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Un enregistrement Jubillar, réalisé à l’insu de l’accusé le 17 décembre 2020, a été diffusé mardi 30 septembre 2025 à la cour d’assises du Tarn et a profondément marqué l’audience du procès Jubillar, en soulevant des interrogations sur l’attitude de Cédric Jubillar après la disparition de sa femme, Delphine.
Enregistrement Jubillar diffusé à l’audience
La cour a entendu mardi un enregistrement audio de Cédric Jubillar, d’une durée de 22 minutes et 36 secondes, réalisé trente-trois heures après la nuit du 15 au 16 décembre 2020, lorsque Delphine Aussaguel a cessé de donner signe de vie. L’enregistrement a été rapporté par Davy, cousin germain de la victime, qui, accompagné de Sébastien, le frère cadet de Delphine, s’est rendu au domicile de l’accusé à Cagnac-les-Mines le 17 décembre pour lui rendre visite.
La présidente de la cour a accepté la diffusion du document. La salle, les parties civiles, la défense et le public sont demeurés silencieux pendant l’écoute, observant un Cédric Jubillar tendu dans son box, vêtu d’un pull noir.
Extraits de l’audio et éléments évoqués dans l’enregistrement
Dans la conversation, l’accusé s’exprime longuement, sur un ton différent de ses déclarations formatées entendues précédemment. Il évoque notamment la situation conjugale et sa perception d’une rupture imminente :
« Quand avez-vous parlé du divorce ? » l’interroge un de ses interlocuteurs. « Cet été. On s’était donné un mois, un mois et demi pour sauver le couple. Et en octobre, elle [Delphine] m’a dit : ‘Non mais de toute façon, ça ne sert à rien, ma décision est prise, je suis déjà très loin dans ma tête’. Je me dis qu’elle a trouvé quelqu’un ».
Il fait état de ses doutes quant à un possible amant, un propos qui rejoint ce qu’il avait déclaré aux gendarmes. Il aborde ensuite l’enquête et la recherche de traces : « D’après ce que j’ai pu comprendre, c’est fini, il n’y a plus de traces de son téléphone », dit-il d’une voix nerveuse.
L’enregistrement mêle des reproches sur la vie quotidienne et le travail, des descriptions des opérations techniques menées par les enquêteurs — il cite le produit « Bluestar » employé pour détecter du sang — et des critiques envers sa femme : « On était un couple colocataire. Présents que pour la maison et les enfants. Je ne savais plus rien de ses journées. »
À la fin du document, l’émotion de l’accusé est perceptible : des pleurs et un effondrement physique. Après diffusion, Davy a livré son ressenti :
« Il est tombé d’un coup. Il n’y avait aucune larmes, que des gémissements. On s’est regardés avec mon cousin : pour nous, c’était faux. »
Réactions des proches et débats à l’audience
Le témoignage de Davy a été marqué par le scepticisme quant à la sincérité de l’accusé. Il a expliqué qu’à ses yeux Cédric parlait beaucoup de la maison, des travaux et des experts, mais « il n’avait aucune compassion pour Delphine. Il ne parlait pas de la disparition ». Safya Akorri, avocate d’une amie proche de la disparue, a observé que Jubillar « parle énormément d’elle au passé » alors que le sort de Delphine reste inconnu.
Pauline Rongier, une autre avocate présente à l’audience, a noté : « Le seul moment où il parle d’elle, c’est pour la critiquer, et même, il se victimise un peu. » Davy a ajouté : « Oui, j’étais étonné. Surtout, on ne le voyait pas du tout comme ça : pour nous, c’était Cédric qui prenait les décisions. »
La diffusion de l’audio a provoqué un vif échange entre avocats. Mourad Battikh, qui avait demandé la diffusion du document et voulait interroger l’accusé à son sujet, a interrogé Cédric Jubillar depuis le box : « Moins de 10% du temps », a répondu l’accusé lorsqu’on lui a demandé à quel pourcentage il s’était intéressé à la disparition de sa femme.
La séance s’est envenimée lorsque l’avocat a dénoncé une contradiction concernant la date à laquelle Jubillar aurait envisagé une piste religieuse ; la présidente n’a pas suivi l’argument comme l’entendait la partie civile et la défense a tenté d’interrompre plusieurs reprises. À un moment du débat, Mourad Battikh a lancé :
« Votre client est un menteur ! »
Portée de l’enregistrement pour le procès Jubillar
Aux yeux des magistrats et des parties, l’enregistrement n’apporte pas de preuve matérielle de culpabilité mais constitue un élément factuel susceptible d’alimenter l’intime conviction des jurés. Les propos tenus dans cet audio sont, en grande partie, cohérents avec ceux qu’il a déjà tenus aux enquêteurs et répétés devant la cour, même si l’attitude de l’accusé y paraît, pour plusieurs témoins, décalée par rapport à la disparition Delphine.
La cour poursuivra l’examen des éléments et auditions sans qu’à ce stade l’enregistrement ne soit présenté comme une preuve décisive ; il s’inscrit néanmoins dans le dossier et dans le débat entre parties civiles et défense autour de l’attitude de Cédric Jubillar dans les heures et jours qui ont suivi la nuit du 15 au 16 décembre 2020.