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Justice transitionnelle en Syrie : défis et enjeux pour l’avenir
Le régime d’Assad a chuté de manière dramatique et s’est effondré rapidement le 8 décembre dernier. Il est important de noter que ce sont les Syriens qui ont mis un terme à ce régime après avoir enduré de nombreuses années d’oppression. Il incombe désormais à la nouvelle administration de construire une nouvelle phase qui différera de l’image catastrophique et tragique de la Syrie antérieure, tout en répondant à de nombreuses exigences internes et externes, à travers une transition où des plans pratiques et rapides seront présentés. Ces plans devraient établir une gouvernance éclairée et être mis en œuvre par un gouvernement de transition largement représentatif, éventuellement conduisant à des élections législatives et présidentielles libres et justes, permettant ainsi aux Syriens de former leur avenir.
Importance de la justice transitionnelle
Parmi les exigences de la phase de transition en Syrie figure la nécessité d’atteindre l’harmonie sociale, qui ne peut se réaliser sans la justice transitionnelle. Cette dernière est considérée comme un objectif fondamental de la révolution et une question essentielle dans le chemin vers la construction d’une nouvelle Syrie, car elle s’intéresse à la manière de traiter les violations et les crimes commis contre le peuple syrien pendant plus de cinq décennies de régime autoritaire. Il est essentiel que la justice transitionnelle soit inclusive, en mettant l’accent sur la responsabilité des auteurs de crimes, en particulier les membres du régime d’Assad, qu’ils soient militaires ou politiques.
Dans ce contexte, le commandant général de la nouvelle administration syrienne, Ahmad al-Shar’a, a souligné le 10 décembre dernier la nécessité de poursuivre les criminels de guerre et de demander leur extradition depuis les pays où ils se sont réfugiés, afin qu’ils soient tenus pour responsables de leurs actes.
Les objectifs de la justice transitionnelle
La justice transitionnelle vise à établir la vérité sur les violations commises, à prouver ces violations par des preuves irréfutables, à reconnaître la souffrance et la douleur des victimes, à tenir les auteurs responsables légalement et à réparer les dommages causés. Cela inclut également l’indemnisation des familles des victimes et la mise en place de lois et de principes permettant d’éviter des violations futures durant la période de transition et au-delà. En effet, elle constitue une voie vers la réconciliation sociale et la cicatrisation des blessures sociales.
Elle revêt également une importance particulière en contribuant à rétablir la confiance entre les différentes composantes de la société syrienne. Elle est considérée comme une pierre angulaire de toute opération de transition qui devrait, en fin de compte, mener à la réconciliation nationale. La meilleure manière de traiter les séquelles de l’autoritarisme est de mettre en œuvre cette réconciliation nationale après avoir établi des législations et des mécanismes qui garantissent la justice sociale, conformément à des approches juridiques réfléchies, loin des pratiques de vengeance, d’exclusion et d’éradication.
Défis et parcours de la justice transitionnelle
Le parcours de la justice transitionnelle n’est pas seulement juridique ou administratif, mais est aussi un processus transformationnel visant à reconstruire la confiance dans les institutions et à établir les bases d’un nouveau contrat social entre les Syriens. Ce processus est semé d’embûches, car il fait face à de nombreux défis sur les plans pratique et politique. Le nombre élevé de personnes impliquées dans les violations représente un obstacle majeur, qui pourrait dépasser la capacité de tout système judiciaire à y faire face. De plus, la nouvelle administration se trouve dans une position difficile en raison de la nécessité de reconstruire ses institutions politiques et judiciaires.
La justice transitionnelle comporte également des défis liés à la poursuite des personnes impliquées dans la violence politique et militaire, ce qui complique la réalisation de la justice tout en garantissant la stabilité. De nombreuses expériences de justice transitionnelle existent, ayant vu le jour après la Seconde Guerre mondiale, notamment lors des procès de Nuremberg visant les criminels de guerre nazis. Par la suite, la justice transitionnelle est devenue un domaine d’application pour traiter les violations des droits de l’homme commises par des régimes autoritaires ou durant des conflits et des guerres.
Vers une réconciliation nationale
Si l’objectif de la justice transitionnelle est d’atteindre l’harmonie sociale et la réconciliation nationale en Syrie, cela nécessite la formation d’un comité indépendant pouvant inclure des représentants de la société civile, des acteurs sociaux sur le terrain, ainsi que des entités juridiques et des organisations internationales de droits humains. Cela vise à trouver un équilibre entre la justice transitionnelle et la réconciliation nationale, dans le but de créer un cadre légal propice à la réalisation de la justice, tout en affirmant l’État de droit que recherchent les Syriens.
Il est indéniable que le processus de réconciliation et de réparation nécessite une approche inclusive, tenant compte de toutes les facettes politiques et sociales et permettant à chacun de s’exprimer. Cela pourrait être facilité par la création de plateformes interactives à l’intérieur de la Syrie, contribuant ainsi à bâtir le processus de transition selon des mécanismes favorisant le dialogue national.