs», a-t-il ajouté.
Sur le volet non-assistance à personne en danger, visant des carences dans la prise en charge des victimes par les secours, le parquet classe également sans suite. «Le délai dans la prise en charge des victimes a […], principalement résulté des nécessités de sécurisation des interventions et du fait que les services officiels de secours n’ont eu connaissance des points de rassemblement des blessés organisés par les manifestants qu’au cours de la journée», a déclaré le parquet. Des expertises médicales concluent que les délais de prise en charge n’ont pas entraîné de perte de chance.
Les quatre plaignants annoncent désormais leur intention de déposer une plainte avec constitution de partie civile, ce qui permettra la poursuite de l’enquête par un juge d’instruction. «La décision de classer sans suite les plaintes de mes clients alors que même que les vidéos n’ont pas été intégralement exploitées par les enquêteurs est incompréhensible alors que celles-ci pourraient révéler des informations fondamentales les concernant», a réagi leur avocate Chloé Chalot, contactée par Libération. Elle ajoute : «L’avis de classement sans suite ne répond aucunement à nos observations et aux nombreuses insuffisances de l’enquête que nous avions pointées.»
Par ailleurs, le parquet annonce l’ouverture d’une information judiciaire sur les tirs tendus, et les ordres de procéder à de tels tirs, visibles sur les vidéos, principalement issues des caméras-piéton des gendarmes et révélées par Libération et Mediapart. Le procureur estime que ces tirs pourraient constituer des violences aggravées si des victimes étaient identifiées, tout en excluant que ces tirs puissent recouvrir l’infraction de mise en danger d’autrui.
Enfin, le rassemblement de Sainte-Soline, interdit, avait réuni des milliers de personnes autour d’une réserve d’eau contestée. Des échanges et des analyses sur l’enchaînement des faits et les responsabilités se poursuivent, avec l’espoir d’établir les circonstances précises des tirs et des interventions.
Ouverture d’une information judiciaire sur les tirs tendus et suite procédurale
Le parquet de Rennes a annoncé l’ouverture d’une information judiciaire devant un juge d’instruction relative aux tirs tendus de grenades effectués ce jour-là par les gendarmes, au-delà du classement des violences. Cette information judiciaire vise à éclairer les conditions d’emploi des grenades et les éventuels faits de violences volontaires, tout en réaffirmant que les tirs n’ont pas été clairement identifiés par les enquêteurs. «Des manquements à la déontologie» et l’existence de tirs non conformes avaient été évoqués dans les documents publiés par Médiapart et Libération, ce qui a conduit à l’ouverture de l’information judiciaire, selon les autorités.
Des témoins et des vidéos ont alimenté le débat sur l’usage d’armes non conformes au cadre légal et sur les éventuels dysfonctionnements dans la prise en charge des victimes. Des avocats insistent sur la nécessité d’une instruction complète pour établir les faits et les responsabilités, tandis que le parquet rappelle que certaines circonstances pourraient justifier l’emploi même non conforme des tirs dans un contexte hautement conflictuel.
La défense et les victimes restent mobilisées: les plaignants envisagent des démarches supplémentaires et une partie civile visant à déployer les investigations sous l’égide d’un juge d’instruction afin d’obtenir des éclaircissements sur les tirs et les conditions d’intervention des forces de l’ordre lors de la manifestation.
Réactions et suites procédurales
«La décision de classer sans suite les plaintes de mes clients alors que même que les vidéos n’ont pas été intégralement exploitées par les enquêteurs est incompréhensible alors que celles-ci pourraient révéler des informations fondamentales les concernant», a réagi l’avocate des blessés, Chloé Chalot, à Libération. Selon elle, l’ouverture d’une information judiciaire est une étape nécessaire pour traiter l’ensemble des faits et les contextes entourant les tirs tendus.
Des représentants de la défense soulignent que l’ouverture d’une information judiciaire entraîne la désignation d’un juge d’instruction et peut conduire à de nouvelles auditions et expertises. Le rassemblement avait été largement médiatisé et suscité de nombreuses opinions sur la proportionalité et le cadre légal des opérations de maintien de l’ordre. Les prochaines étapes viseront à vérifier les éléments de preuve et à établir les responsabilités dans les tirs et les blessures.
À l’échelle locale et nationale, la question des tirs tendus et des procédures policières à Sainte-Soline reste au cœur du débat sur l’équilibre entre sécurité publique et droits des manifestants. D’autres éléments du dossier pourraient émerger au cours de l’instruction, avec des vidéos et des témoignages encore non exploités ou non vérifiés, susceptibles de modifier la compréhension des faits.