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La confirmation par le laboratoire pharmaceutique français Sanofi de sa volonté de vendre une participation majoritaire dans sa division santé grand public à un fonds d’investissement américain a suscité une vive réaction politique ce lundi. Cette annonce a ravivé des inquiétudes concernant la perte de souveraineté sur des médicaments clés.
Appel à l’action du gouvernement
Manuel Bompard, un responsable du parti de gauche La France Insoumise (LFI), a déclaré à TF1 que Paris “doit bloquer la vente” en utilisant ses pouvoirs pour protéger les secteurs stratégiques. Les politiques et les syndicats ont vivement critiqué l’accord proposé de 16 milliards d’euros avec le fonds américain CD&R, qui concerne la prise de contrôle de la filiale Opella, productrice de médicaments de marque emblématique comme le Doliprane, dont les boîtes jaunes dominent le marché français.
Réactions du gouvernement
Face à cette pression, le gouvernement minoritaire du Premier ministre Michel Barnier a annoncé avoir sécurisé une participation de 2 % dans Opella pour la banque publique d’investissement Bpifrance, ainsi que des garanties “extrêmement fortes” contre les suppressions d’emplois et la délocalisation. Opella emploie plus de 11 000 travailleurs et est présente dans 100 pays.
Sanofi se positionne comme la troisième plus grande entreprise au monde dans le marché des médicaments en vente libre, des vitamines et des suppléments. Selon le laboratoire, l’investisseur CD&R aidera à transformer Opella en un “champion mondial de la santé grand public basé en France”.
Critiques sur les garanties offertes
Cependant, les souvenirs des pénuries de médicaments durant et après la pandémie de Covid-19 sont encore vifs pour beaucoup, et les critiques estiment que les protections offertes sont insuffisantes. Bompard a souligné qu’une petite participation “ne donnera pas à l’État français un mot à dire dans les décisions stratégiques” chez Opella. Thomas Portes, également de LFI, a affirmé sur X que le gouvernement avait offert “aucune garantie, juste des mots”.
Engagements du ministre de l’Économie
Le ministre de l’Économie, Antoine Armand, a déclaré qu’un contrat entre CD&R, Sanofi et le gouvernement stipule le maintien des sites de production, de recherche et développement, ainsi que le siège officiel d’Opella en France, avec un investissement d’au moins 70 millions d’euros sur cinq ans. Ce contrat prévoit de “maintenir un volume de production minimum pour les produits sensibles d’Opella en France”, y compris le Doliprane.
Des pénalités financières seraient appliquées en cas de fermeture de sites de production en France, de licenciements ou de non-approvisionnement auprès de fournisseurs français, y compris Seqens, qui rétablit la production d’ingrédients actifs comme le paracétamol.
Les travailleurs inquiets
Johann Nicolas, représentant syndical CGT à l’usine de Doliprane à Lisieux, dans le nord de la France, a déclaré que les travailleurs “ne sont pas du tout rassurés par les derniers développements”. Il a ajouté qu’un piquet de grève a réduit la production de 1,3 million de boîtes par jour à environ 265 000.
Les protections proposées dans l’accord n’ont pas non plus convaincu certains membres du gouvernement. Charles Rodwell, un député du parti EPR de Macron, a exprimé des doutes quant à l’engagement à long terme, affirmant que les garanties “ne montrent pas du tout un engagement pour le long terme, que ce soit sur les investissements, l’approvisionnement ou les emplois”.
Attachement à la marque Doliprane
La vente d’Opella est particulièrement sensible en raison de l’attachement des Français au Doliprane. Les boîtes de cet analgésique non opioïde, utilisé pour soulager la douleur légère à modérée et la fièvre, sont omniprésentes dans les pharmacies. Le Doliprane se décline en plusieurs dosages, de 100 mg pour les bébés à 1 000 mg pour les adultes, et se présente sous différentes formes : comprimés, capsules, suppositoires et liquides.
Au point que les Français utilisent souvent le nom “Doliprane” pour désigner tout produit à base de paracétamol, même s’il est fabriqué par un autre laboratoire. Sanofi, qui figure parmi les 12 plus grandes entreprises de santé au monde, a déclaré que cette séparation faisait partie d’une stratégie pour se concentrer moins sur les médicaments en vente libre et davantage sur les médicaments innovants et les vaccins, y compris ceux contre la poliomyélite, la grippe et la méningite.