Home ActualitéSécurité et défenseL’arsenal russe des drones : de l’héritage soviétique à une force intégrée

L’arsenal russe des drones : de l’héritage soviétique à une force intégrée

by Sara
Russie, Ukraine

À la fin des années 2000, le développement des drones est devenu un axe central de la stratégie militaire russe. La montée en puissance de leur production a été accélérée par la répétition des conflits, notamment les affrontements avec l’Ukraine, aboutissant à la mise en place d’une industrie nationale capable de fabriquer et d’exploiter une large gamme de systèmes sans pilote.

En 2025, la production russe de drones a fortement augmenté, faisant de ces appareils un pilier de la politique de défense. L’emploi massif de drones a montré son efficacité pour réduire les pertes humaines, réaliser des frappes précises et limiter les coûts comparés aux systèmes classiques.

Héritage soviétique et débuts

Les recherches soviétiques sur les drones remontent au début des années 1960. Les premiers modèles incluaient l’UT-123, remplacé par la suite dans les années 1980 par les avions de reconnaissance sans pilote Tupolev TU-141 et TU-143.

Dans les années 1980, deux grandes familles ont émergé :

  • des drones de reconnaissance à réaction comme les Kraylo‑1 et TU-243, dotés de capacités de transmission de données en temps réel ;
  • des drones tactiques légers destinés à l’observation et à l’ajustement du tir d’artillerie, tels que le Shmiel‑1, tandis que le Chela‑T1 n’a été produit qu’au cours des années 1990.

Rupture et relance industrielle

L’effondrement du système soviétique à la fin des années 1980 puis en 1991 a provoqué un arrêt quasi total des programmes de drones. Le secteur est resté en dormance jusqu’à la fin des années 2000, avant qu’une relance industrielle ne soit engagée en Russie.

Les conflits, et en particulier la guerre de 2008 contre la Géorgie, ont poussé Moscou à accélérer ses investissements. L’usage des drones est alors devenu un élément stratégique majeur, intensifiant la reconstitution d’une base industrielle nationale.

Intensification et diversification des capacités

La filière russe a progressivement évolué, en commençant par des drones tactiques légers comme les El’eron et en passant par des plateformes multi‑rôles telles que la famille ZALA. Par la suite, le développement a inclus des drones d’attaque lourds à longue portée.

Plusieurs évolutions notables ont marqué la période récente :

  • la production de drones suicide à moindre coût (ex. KUB‑BLA, Lancet) par des industriels tels que ZALA ;
  • le développement de modèles inspirés ou dérivés de drones iraniens (versions locales de Shahid renommées Giran) ;
  • l’apparition de drones FPV et de quadricoptères équipés pour lâcher des charges explosives ;
  • l’intégration de l’intelligence artificielle pour améliorer l’autonomie et la précision des missions ;
  • l’emploi en 2025 de câbles à fibre optique sur certains modèles (ex. Molniya‑2) pour résister au brouillage et accroître la portée des frappes.

Parallèlement, des drones factices à coût réduit ont été développés pour épuiser les défenses aériennes adverses en provocant des interceptions sur des cibles non létales.

Malgré l’effort d’autonomie, la Russie continue d’importer certaines technologies et plateformes, notamment des équipements pour la production et des drones complets en provenance de l’étranger.

Images représentatives

Drone russe Orion en vol

Le drone russe Orion, illustrant les capacités opérationnelles lourdes, affiche un rayon d’action pouvant atteindre 300 kilomètres.

Drones marins et terrestres

Si la priorité initiale a été donnée aux drones aériens, la fin des années 2010 et le début des années 2020 ont vu une montée en puissance des systèmes terrestres et maritimes sans pilote.

Les plateformes terrestres couvrent un large spectre de missions : déminage, logistique, appui au combat et guerre électronique. Parmi les familles et modèles figurent :

  • les UGV de la famille Uran (6, 9, 14) et des modèles tels que Marker, Scarab, Sfir, Soratnik, Shturm et Oudar ;
  • des véhicules plus légers et moins coûteux développés durant la guerre, conçus pour la mobilité et l’emploi en première ligne ;
  • exemples opérationnels : Yugik pour la reconnaissance et le harcèlement de tir, SEM‑350 multi‑rôle, les véhicules suicide Liagushka et Skorpion, et le Courier pour le soutien logistique et la guerre électronique.

Sur le plan maritime, la Russie a développé des drones sous‑marins et de surface destinés à la reconnaissance, au déminage et à la lutte contre les drones hostiles. Parmi les réalisations annoncées :

  • le drone sous‑marin Skat pour la prospection et le déminage ;
  • des vedettes et unités de surface telles que l’Orkan, la Murena‑300S et des plateformes suicide comme l’Avalina ;
  • des unités polyvalentes comme le Vizer et le GRK‑700, conçues pour patrouille, intercep­tion de drones ennemis en mer, logistique et évacuations médicales.

Centres de production et volumes

La Russie vise, selon ses autorités, à devenir un leader mondial des drones d’ici 2030. Pour atteindre cet objectif, elle a intensifié la production dès le début des années 2020.

Les chiffres rapportés publiquement sont importants :

  • en 2023, les forces armées russes auraient reçu près de 140 000 drones de divers types ;
  • en 2024, la production aurait atteint 1,5 million d’unités ;
  • en 2025, un rapport évoquait une croissance moyenne de la production de 3,7 % sur les cinq premiers mois, avec un pic en mai (+17 % par rapport au mois précédent).

Le réseau industriel s’étend sur tout le territoire : Moscou, Saint‑Pétersbourg, Novgorod, Ryazan, Sakhaline, Tomsk, le kraï de Perm, l’Oudmourtie et le Tatarstan figurent parmi les centres de fabrication.

Le paysage industriel compte des dizaines, puis des centaines d’acteurs :

  • en été 2023, environ 70 fabricants étaient identifiés, dont 20 grandes entreprises ;
  • début 2025, plus de 400 sociétés locales participeraient aux efforts de R&D et de production, selon des bilans publiés dans la presse spécialisée.

Quelques pôles et entreprises clés :

  • la zone économique spéciale d’Alabuga (Tatarstan) : production de modèles lourds et de versions locales des drones iraniens (Giran) ;
  • Izhevsk : ZALA Aero Group (Lancet, KUB‑BLA, ZALA), Unmanned Systems et d’autres fournisseurs locaux ;
  • Saint‑Pétersbourg : centre technologique produisant la famille Orlan ; Kazan : société Enix pour les El’eron ; Kronstadt : spécialisée dans l’Orion ; Samara : centre de recherche et production pour les drones.

Principales familles et modèles de drones russes

La flotte russe couvre diverses catégories, classées selon la mission. Ci‑dessous, les familles et modèles les plus représentatifs.

Multirôles et reconnaissance

  • Granat (1–4) : drones tactiques pour reconnaissance, guidage et surveillance (15–70 km) ;
  • El’eron (3SV, T‑28 ME, 10, 3) : petites plateformes tactiques (25–60 km) ;
  • Zastava, Takion : courtes portées pour observation de terrain (10–40 km) ;
  • Orlan (10, 10E, 30) : drones opérationnels‑tactiques multi‑rôles, portée jusqu’à 200 km, plafond ~6000 m ;
  • Forpost‑R : version locale inspirée de l’Israélien Searcher 2, portée ~450 km et capacité d’emport conséquente ;
  • ZALA (421‑16E, 421‑04M) : plateformes tactiques de détection et désignation d’objectifs (15–50 km).

Drones suicide (loitering munitions)

  • KUB‑BLA : drone tactique de première ligne (10–15 km), ogive ~3 kg ;
  • Lancet‑1 / Lancet‑3 : drones tactiques opérant jusqu’à 40 km, ogives 1–3 kg ;
  • Scalpel : drone tactique opéré jusqu’à 40 km, ogive ~5 kg ;
  • Giran‑1 / Giran‑2 (versions locales des Shahid iraniens) : portée stratégique jusqu’à 900–2000 km selon variantes, ogives de 10 à 40 kg ;
  • Shahid‑238 : version évoluée pour frappes en profondeur (portée ~1200 km, ogive ~25 kg).

Drones factices

  • Gerbera : dispositifs imitant les signatures radar de drones Shahid, très peu coûteux et sans charge explosive, destinés à saturer les défenses aériennes adverses.

Drones marins

  • Vizer : drone de surface à haute vitesse (jusqu’à ~83 km/h), portée ~500 km, rôle anti‑drone et patrouille ;
  • GRK‑700 Vizer : plateforme polyvalente pour destruction de drones adverses en mer, logistique et appui ;
  • Orkan, Murena‑300S : vedettes et drones de surface pour surveillance, lutte contre les mines et escorte ;
  • Avalina : drone‑bateau suicide pour frappes maritimes.

Drones terrestres

  • Yugik : UGV de reconnaissance et de neutralisation, capacité de charge ~5 kg ;
  • SEM‑350 : véhicule terrestre tactique pour évacuation et transport de matériel (portée 2–5 km) ;
  • Courier (Kurier) : plate‑forme électrique de 250 kg pour logistique, armement léger et guerre électronique ;
  • Debisha : UGV logistique multi‑rôle, capacité de charge jusqu’à 200 kg pour transport et évacuation.
source:https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2025/10/22/%d8%aa%d8%b1%d8%b3%d8%a7%d9%86%d8%a9-%d8%a7%d9%84%d9%85%d8%b3%d9%8a%d8%b1%d8%a7%d8%aa-%d8%a7%d9%84%d8%b1%d9%88%d8%b3%d9%8a%d8%a9-%d9%85%d9%86-%d8%a7%d9%84%d8%a5%d8%b1%d8%ab

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