Home ActualitéSciencePhysicien Nobel confirme la dualité onde-corpuscule entre Einstein et Bohr

Physicien Nobel confirme la dualité onde-corpuscule entre Einstein et Bohr

by Sara
Allemagne, États-Unis

Une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT) dirigée par le physicien Wolfgang Ketterle, lauréat du prix Nobel de physique 2001, a réalisé une expérience inédite visant à mettre en lumière la dualité onde‑corpuscule en étudiant la diffusion de la lumière par des atomes individuellement refroidis près du zéro absolu.

Les résultats, publiés dans la revue Physical Review Letters (https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/zwhd-1k2t), relancent le débat historique entre Albert Einstein et Niels Bohr sur la possibilité de connaître le trajet d’un photon sans détruire son comportement d’onde.

Une version moderne de la fente double

Ketterle explique : « Nous avons réalisé une version parfaite de l’expérience de la fente double avec des atomes uniques et des photons uniques. Einstein et Bohr n’auraient jamais imaginé que cela deviendrait possible un jour. »

La configuration expérimentale reproduit, à l’échelle atomique et avec une précision extrême, l’esprit de la fameuse expérience de la fente double où l’interférence révèle la nature ondulatoire de la lumière.

Wolfgang Ketterle (MIT)

Wolfgang Ketterle, prix Nobel de physique 2001, et son équipe au MIT.

Retour sur le débat Einstein–Bohr

Depuis près d’un siècle, la question posée par Einstein reste centrale : peut‑on déterminer par quelle fente passe un photon sans effacer le motif d’interférence associé à son comportement d’onde ?

Selon l’interprétation de Copenhague formulée par Bohr et Heisenberg, connaître précisément le trajet revient à traiter la particule comme un corpuscule, ce qui entraîne la disparition de l’interférence. Einstein, lui, imaginait des « variables cachées » rendant la trajectoire réelle même en l’absence d’observation.

La nouvelle expérience permet aujourd’hui de tester ces idées avec des atomes et des photons isolés et contrôlés.

Des milliers de « fentes » atomiques

Pour l’expérience, l’équipe a utilisé environ 30 000 atomes de lithium et de dysprosium disposés dans une grille tridimensionnelle régulière.

Plutôt que deux fentes comme dans le montage classique, chaque atome joue le rôle d’une fente miniature :

  • la disposition ordonnée des atomes permet d’obtenir un signal d’interférence propre et mesurable,
  • l’extinction soudaine de la « piège optique » libère les atomes qui s’étendent ensuite sous forme de nuages d’ondes quantiques,
  • le balayage laser enregistre les photons diffusés par chaque atome pour analyser la nature de la diffusion.

Cette organisation facilite l’analyse fine du motif d’interférence et réduit le « bruit » lié au désordre.

Expérience fente double au MIT

Deux types de diffusion : cohérente et incohérente

L’étude distingue deux régimes de diffusion lorsque le photon frappe un atome :

  • diffusion cohérente : le photon conserve une relation de phase fixe avec le faisceau laser initial,
  • diffusion incohérente : la phase est aléatoire et la diffusion porte une « signature » permettant d’identifier l’atome qui a interagi.

Ketterle précise : « La lumière cohérente reste synchronisée avec le laser, alors que la lumière incohérente révèle facilement quelle atome a diffusé le photon. »

En pratique, la diffusion incohérente est très faible — quelques photons détectés par cycle — ce qui a obligé l’équipe à isoler et rendre extrêmement sensibles leurs détecteurs.

Illustration du principe de superposition de Schrödinger

Avant mesure, un système quantique existe en superposition d’états ; la mesure fait « s’effondrer » cette superposition.

Preuves en faveur de Bohr, défi pour Einstein

Les observations montrent que la diffusion incohérente laisse une « empreinte » sur l’atome — une légère excitation motrice — qui permet d’identifier l’atome impliqué.

Cette marque constitue une information sur le trajet du photon et explique la disparition du motif d’interférence, conformément aux prédictions de l’interprétation de Copenhague.

Les chercheurs n’ont trouvé aucune trace d’un « chemin caché » réconciliant simultanément l’apparition d’un trajet connu et la préservation de l’interférence, comme l’espérait Einstein.

Wolfgang Ketterle et l'équipe du MIT

Wolfgang Ketterle avec l’équipe ayant mené les expériences au MIT.

Atome piégé ou libre : une invariance surprenante

Une conclusion notable est que la quantité de diffusion incohérente ne change pas selon que l’atome soit confiné dans une trappe optique ou libre dans l’espace.

Ketterle commente : « Nous montrons que la trappe ne modifie pas fondamentalement la nature de la diffusion. »

Autrement dit, la diffusion incohérente est un phénomène fondamental lié à l’intrication partielle entre photon et atome, et non à des détails expérimentaux de la trappe.

Perspectives et travaux à venir

L’équipe ne compte pas s’arrêter là. Après l’étude des atomes isolés, les chercheurs examinent désormais l’interaction entre atomes voisins et son effet sur la cohérence de la lumière diffusée.

Ketterle indique avoir déjà observé des phénomènes nouveaux en étudiant deux atomes en interaction, suggérant un riche terrain d’exploration sur la manière dont la matière module la cohérence lumineuse.

Ces avancées ouvrent la voie à des tests expérimentaux encore plus fins des principes fondamentaux de la mécanique quantique et à des applications potentielles dans le contrôle quantique de la lumière et de la matière.

source:https://www.aljazeera.net/science/2025/9/3/%d9%81%d9%8a%d8%b2%d9%8a%d8%a7%d8%a6%d9%8a-%d8%ad%d8%a7%d8%a6%d8%b2-%d8%b9%d9%84%d9%89-%d9%86%d9%88%d8%a8%d9%84-%d9%84%d9%84%d8%ac%d8%b2%d9%8a%d8%b1%d8%a9-%d9%86%d8%aa-%d8%ad%d8%b3%d9%85%d9%86%d8%a7

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